Les photos de végétaux qui bourgeonnent alors que l'on est en automne fleurissent depuis quelques jours sur les réseaux sociaux, faisant craindre à certains des conséquences pour les récoltes futures. Mais ce phénomène n'inquiète pas pour l'instant les viticulteurs du Languedoc. On vous explique pourquoi.
Tout est parti d'un tweet de l'agro météorologue héraultais Serge Zaka. Ce 26 octobre, il poste le message suivant, accompagné d'une photo d'un pied de vigne portant de nouvelles feuilles : "Vision lunaire dans les vignobles du Pic St Loup : certaines parcelles débourrent. Les températures excessives et la durée du jour simulent une sorte de "faux printemps" qui fatigue et déboussole la plante. Ces bouleversements de cycle sont des marques du changement climatique".
Aussitôt, en réponse, de nombreux internautes publient eux aussi leur constat similaire. Mais d'autres nuancent les conclusions du scientifique, à l'instar d'un certain Mat, qui précise certains termes : "On ne peut pas parler de débourrement car la vigne doit d’abord entrer en dormance… La dormance n’est toujours pas atteinte et la vigne continue à faire de nouvelles feuilles… après en avoir perdu beaucoup !"
Faut-il oui ou non s'inquiéter ?
Effectivement, Mat a raison : le terme "débourrement" est à réserver au phénomène de bourgeonnement du printemps, lorsque la vigne se réveille de son repos végétatif hivernal et monte en sève. En ce mois d'octobre où les températures restent anormalement élevées après les vendanges, la plante poursuit simplement son cycle précédent. Cependant, comme au printemps, à ce stade, le risque majeur reste la survenue des gelées. Mais Guilhem Vigroux, vigneron et président de la Fédération Départementale des Syndicats d'Exploitants Agricoles de l'Hérault (FDSEA 34), n'est pas inquiet :
Le terme est excessif. Là, on est dans l'affolement. C'est sûr, il fait chaud, mais ce n'est pas la première fois. Oui, le froid va arriver, mais il faudrait qu'on passe à moins dix degrés en quelques jours pour causer des dommages irréversibles et ce n'est pas à l'ordre du jour.
Guilhem Vigroux, vigneron et président de la FDSEA 34
Les conséquences de la sécheresse à surveiller
Il concède cependant qu'il faudra surveiller les vignes qui ont le plus souffert de la sécheresse et qui sont déjà très fragilisées par le stress hydrique. Le journaliste et viticulteur des Côtes-du-Rhône Xavier Delbecque est dans ce cas et se pose des questions : "Vous êtes à la bourre dans l'Hérault. J'étais déjà au stade 8 feuilles étalées aux vendanges sur les vignes défoliées par la sécheresse. Je me demande quand même comment on va faire à la taille, il n'y aura pas de nouveau bourgeon principal".
Laisser faire la nature
En règle générale, la floraison tardive n'altère pas de manière significative le bourgeonnement printanier dans son ensemble. Seuls quelques boutons sont touchés. Même Serge Zaka, qui a lancé l'alerte, reconnaît qu'il y a peu d'études sur le sujet et qu'il est difficile d'avoir une idée de l'incidence que cela pourrait avoir sur la récolte. Comme le dit Guilhem Vigroux : "Il n'y a pas grand-chose à faire, sauf laisser faire la nature".