Présentés le 19 mars dernier, les premiers résultats de l'opération de bio-contrôle lancé en août 2023 ont été jugés très encourageant par les viticulteurs et la Chambre d'agriculture de l'Hérault. Les trichogrammes, petites guêpes parasitaires utilisées contre les papillons ravageurs de vignes, pourraient ainsi devenir une alternative aux pesticides.
Guêpe 1 - papillon 0. Le 19 mars dernier, la Chambre d’agriculture de l'Hérault et les professionnels de la vigne se sont réunis pour exposer leur retour d'expérience sur une opération de bio-contrôle inédite en France. Le principe : combattre le feu par le feu, en utilisant des insectes pour en chasser d'autres qui nuisent aux récoltes, et le bilan s'avère a priori positif.
Lâchers de trichogrammes
L'affrontement insectoïde a débuté en août 2023. Plusieurs vignerons ont procédé à des lâchers de trichogrammes, des espèces de petites guêpes, censées s'attaquer à une espèce de papillons ravageurs, le Cryptoblabes gnidiella, aussi appelé pyrale des agrumes. Apparu en France il y a une dizaine d'années, ce dernier raffole le raisin mûr et préoccupe les viticulteurs de l'Hérault à l'approche des vendanges.
Suite à des attaques dans leur vignoble, quatre caves coopératives (Les Costières de Pomérols, L’Ormarine (Pinet), Les vignerons de Sérignan, les VPE - Maraussan) et deux caves particulières (Béziers et Vendres) ont ainsi pu expérimenter cette nouvelle technique de bio-contrôle pour lutter contre l'insecte ravageur.
Une microguêpe parasitaire
"On s'est inspiré d'une opération de bio-contrôle assez similaire menée il y a dix ans, explique Tiphaine Cambournac, responsable de l'observatoire viticole de l'Hérault. Dans un tiers du vignoble héraultais, on avait lancé une expérimentation sur la confusion sexuelle afin de s'attaquer au ver de grappe qui détruisait nos récoltes. On avait installé des diffuseurs de phéromones dans les vignes pour perturber le papillon pondeur et l'empêcher de s'accoupler, ce qui avait plutôt bien marché."
Mais le départ du papillon a laissé le champ libre à l'arrivée d'un nouveau : le Cryptoblabes gnidiella, qui s'établit d'ordinaire plutôt sur le littoral et dont le cycle de reproduction est mal connu. "Cette fois, l'opération était logistiquement plus complexe puisqu'on parlait de manipuler du matériel vivant, poursuit l'ingénieur agronome. Les trichogrammes sont des microguêpes de moins d'un millimètre qui viennent pondre dans les œufs des papillons pour se reproduire et ainsi les faire avorter. On place pour ça des cartons contenants les œufs de trichogrammes dans les vignes juste avant les vendanges."
Les trichogrammes sont des microguêpes parasitaires de moins d'un millimètre qui viennent pondre dans les œufs des Cryptoblabes gnidiella pour se reproduire et ainsi les faire avorter.
Tiphaine Cambournac, responsable de l'observatoire viticole de l'Hérault
Bien que cette année, la pression du papillon ravageur se soit moins fait ressentir, la Chambre d'agriculture affirme avoir constaté des résultats similaires entre les vignobles qui avaient utilisé des insecticides et ceux qui avaient recouru aux trichogrammes, voire meilleurs dans le cas de ces derniers. Les vignerons tests ont ainsi souhaité renouveler l'expérience en 2024.
Une alternative aux insecticides
Le coût économique reste néanmoins élevé en comparaison à l'usage de pesticides, puisqu'un lâcher de trichogrammes coûte dans les 75 € par hectare. Le département de l'Hérault a ainsi pris en charge 80% du coût financier de l'opération en 2023, soit environ 12 600 euros pour 116 hectares concernés.
Mais outre l'aspect économique pour les vignerons, les trichogrammes représentent également un enjeu environnemental et de santé publique. "Ils pourraient représenter une alternative aux pesticides, ou en tout cas contribuer à réduire leur utilisation, espère la responsable à la chambre d'agriculture de l'Hérault. Certaines parcelles en bordure de cours d'eau sont considérées comme des ZNT (Zone de non-traitement, NDLR) et n'ont pas le droit d'utiliser des phytosanitaires, les trichogrammes pourraient beaucoup les intéresser. Ils sont également compatibles avec l'agriculture bio."