Les enquêteurs de la Police Judiciaire ont une nouvelle fois manifesté à Montpellier contre la départementalisation qui les placerait sous l'autorité d'un directeur départemental et du préfet. Une réforme menée selon eux sans concertation et qui porterait atteinte à leur liberté d'enquêter.
Ils ne décolèrent pas. D'ordinaire très discrets, les enquêteurs de la police judiciaire multiplient les rassemblements devant les hôtels de police depuis plusieurs mois. Ils sont de nouveau redescendus dans la rue pour protester contre la réforme de leur service ce lundi 6 mars contre un projet "de nature à porter gravement atteinte à l’efficacité des enquêtes et à l’indépendance de la justice".
Cette réforme à l'origine de leur colère propose de placer tous les services de police à l’échelle du département, dont la PJ, sous l’autorité d’un seul directeur départemental de la police nationale (DDPN), dépendant du préfet. Malgré leurs remarques et protestations, la réforme aura lieu.
"A la lecture du courrier du ministre de l’Intérieur, l’Association Nationale de la Police Judiciaire (ANPJ) constate amèrement qu’aucune des objections et inquiétudes soulevées par les enquêteurs, les magistrats, les avocats et de nombreux élus n’ont été entendues", constate l'ANPJ dans un communiqué.
Le ministre vient donc d’accomplir l’incroyable performance de mettre à terre la Direction Centrale de la Police Judiciaire qui combattait sans relâche et de toutes ses forces la criminalité organisée, grave et complexe.
Association Nationale de la Police Judiciaire
"Le sentiment qui domine aujourd’hui au sein des rangs de la police judiciaire est l’écœurement devant un projet qui est une copie quasi-conforme de celui proposé en juin dernier, preuve que non, il n’y a pas eu de dialogue, non, il n’y a pas eu de concertation". La lutte contre la criminalité financière en sera particulièrement impactée, les SPJ étant souvent dépourvus d’enquêteurs spécialisés. Si l’objectif inavouable était d’affaiblir les services susceptibles d’engager des enquêtes sur certaines personnalités, il est atteint et dépassé, poursuit l'association.
"Cela fait six mois qu'on essaie d'alerter le gouvernement sur les dangers de cette réforme qui signe l'arrêt de mort de la Direction centrale de la Police Judiciaire et malgré les moratoires préconisés, notamment par une commission sénatoriale, le ministre de l'Intérieur n'écoute personne.
Nathalie, enquêtrice à MontpellierTrésorière de l'ANPJ
"Le Directeur départemental va concentrer tous les services de police (l'investigation avec la PJ, la petite et moyenne délinquance avec la sûreté départementale, le renseignement et l'immigration clandestine, le tout sous l'autorité du préfet. On récuse une fois de plus cette hiérarchie", martèle Nathalie, enquêtrice à Montpellier et trésorière de l'ANPJ.
Pour une réforme, mais pas celle-là
L’ANPJ rappelle qu’elle n’a jamais été opposée au principe de réforme de la police nationale et qu’elle est plutôt favorable à l’instauration de filières métiers. Elle souhaite cependant un échelon hiérarchique a minima régional, apte à coordonner et garantir les moyens et l’action des services d’investigation exerçant traditionnellement sur des zones géographiques très étendues et sur des affaires sensibles et complexes.
Appel au président de la République
L’ANPJ va donc solliciter une audience auprès du Président de la République qui semble aujourd’hui le seul interlocuteur possible pour arbitrer une crise qui engage la sécurité des citoyens et la responsabilité de l’État.