SDF étrangers : "Ils ne sont pas les bienvenus", le tweet choc du préfet de l'Hérault à peine publié aussitôt effacé

Un tweet posté ce jeudi après-midi, sur le compte officiel du préfet de l'Hérault, a attiré l'attention des internautes. Les propos du représentant de l'Etat stigmatisant les SDF algériens et marocains sont clairs et sans filtre. Peut-être trop justement, car 2 heures plus tard, ce tweet avait disparu.

La sécurité et la lutte contre la délinquance ont toujours été les priorités du préfet de l'Hérault depuis son arrivée à Montpellier, en juillet 2021. Il s'est notamment attaché à faire disparaitre les bidonvilles dans la métropole et il est aussi à l'origine du village de transition installé dans le quartier de la Rauze pour accueillir les Roms.

Un changement de politique spectaculaire, à l’opposé de la politique d’accompagnement qui prévalait depuis plusieurs années et qui lui a valu le surnom de “préfet bulldozer".

Aujourd'hui, ce tweet rapidement effacé, voulait probablement montrer qu'Hugues Moutouh prenait le problème des violences avec armes, à Montpellier, très au sérieux, chiffres à l'appui. Puisqu'il parle de 104 gardes à vues en 2 mois. Bref, qu'avec la police, il s'occupait de gérer le fléau de la délinquance.

Mais la conclusion de son tweet, "Ils ne sont pas les bienvenus", (ndlr, les SDF étrangers) a choqué des associations car on pourrait croire à un avis plus personnel que préfectoral. De plus, ce tweet pointe des ressortissants de 2 pays bien spécifiques du Maghreb.

Il a d'ailleurs dû être jugé inopportun à posteriori puisqu'il a rapidement disparu du compte du préfet.

Réaction aux écrits du préfet

Les écrits du préfet de l'Hérault ont surpris voire indigné les associations et collectifs qui viennent en aide aux migrants.

Pour l'avocate de la LDH 34, la Ligue des Droits de l'Homme de Montpellier, "ces propos sont à la limite de l'indignité. Comme s'il y avait une délinquance spécifique aux personnes étrangères et sans domicile fixe".

On n'a pas une parole d'extrême droite puisque l'exécutif et l'administratif sont astreints à une neutralité mais nous avons là une parole qui tire extrêmement vers la droite de la part d'un haut fonctionnaire.

Sophie Mazas, avocate de la LDH Montpellier.

Et elle ajoute : "Ce qui est choquant, c’est qu’il arrive à déshumaniser, en si peu de mots, des réfugiés et des personnes sans domicile fixe. C’est vraiment choisir le bouc émissaire, celui qui est à la rue et qui a une gueule de métèque. On jette en pâture, on déshumanise, comme si ces gens étaient le fléau principal". (...) "Est-ce que le préfet Moutouh se met au diapason d’une partie de l’Europe, Hongrie, Italie,…?".

Une obligation de "réserve" et de "loyalisme" au gouvernement

Un préfet peut-il dire cela ? C'est en substance la question que se posent ce soir les personnes qui ont réagi au tweet.

Pour Thibaud Mulier, maître de conférences en droit public à l'université Paris-Nanterre, interrogé par Franceinfo en 2019, s'il "bénéficie d'une liberté d'opinion", le préfet en général est bien "astreint à un devoir de réserve" car "il est un représentant de l'Etat". Et ce devoir de réserve l'engage "à ne pas manifester son opinion ou avoir un comportement de nature à porter atteinte à l'image et à la considération du service public", notamment en matière de sécurité publique et du maintien de l'ordre.

Mais le préfet n'est pas un agent public comme les autres. Il "exerce une fonction politique éminemment sensible : il est très dépendant de l'exécutif et met clairement en place la politique qu'il décide", analysait Thibaud Mulier. "Sa situation est d'ailleurs précaire, puisque sa fonction est à la discrétion du gouvernement et du président de la République, en raison de sa nomination en Conseil des ministres".

Serge Slama, professeur de droit public à l'université de Grenoble, est plus nuancé dans sa lecture de la parole du préfet : "Quand un préfet s'exprime publiquement, il est la voix de l'Etat mais aussi celle du gouvernement. Le préfet peut donc s'exprimer librement, dès lors qu'il est sur la ligne politique du gouvernement" expliquait l'enseignant en 2019.

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