Un litre d'eau sur cinq serait perdu en France à cause des fuites dans les réseaux. Dans l'Hérault, une boule connectée est testée pour géolocaliser ces fuites et éviter un vaste gaspillage.
La SmartBall, condensé de technologies de la taille d'une balle de tennis, est introduite dans l'antique canalisation qui, depuis un forage au milieux des vignes, alimente en eau potable la ville de Pézenas (Hérault). Sa mission: géolocaliser les fuites, pour mieux les réparer.
Sur les 2,5 km de canalisation en fonte, vieille de plusieurs décennies, qui amène jusqu'au centre-ville l'eau de ce forage situé en pleine campagne, la perte en eau est estimée à 100 m3 par jour, soit "l'équivalent de la consommation annuelle d'un ménage", a expliqué mercredi le maire de la ville, Armand Rivière.
L'utilisation sur ce tronçon de la SmartBall, développée par l'entreprise américaine Xylem, "va permettre un gain de 36.000 mètres cubes d'eau par an", espère-t-il.
Un litre sur cinq perdu
Sur l'ensemble de la France, un litre d'eau potable sur cinq est perdu dans les fuites, selon l'Office français de biodiversité et l'Observatoire des services publics d'eau et d'assainissement. Mais l'origine de ces pertes peut être variée, micro-fissures, joints défectueux, problèmes de valves, a expliqué en marge de l'opération Vincent Gaudy, vice-président chargé de l'eau au sein de l'agglomération Hérault-Méditerranée, qui réunit une vingtaine de communes autour de Pézenas et qui consacre une dizaine de millions d'euros par an à la réfection du réseau d'adduction.
Par les méthodes traditionnelles, la localisation des fuites peut s'avérer ardue, les indices se réduisant parfois à une flaque d'eau ou à une zone de végétation un peu plus luxuriante qu'ailleurs, selon des agents de l'agglomération également présents. Faute de précision, quatre d'entre eux ont récemment creusé, "en pure perte", une tranchée de 500 mètres, pendant deux semaines, la fuite qu'ils pensaient y trouver n'étant pas là.
Alors, élus locaux, techniciens et "clients potentiels" venus de villes et départements voisins observent attentivement Yann Ezan, développeur commercial chez Xylem, faire la démonstration de son petit robot aux allures de boule Pokémon rouge.
Insérée dans une boule de mousse bleue plus large assurant sa protection, la SmartBall est déposée à l'aide d'une perche et d'un crochet au point de départ de la canalisation, au niveau de la station de pompage du forage. Elle se déplace ensuite, emportée par la pression, à une vitesse de 0,6 m/seconde, jusqu'au réservoir situé à l'entrée de la ville, où elle sera récupérée.
Tête d'épingle
Tout au long du trajet, qu'elle parcourra en un peu plus d'une heure, ses capteurs acoustiques ultrasensibles lui permettront de "repérer les fuites dès 0,1 litre par minute à 7 bars, soit la taille d'une tête d'épingle", selon le représentant de cette société spécialisée dans les technologies liées à l'eau.
Le système permet aussi de distinguer d'autre type de problèmes, comme la présence d'une bulle d'air plutôt que d'une fissure, et de la localiser précisément. Grâce aux émetteurs insérés dans la sphère, les ingénieurs de Xylem peuvent suivre sa progression en temps réel sur leurs ordinateurs. Ils fourniront leur première analyse en fin de journée aux opérateurs locaux, puis un compte-rendu détaillé dans les deux semaines.
Selon le maire de Pézenas, cette intervention, au coût de 42.000 euros, va permettre de cibler les interventions à effectuer en priorité et de réduire autant que possible les nuisances pour les populations, l'inspection se faisant sans coupure d'eau et les travaux inutiles n'étant pas entrepris.
Développée depuis une quinzaine d'années à l'international, la SmartBall commence à être connue en France. Ainsi elle a déjà été utilisée pour l'inspection d'un aqueduc de 39 km datant de 1924 en région parisienne ou celle de canalisations alimentant la ville de Nanterre (Hauts-de-Seine).
Venu en observateur, Grégory Buravant, responsable opérationnel de la Régie des eaux de Martigues, Port-de-Bouc et Saint-Mitre-les-Remparts, dans les Bouches-du-Rhône, pense que ce système "peut aider à la prise de décision". "Il y a toujours eu une prise de conscience, mais l'eau devient rare et il faut faire très attention", dit-il.
Avec AFP et Bérénice Del Tatto.