Dans la vallée de l'Agly fleuve à sec des Pyrénées-Orientales, asséchée après deux ans quasiment sans pluie, un regroupement d'agriculteurs et de communes mise sur la pistache pour s'adapter et plante de jeunes arbres. Car ce fruit à coque ne nécessite pas d'irrigation.
Ce ne sont encore que des arbrisseaux, mais ils portent en eux les espoirs de toute une vallée : à Saint-Paul-de-Fenouillet (Pyrénées-Orientales), ce lundi matin, on a planté des pistachiers. La pistache, fruit à coque originaire du Moyen-Orient, intéresse beaucoup les producteurs catalans car elle pousse même dans les endroits les plus arides.
Myriam Levalois Bazer, coordinatrice de l'association APARM (Avenir Productions Agricoles Résilientes Méditerranéennes), explique : "ça demande très peu d'eau et c'est résistant aux maladies". Et de l'eau, dans la vallée de l'Agly, rivière à sec, on en manque : avec un déficit de 50%, il faut trouver des solutions.
Sur sa page Facebook, l'association se réjouissait dès ce weekend de la plantation des 400 premiers arbres : "Près de 400 plants de pistachiers de différentes variétés de greffons et porte-greffes chargées dans le camion municipal qui plantera lundi prochain 2 vergers pilotes".
Des pistaches pour un marché de niche
Une quinzaine d'hectares, répartis entre vergers communaux et propriétés agricoles, font l'objet d'études financées par l'Agence de l'eau. On y produira des pistaches vertes émondées destinées aux marchés de la pâtisserie et de la gastronomie. Une niche pour éviter de se retrouver de se battre à armes inégales avec les géants du créneau de l'apéritif, très concurrentiel.
Des variétés aussi très sobres en intrants, un atout de plus mais pas le seul, selon Jean-Luc Llanes, membre de l'APARM (Avenir productions agricoles résilientes méditerranéennes), qui souligne aussi son intérêt pour la prévention du risque incendie :
L'intérêt c'est aussi de combattre les friches, et par là-même lutter contre les incendies, une dimension importante dans le département. On joue donc sur trois leviers : économique, environnemental et sécuritaire.
Jean-Luc Llanes, membre de l'association APARM
Produire à moindre coût, sans eau ni pesticides
Ce projet est né d'une expérimentation impulsée par le maire de Saint-Paul-de-Fenouillet, inspiré par un voyage dans le sud de l'Espagne. Il y a quatre ans, il plante quelques pistachiers, "pour voir". Et le résultat est là.
Ce ne sont pas des zones irrigables. Et là, on a quand même la possibilité d'y planter quelque chose, avec un coût de production dérisoire comparé à la vigne.
Jacques Bayona, maire de Saint-Paul-de-Fenouillet
Première récolte dans sept ans
Quant aux rendements, l'expérience espagnole a de quoi faire rêver : "ils avaient un chiffre d'affaires à l'hectare de 21 000 euros, ce qu'on n'a jamais eu avec la vigne !", s'émerveille l'édile. En attendant, même si on trouve des pistachiers sauvages un peu partout dans les Pyrénées-Orientales, pour goûter à la production locale, il faudra patienter 7 ans.
Écrit avec Barbara Gorrand et Christelle Chabaud