Drame de Millas : la défense demande l'annulation de l'enquête technique et dénonce les liens des experts avec la SNCF

Plus de 3 ans après la terrible collision mortelle entre un car scolaire et un train régional à Millas, près de Perpignan, un nouvel élément pourrait bien perturber l'instruction. La défense plaide l'annulation de l'expertise technique en raison du "manque d'impartialité" de certains experts.

Le 7 avril prochain, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, réunie en chambre du conseil, se prononcera sur l'objectivité du collège de quatre experts, désigné par le juge d'instruction pour l'enquête technique du drame de Millas.

Des conflits d'intérêts soulevés par l'avocat de la conductrice

Cette procédure fait suite à une requête formée par Maître Jean Codognès, avocat de la conductrice du car. Ce dernier s'interroge sur les liens de certains membres du collège en charge de l'enquête technique avec la SNCF. Il soulève notamment, la présence de conflits d'intérêts.

"Lorsque des experts sont sollicités par des juges d’instruction, ils doivent préciser quelles sont leurs relations d’intérêts avec les parties à la procédure", détaille Jean Codognès.

Ça ne sert à rien de lapider la conductrice, nous devons la vérité aux parents des victimes.

L'avocat met notamment en exergue l'appartenance de certains membres à des filiales et autres partenaires de la SNCF qui conduiraient ainsi selon lui, à un procès "non équitable" pour la conductrice du car. 

J’ai lu la presse locale encore ce matin, la formule suivante est attribuée à un magistrat : "il n’y a pas beaucoup d’experts qui ne soient pas dépendants de la SNCF en France", c’est la vraie problématique. Ce que je vais exposer devant la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, c'est une recherche de la vérité.

Jean Codognès, avocat de la conductrice du car de l'accident de Millas.

Avant d'ajouter, "je pense qu’il y a des experts indépendants en France. Il y a des trains qui fonctionnent en Espagne, Belgique, Italie. Dans une organisation européenne, on doit pouvoir trouver des experts totalement indépendants de la SNCF. Ça ne sert à rien de lapider la conductrice, nous devons la vérité aux parents des victimes.".

Alors que les investigations dans cette affaire de l'accident du car de Millas touchent à leur fin, cette requête en nullité à l'encontre de certaines expertises pourrait bien bousculer l'avancée de l'instruction toujours en cours.

Le point sur l'enquête trois ans après le drame

  • L'expertise médicale sur la prise de somnifères par la conductrice 

Le 8 août 2019, l'expertise conclut qu'il n'y a "aucune relation" entre l’accident et le traitement médicamenteux de la conductrice. Selon les expertises médicales menées, le somnifère serait évacué en six heures. Pris à 20 heures la veille de l'accident, il ne peut pas avoir eu d'effet sur le comportement de la conductrice.

Pourtant, en avril de la même année, de nouvelles pièces du dossier d'instruction de l'accident, issues notamment du laboratoire pharmaceutique Sanofi, fabricant le somnifère, mettaient en cause l'hypnotique.

Sanofi qui fabrique le médicament, précisait qu'il "peut influencer de façon conséquente l’aptitude à conduire, avec des risques possibles de somnolence, un allongement du temps de réaction et la diminution de la vigilance, particulièrement pendant les douze heures suivant la prise du médicament". La prise du médicament risque également, toujours selon son fabricant, de provoquer "une conduite automatique avec amnésie post événementiel".

Par ailleurs, l'enquête a également révélé que, pendant les 90 secondes précédant l'accident, la conductrice avait semblé en pilotage automatique avant un brutal coup de frein, trop tardif, devant la barrière baissée du passage à niveau et malgré les coups de klaxon du conducteur du TER.

  • Le rapport du bureau d’enquêtes sur les accidents

Le 17 mai 2019, le bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre (BEA-TT) a estimé que "le scénario le plus probable" de l'accident de Millas était une défaillance de la conductrice du car, qui n'a pas perçu que le passage à niveau était fermé. Ce dernier affirme qu'il n'y a pas eu de dysfonctionnement des équipements ferroviaires.

Le Bureau d'enquêtes avance "plusieurs facteurs", en particulier "la visibilité réduite de la signalisation lumineuse de position", notamment celle du feu rouge clignotant de droite et "l'arrêt des sonneries du passage à niveau au moment où les demi-barrières étaient abaissées".

Tous les articles sur le drame de Millas sont à retrouver ici.

Pour l'heure, la date du procès reste incertaine. Après trois ans d'enquête, de nombreuses zones d'ombres persistent quant aux circonstances exactes de cet accident. Un drame qui a fait 6 victimes, 6 collégiens.

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