REPORTAGE. BTP et environnement : cette entreprise qui fabrique du béton à partir de déchets recyclés

Dans les Pyrénées-Orientales, une entreprise spécialisée dans l'exploitation de carrières et la production de gravier, travaille au recyclage de ses déchets depuis quinze ans. Nouvelle étape : l'inauguration d'une unité de retraitement des gravats à échelle industrielle pour produire des granulats de seconde main. Une infrastructure unique en France.

Le secteur du BTP est le premier générateur de déchets en France, et de loin, avec pas moins de 250 millions de tonnes chaque année. Pour encourager le tri et le recyclage des déchets du bâtiment, de nombreuses démarches collaboratives ont été lancées entre l’État et les professionnels du secteur.

Une seconde vie pour les gravats

Réutiliser les rebuts du BTP, une priorité environnementale dont la société Vaills a depuis longtemps saisi les enjeux. Spécialisée depuis 1993 dans l'exploitation de gravières et de sablières, la société familiale s'est dernièrement fixé un nouvel objectif : donner une seconde vie aux gravats.

L'idée qu'on a voulu mettre en œuvre, c'est d'arrêter d'enfouir des matériaux qui étaient valorisables. De ce fait on va éviter de remplir nos décharges sur les sites autorisés. On remplit moins nos décharges et puis on va aussi moins consommer dans nos carrières, puisque tout ce qu'on recycle ce sont des matérieux qu'on n'ira pas chercher dans nos gisements naturels.

Jean Vaills, PDG de l'entreprise 

Il s'agit là d'un projet ambitieux mais lourdement réfléchi depuis plus de vingt ans par Jean-Luc Vaills. Le patriarche a depuis cédé les commandes et ce sont ses deux fils, Jean et Jérôme Vaills, respectivement président et directeur général de la société familiale qui ont parachevé le concept. Depuis un an, le site Recycat66 s'est installé en bordure du fleuve la Têt, sur la commune de Baho, près de Perpignan.

Un procédé novateur

C'est un ballet ininterrompu de camions bennes qui vont et viennent, sur le nouveau site de la société Vaills, au milieu de montagnes de plusieurs mètres de hauteur. D'un côté, un ramassis de gravats, de l'autre de gigantesques tas de sable et de gravier tout neuf, fins prêts à retrouver une seconde vie. Et pour ce faire, les déchets sont déversés, tonns après tonne, sur les tapis d'une machine dont la fonction est de séparer les différents matériaux. Première étape importante, le concassage. 

On va d'abord broyer les différents éléments. Ensuite diverses étapes de criblage, de lavage, d'attrition sur les matériaux et pour finir, une dernière séparation qui va nous donner le produit fini.

Jérôme Vaills, Directeur général de l'entreprise

Chaque heure, 200 tonnes de gravats sont ainsi englouties puis triées. Des aimants aspirent la ferraille, les impuretés sont ensuite séparées par frottement avant de passer dans un bassin de filtrage. Exit plastiques, polystyrènes, métaux, morceaux de bois, briques, pour ne garder que bétons, graviers et sables. Selon l'entreprise, 90% des déchets du BTP pourraient désormais être revalorisés.

Une démarche vertueuse

Déconstruire et reconstruire grâce à des matériaux recyclés, la PME Catalane s'inscrit, avec le nouveau site de Baho, dans une dynamique vertueuse réclamée par l'AGEC 2020, une loi antigaspillage pour une économie circulaire. Moins consommer de matières naturelles et surtout éviter au maximum les dépôts sauvages, les entreprises du BTP sont vivement incitées à venir déposer leurs gravats dans ce site écoresponsable avec des mesures qui tendent vers une reprise prochainement 100% gratuite. 

Pour fournir des granulés recyclés, la PME Catalane a investi 11 millions d'euros dans ses nouvelles installations dont trois spécialement dédiés à la récupération de l'eau employée en grande quantité et qui est "recyclée à 99%" précise Jérôme Vaills. Avec "une qualité et un prix identiques" à des matériaux classiques, les produits commercialisés par la société catalane devraient emporter le choix des entreprises sensibles au développement durable. Vaills ambitionne de traiter 300 000 tonnes de déchets du BTP chaque année. C'est autant de matière première naturelle qui sera économisée.