Afin de poursuivre l'alimentation en eau de certaines communes des Pyrénées-Orientales, des prélèvements ont lieu de plus en plus souvent dans des nappes profondes, appelées "pliocènes". Une ressource difficilement renouvelable et dont le captage suscite des inquiétudes. Explications.
La situation de la commune de Banyuls-sur-Mer, dans les Pyrénées-Orientales, a de quoi inquiéter. Le niveau dans le captage du Val Auger est si bas, sous le niveau de la mer, que de l'eau salée est entrée dans la nappe phréatique, rendant l'eau impropre à la consommation. Ce n'est pas la première fois que ce point de prélèvement, alimenté par le fleuve La Baillaury, est contaminé par de l'eau saline.
Peu profonde, cette nappe quaternaire est facilement exploitable, mais vulnérable aux pollutions, par des pesticides ou des eaux salées qui s'y infiltrent. Elle souffre également de la sécheresse : faute de pluies, le cours d'eau en surface est à sec et ne permet pas à la nappe de se recharger.
Le pliocène, une ressource secours très fragile
"Aujourd'hui, on pallie avec de l'eau qui vient d'ailleurs et le quaternaire étant très sec, Banyuls-sur-Mer est alimenté comme beaucoup d'autres communes par le pliocène", explique Nicolas Garcia, vice-président du Conseil départemental, en charge de l'eau.
Les nappes pliocènes sont situées plus en profondeur et ont la particularité d'être "captives". L'argile qui les constitue les isole de la surface et donc de la pollution, mais rend difficile l'infiltration des eaux de pluie. "L'écoulement dans les nappes pliocènes est très lent, à des échelles qui ne sont pas du tout l'échelle humaine", explique Hichem Tachrift, directeur du syndicat mixte des nappes du Roussilon.
Explications sur le fonctionnement des nappes phréatiques dans la plaine du Roussillon :
Or, les prélèvements réalisés ces dernières décennies appauvrissent la ressource dans les nappes profondes, "à la baisse, lente et régulière, depuis les années 60", indique le syndicat. Et comme pour les nappes du quaternaire, la baisse du niveau d'eau implique un risque plus élevé de voir entrer des biseaux salés dans la nappe.
La sécheresse, facteur aggravant
"Cette situation fait craindre pour l'avenir", s'alarme Nicolas Garcia. "Le pliocène est une ressource captive qu'il faut garder pour les générations futures mais aussi parce que c'est le pliocène qui empêche le biseau salé d'entrer partout sur la côte."
Le problème c'est que ces situations-là on les connaît dans des étés très secs au mois d'août, voire septembre. Là, on a déjà eu cette situation en mai, en juin et là de nouveau.
Nicolas Garcia
"Sur le papier, c'est réversible", rassure Yvan Caballero, hydrogélologue au Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM). "Pour faire sortir cette eau de mer, il faudrait réussir à faire remonter le niveau d'eau douce de manière à chasser l'eau de mer pour revenir à une situation d'équilibre."
Mais dans un département où la sécheresse sévit depuis plus d'un an, "on a du mal à envisager que l'on puisse remplir suffisamment les nappes pour chasser l'eau de mer", reconnaît-il. Mardi 18 juillet, un record de chaleur à 40,4 degrés a été enregistré à Serralongue, à 700 mètres d'altitude. Plus de trois degrés au-dessus du dernier record enregistré onze ans auparavant.