Témoignage. "Humainement, on n'en peut plus", nouvel incident à la prison de Perpignan, le ras-le-bol des agents pénitentiaires

Publié le Écrit par Elsa Panadès

Un détenu casse une canalisation et met le feu à sa cellule avant de s'attaquer aux agents. Nouvel incident au centre pénitentiaire de Perpignan. Les gardiens alertent sur la dégradation de leurs conditions de travail, les conditions de détention et une escalade de la violence.

Depuis des mois, les incidents, attaques de gardiens et problèmes avec les détenus se multiplient à la prison de Perpignan. La surpopulation carcérale chronique dans de nombreux établissements d'Occitanie, dont Carcassonne, Béziers et Perpignan n'arrange rien.

Le détenu casse une canalisation et met le feu à sa cellule

Les faits se sont déroulés à 23h45 dans la nuit de lundi à mardi 30 juillet. Alors que des agents de la prison de Perpignan effectuaient leur ronde de sécurité habituelle, ils constatent une inondation dans le quartier d'isolement.

"C'était énorme, il y avait 20 cm d'eau dans la coursive" nous explique Vincent Matha, gardien présent au poste de sécurité cette nuit-là.

En plus de l'inondation provoquée par un détenu qui a cassé une canalisation, dans la même cellule, les rondiers observent un début incendie. Le prisonnier aurait "mis le feu à son lit en hauteur". Mobilisation générale, ce sont huit agents qui interviennent pour contenir l'incendie, stopper l'inondation mais aussi maîtriser l'individu "caché dans les toilettes" déjà connu pour des actes de violences.

L'individu a ensuite été transféré dans l'aile disciplinaire. Cet incident, qui se solde sans blessé, intervient quelques jours à peine la tentative de prise d'otage au cours de laquelle un agent pénitentiaire a été agressé et "taillé de l'épaule jusqu'au bras".

Y a une usure, un ras-le-bol. Humainement, on n'en peut plus.

Vincent Matha, agent pénitentiaire - Secrétaire local adjoint UFAP UNSA Justice Perpignan

Pour Pierre Grousset, responsable local du Syndicat Ufap Unsa Justice, la situation devient intenable.

Ils savent qu'ils ne risquent rien. C'est récurrent. Nous, on n'a pas la solution et l'administration et l'Etat ne veulent pas trop trouver de solution. A partir de là, ça devient compliqué pour le personnel. Ils attendent qu'il y ait un mort chez nous pour réagir. Voilà la situation.

Pierre Grousset, Responsable local UFAP UNSA Justice Perpignan

Le responsable local du Syndicat UFAP UNSa tient à souligner que l'incident de la nuit dernière aurait pu être plus grave compte tenu du "passif violent du détenu". Le 9 juin dernier, ce même individu "bien connu pour avoir fait le tour des prisons occitanes", est accusé d'avoir "agressé sexuellement la psychologue de la Protection Judiciaire Jeunesse" dans le quartier mineur de la prison de Perpignan.

"On est à l'agonie"

Au travers de ce énième incident, le syndicat UFAP UNSa dénonce des conditions de travail qui se détériorent de jour en jour avec des détenus de plus en plus violents et des agressions de plus en plus fréquentes. Déjà en sous-effectif, la profession a du mal à recruter. Conséquence, les agents en activité enchaînent les heures supplémentaires pour compenser les départs en retraite et les arrêts maladie. "Psychologiquement, c'est dur" souffle Vincent Matha, agent de la prison de Perpignan.

C'est difficile partout. On retrouve à l'intérieur de nos murs une violence qui se développe à l'extérieur. Y a plus le respect de rien. Depuis quelques années ça devient très compliqué.

Vincent Matha, agent pénitentiaire - Secrétaire local adjoint UFAP UNSA Justice Perpignan

Le secrétaire adjoint de l'UFAP UNSa confirme que le personnel est "à l'agonie", épuisé par le manque de personnel mais aussi par la surpopulation de l'établissement, "+260%" et "100 matelas au sol avec des détenus qui dorment par terre" ajoute le responsable local du syndicat.

Des conditions de détention que dénoncent également les agents qui n'hésitent pas à traverser les Pyrénées pour aller voir comment nos voisins de Catalogne gèrent leurs établissements.

"À Barcelone, ils sont moins emmerdés que nous"

Pierre Grousset met en avant des différences de fonctionnement et d'équipements entre la France et la Catalogne qu'il estime significatives. Par exemple, "ils ont des quartiers disciplinaires avec des cellules capitonnées, une antenne médicale à l'intérieur avec des lits avec attaches pour les détenus en crise suicidaire, des Mossos (la police catalane) qui font les rondes périphériques donc ils n'ont jamais de projections d'objets... À Barcelone, c'est autre chose. Ici on les (ndlr : détenus) surprotègent.".

Conscients que cela demande des moyens importants, les agents attendent désespérément des structures adaptées et avant tout une rapide prise de conscience du quotidien dans les centres pénitentiaires en France.

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