L'ASN, l'Autorité de Sûreté Nucléaire, met en garde sur le mauvais fonctionnement de la centrale de Golfech dans le Tarn-et-Garonnne.
La qualité des opérations d'exploitation à la centrale nucléaire de Golfech (Tarn-et-Garonne) s'est encore "détériorée" en 2019, a annoncé ce lundi l'Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN), qualifiant de "très mauvaise" son appréciation sur le fonctionnement général du site.
"L'ASN est très vigilante sur ce qui se passe actuellement à Golfech. Elle considère que les performances de sûreté nucléaire doivent faire l'objet d'une priorité absolue pour l'exploitant, et à ce titre-là, elle assure un suivi rapproché du site en 2020", a indiqué lors d'une vidéoconférence de presse Bertrand Frémaux, de la division de Bordeaux de l'ASN.
Défauts et manque de rigueur
Il a pointé une détérioration de la surveillance en salle de commande, et des défauts dans le respect des règles dans le pilotage des réacteurs.
L'ASN a également fait état d'un "manque de rigueur systémique" en matière de maintenance, notamment dans la traçabilité "très défaillante" des informations.
"L'année 2019 a aussi été marquée par la déclaration de nombreux événements significatifs pour la sûreté. Huit événements sont survenus pendant l'arrêt programmé du réacteur 2, dont un classé au niveau 2" (sur 7 de l'échelle internationale de gravité des désastres atomiques, Ines), a souligné l'ASN. Il s'agissait d'un incident survenu en octobre 2019 lors "d'opérations de vidange"d'un réacteur.
"Des situations inacceptables"
En matière de radioprotection, "nous avons constaté des situations inacceptables, notamment dans la maîtrise de la propreté radiologique des locaux potentiellement contaminés", a ajouté M. Frémaux.
Au chapitre de la protection de l'environnement, des efforts sont encore à faire, l'ASN ayant constaté "des rejets intempestifs de substances non-radioactives", dont une qui s'est déversée dans la Garonne.
A la suite de ces nombreux dysfonctionnements, des représentants de la direction d'EDF et du site de Golfech ont été auditionnés au siège de l'ASN à Montrouge en janvier, pour qu'ils présentent leur "plan de redressement" du site, a précisé l'ASN.
Pour Mathieu Albugues, Président de la Commission Locale d'Information (C.L.I. 82), "Ces déclarations de l’ASN sont dans la droite ligne du rapport présenté en fin d’année lors de notre assemblée générale et qui demandait à la direction de Golfech de se resaisir."
Le problème de la sous-traitance
La CLI alerte depuis de nombreuses années sur le principal problème au sein du du Centre nucléaire de production d'électricité (CNPE) de Golfech : le facteur humain. "Cela implique la culture de la sureté, la formation des agents et l'utilisation de plus en plus importante de sous-traitants, estime le jeune élu du conseil départemental du Tarn-et-Garonne. C'est un problème qui risque de durer et il faudra plusieurs mois, voir plusieurs années pour le résoudre."
Un avis partagé par Monique Guittenit de l'association Stop Golfech : "Tout ceci nous alerte mais il est vrai que la sous-traitance est un véritable problème. Il faut savoir que les 2/3 des employés de la centrale ont dernièrement pris leur retraite. Ce sont désormais des sous-traitant qui assurent leurs tâches, sans avoir été formés. C’est anormal. L’ASN devrait exiger des formations pour l’ensemble de ces sous-traitants."
L'actuel directeur du CNPE, Nicolas Brouzeng, va quitter son poste le 1er juillet prochain. Au sein de la CLI comme des associations environnementales, on espère que l'arrivée de son successeur durant l'été, actuellement en poste à EDF Production Méditerranée, permettra de remedier à l'ensemble de ces problèmes.
Le dernier incident en date, classé de niveau 1, sur la centrale, remonte au 5 juin. Il a affecté un circuit de contrôle du circuit primaire du réacteur 1, du fait d'un défaut de maintenance.
Située sur les bords de Garonne entre Agen et Toulouse, la centrale est composée de deux réacteurs de 1.300 mégawatts permettant de couvrir en moyenne 50% de la consommation électrique de la région Occitanie. Elle avait déjà fait l'objet d'un bilan 2018 critique, l'ASN ayant alors pointé une qualité de l'exploitation "dégradée".