Réunion de crise, cri d'alarme d'entrepreneurs… La menace brandie par la rapporteure publique sur la poursuite du chantier de l'autoroute A69 fait craindre le pire pour des acteurs économiques du Tarn, suspendus à la décision du tribunal administratif attendue pour début décembre.
Le tribunal administratif de Toulouse, qui examinait ce lundi 25 novembre 2024, le dossier controversé de l'autoroute A69, rendra sa décision sous une quinzaine de jours. À l'audience, la rapporteure publique, magistrate indépendante, a réclamé l'annulation de l'intégralité des autorisations environnementales de l'autoroute qui doit relier Castres à Toulouse. Il n'y a pas de "raison impérative d'intérêt public majeur" justifiant la construction de l'A69, a ainsi déclaré Mona Rousseau. Cet avis a fait l'effet d'un coup de massue pour les acteurs économiques engagés sur ce projet. À tel point qu'ils se sont réunis en réunion de crise, lundi soir.
"Cela pourrait nous être fatal"
Sur le chantier de l'A69, les acteurs économiques favorables à la construction de l'autoroute entre Castres (Tarn) et Toulouse (Haute-Garonne) expriment un véritable désarroi. De la colère aussi face à cette épée de Damoclès. Parmi eux, Gautier Castan, transporteur et responsable d'une entreprise familiale spécialisée dans les travaux publics. "À ce jour, notre entreprise a engagé 1,2 million d'euros pour l'achat de matériel et pour recruter dix-sept personnes. Si le projet s'arrête, ce sont des investissements qui n'auront servi à rien et qui mettront notre entreprise en difficulté", confie-t-il au micro de notre consœur de France 2.
L'arrêt de la construction de l'autoroute A69 pourrait être fatal aux PME comme la sienne. Ce chantier représente un quart de son chiffre d'affaires. C'est bien simple, la fin des travaux se solderait par "du licenciement direct", déclare Gautier Castan. Actuellement, 45 employés travaillent sur le chantier. "Nous ne pourrons pas repositionner les employés ailleurs car il n'y a pas d'autres chantiers disponibles. L'activité économique est morose. Ce chantier, c'était une aubaine pour nous et pour embaucher."
L'avis négatif rendu par la rapporteure publique concernant l'autorisation environnementale pour la construction de l'autoroute en a surpris plus d'un parmi les défenseurs du projet. "L'inquiétude réside dans le fait que des décisions, prises par des personnes extérieures au territoire, pourraient être désastreuses pour nous."
Si le territoire s'est battu pour cette autoroute, c'est qu'elle est vraiment nécessaire. C'est vital pour nous. On a le sentiment d'une injustice sociale et économique.
Gautier Castan, transporteur
L'entrepreneur en appelle au bon sens. Souhaite que le "territoire soit écouté".
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"Aujourd'hui, l'A69 c'est du harcèlement juridique"
Chef d'entreprise et président de l'association Via 81, Guy Bousquet attend la construction de cette portion d'autoroute depuis de longues années pour relier Castres à Toulouse et assurer le développement économique du sud du Tarn. Un retour à la case départ ? Inenvisageable. Inacceptable, en tous les cas. "Nous nous sentons pris au dépourvu.Voilà dix ans que nous traversons toutes les étapes administratives, des débats publics aux enquêtes publiques, sans faire de vagues", déclare Guy Bousquet. Cela pourrait bien changer.
Aujourd'hui, l'A69 c'est du harcèlement juridique qui doit cesser pour que nous puissions travailler sereinement. Je suis ému et un peu en colère car cela fait douze ou treize recours perdus. Et celui-là, il peut tout changer.
Guy Bousquet, président de Via 81
Les "pro-autoroute" se défendent d'être contre l'environnement. "Les chefs d'entreprise sont souvent plus concernés que ceux qui tiennent de beaux discours, dit Guy Bousquet. Nous prenons au sérieux les échéances de 2030 et 2050 ainsi que nos bilans carbone."
Et, à l'image de Guy Bousquet, les acteurs économiques n'entendent pas baisser les bras. Pour rappel, dans un manifeste publié sur le site de la Chambre de commerce et d'industrie du Tarn, 550 chefs d'entreprise disaient "Oui, à l'A69". En attendant la décision du tribunal administratif de Toulouse, les travaux se poursuivent sur le chantier. Atosca, le concessionnaire, a indiqué que 70% des ouvrages d'art étaient réalisés en ce mois de novembre 2024. L'objectif reste une mise en circulation en décembre 2025.
(Propos recueillis par Marie-Candice Delouvrier - France 2).