Après les manifestations des agriculteurs, le gouvernement a décidé de lever le plan Écophyto prévoyant de réduire l'usage des pesticides. Des producteurs bio sont revoltés par cette décision. Pour eux, cette solution n'en est pas une sur le long terme. Explications.
Chaque matin, le même rituel. Pierre Robert s'affaire pour la traite de ces 42 vaches laitières. Il n'a pas participé aux manifestations de colère des agriculteurs, même s'il dénonce des aberrations, notamment concernant le prix du lait.
"Pour moi, la première mesure, c'est que le prix du lait soit fait dans le bon sens, explique-t-il. Il est fait à l'envers. Ça part de la grande distribution et nous, on nous donne ce qu'il reste."
Un artisan, quand il vient chez vous, ce n'est pas vous qui faites la facture. C'est l'artisan. Et bien, nous, on est la seule profession où notre acheteur fait la facture.
Pierre Robert,éleveur et producteur laitier
L'éleveur et producteur laitier a quitté la coopérative laitière agro-industrielle Sodial pour une organisation de producteurs bio. Objectif : revenir à un mode de production plus vertueux et économiquement viable. "Je préserve les ressources naturelles, je préserve le sol et l'eau. Je veux donner à la génération suivante une terre en meilleur état que je ne l'ai reçue." Sur 14 hectares de son exploitation, il a planté des arbres. 550. Avec Pascal Massol, également producteur de lait, Pierre Robert défend l'agroécologie.
Aujourd'hui, dans l'agriculture, on pense qu'un arbre, c'est quelque chose qui gêne et qu'il faut enlever. Le défaut, il a été là. On a tout arraché, et maintenant il va falloir tout replanter.
Pascal Massol,responsable commercial Ferme du CEOR
Les deux éleveurs ont une vision bien particulière de l'agriculture. Pour eux, la mise en pause du plan Écophyto annoncée par le gouvernement pour répondre à la demande de la FNSEA n'est pas une bonne nouvelle.
"Respecter les fondamentaux"
Quel est l'intérêt de planter des arbres sur une exploitation agricole ? "C'est le climatiseur naturel. Si vous avez des arbres, plus vous avez de la végétation, plus vous avez de l'évapotranspiration par la photosynthèse et plus, il pleut. Ce n'est pas très compliqué", explique Pascal Massol.
L'éleveur adopte un ton dur à l'évocation des dernières manifestations agricoles. "Il fut un temps où vous donniez 1000 balles ou 10.000 balles à quelqu'un, c'était bon. Aujourd'hui, ça ne suffit pas. Ça va boucher un trou. Mais ils vivent à découvert. Ils vivent à crédit. Ils ne peuvent plus s'acheter de matériel et il le loue, ils peuvent plus acheter de vaches..."
Tous les pays sont en train de massacrer leurs sols pour être présents sur les marchés mondiaux. Il va venir un moment où il n'y aura pas un seul pays qui sera capable de produire ce dont il a besoin pour sa population.
Pascal Massol
Le plan Écophyto vise à réduire de moitié l’usage des pesticides d'ici à 2030. Face à la colère des agriculteurs, le ministre de l'agriculture a annoncé sa mise en pause.
Il vaut mieux baisser les curseurs, faire un produit de meilleure qualité, peut-être en quantité un peu moindre, mais de façon pérenne que de continuer à faire, entre guillemets, de la merde en se disant que demain ça ira mieux.
Pascal Massol
Pour ces éleveurs et producteurs laitiers, il faut commencer par "respecter les fondamentaux. Nous, notre génération, on a dit aux anciens, poussez-vous, on a la chimie. On voit aujourd'hui, que les purs et durs qui rouspètent encore, ils n'arrivent plus à désherber. La plante, elle s'adapte", poursuit Pascal Massol.
Et ils sont de plus en plus nombreux ces agriculteurs qui défendent un nouveau mode de production où agriculture et écologie vont de pair.