Autoroute A69 : "On sent venir un vent mauvais", la mobilisation "En roue libre" des opposants sous l'œil de l'observatoire des pratiques policières

Par arrêté, les préfectures du Tarn et de Haute-Garonne ont interdit les manifestations prévues ce samedi 8 juin 2024. Mais les opposants à l'autoroute Toulouse-Castres ne désarment pas. Et les bénévoles de l'observatoire des pratiques policières seront une fois de plus sur le terrain. Dans quel but ? Et que faut-il craindre ? Interview.

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Malgré les arrêtés préfectoraux des 5 et 6 juin 2024, les observateurs des pratiques policières de Toulouse seront bien présents sur la mobilisation des opposants à l'A69 prévue à Puylaurens (Tarn). Pas pour manifester car ce n'est évidemment par leur rôle, mais pour observer le comportement des forces de l'ordre.

Depuis sa création au moment du mouvement des gilets jaunes, l'observatoire a réalisé 260 sorties, dont une bonne vingtaine liée aux manifestations contre l'A69. Pascal Gassiot, qui est aussi membre de la fondation Copernic, sera là samedi matin, avec une dizaine de collègues bénévoles.

Malgré les interdictions, pourquoi l'OPP (observatoire des pratiques policières) sera bien à Puylaurens?

Pascal Gassiot. Effectivement. Il y aura 2, voire 3 équipes, soit une dizaine d'observateurs dès 10h samedi matin. Ces manifestations ont été interdites, mais le droit international nous permet d'y assister en toute liberté. Nous allons d'abord observer les conditions de cette interdiction, comment les arrêtés seront interprétés.

Nous verrons sur le parcours si nous sommes arrêtés, bloqués, nous regarderons comment se font les contrôles de police, la circulation des personnes. On va documenter tout ça un peu comme nous l'avions fait l'an dernier à Sainte-Soline (79). En toute neutralité, à l'écart, sans participer à la manifestation. Nous avons fait la même chose le week-end dernier en Ariège. La manifestation contre les gravières était aussi interdite, mais nous étions présents.

Ce sera votre 23 ou 24ᵉ observation pour une manifestation des opposants à l'A69. Que craignez-vous ? 

PG. L'effet de répétition est très inquiétant. À Sainte-Soline, le ministre de l'Intérieur avait annoncé que ce serait très violent. Les autorités avaient communiqué sur les armes retrouvées en amont de la manifestation. Là, c'est le même processus et ça nous inquiète au plus haut point.

On annonce la présence d’individus violents. Ils auraient trouvé des haches... Mais à la campagne, on trouve de tout dans les coffres et ce n'est pas pour aller manifester. C’est un raccourci douteux de la part de la communication de la préfecture. C’est de la prédiction. On annonce aux gens comment les choses vont se passer pour justifier le dispositif. On se croirait dans le film Minority Report. On sent un vent mauvais. 

Comment serez-vous équipés et qu'allez-vous faire ?

N'en déplaise aux forces de l'ordre, nous n'avons jamais été pris à partie par les manifestants. Au début, nous avions une simple chasuble et un portable. Maintenant, nous avons des casques, des lunettes et tout est filmé. Nous n'avons pas de matériel professionnel, ce n'est pas notre métier, mais on filme avec nos smartphones. On refuse la logique de l’image choc. On filme comme si on se promenait.

Dans un groupe de 3 ou 4 personnes, il y en a un qui filme ou qui prend des photos, un autre à côté en protection rapprochée, et un ou deux qui observent l’environnement. J'ai eu 2 côtes fracturées en 2019 lors d'une charge de police que je n'avais pas vu venir. Le danger ne vient pas des manifestants. On est souvent pris à partie par police alors que le droit international nous permet d'observer en toute liberté. La France ne respecte pas les textes internationaux. Lors de sa venue dans le Tarn, l'observateur de l'ONU Michel Forst avait pointé ces manquements.

Dans votre rapport rendu public il y a quelques jours, vous avez critiqué les agissements des forces de l'ordre sur le chantier de l'A69 ?

Oui, c'est la première fois que nous ne faisons pas un rapport généraliste, mais ciblé sur ces manifestations dans le Tarn. On a quelques précédents qui nous inquiètent. À la Crem'arbre (Saïx, Tarn), tous les moyens de police et d’armement ont été utilisés :  tous types de grenades, mais aussi des blindés ! La police française est la plus armée d’Europe. C'est disproportionné par rapport aux manifestations.

Vous savez, ces interdictions préfectorales réduisent le nombre de manifestants et c'est d'ailleurs fait pour ça. Dans mon entourage, certains me disent qu'ils ne viendront pas car ils ont trop peur. Nous ne sommes pas là pour prendre parti, mais je le répète, en 260 observations, une seule fois nous avons été victimes des manifestants. J'ai reçu une bouteille en verre, mais en fait, son lanceur visait un policier non loin de moi.

Dans un bilan rendu public, en fin de journée ce vendredi 7 juin 2024, par les forces de l'ordre dans le Tarn : 538 personnes ont été contrôlées et une centaine d'objets saisis. Une personne a été placée en garde à vue, selon les autorités.

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