Le projet de retenue d'eau de Sivens (Tarn), à l'origine de mois de tensions entre agriculteurs et écologistes, pèsera forcément sur les départementales dans ce fief du socialiste Thierry Carcenac, président du Conseil général depuis 25 ans.
Thierry Carcenac, président socialiste du Conseil général du Tarn depuis 25 ans a non seulement été le promoteur du projet de barrage, il en a aussi été le principal soutien politique.C'est donc apparemment une victoire écrasante qu'il a remportée le 6 mars, en faisant voter par 43 conseillers généraux sur 46 un nouveau projet de retenue sur "l'emplacement initial mais redimensionné" à la baisse. Seuls opposants: un apparenté Vert et deux communistes, tous anciens alliés du PS.
Mais le Parti socialiste, majoritaire avec les divers gauche dans le conseil sortant, se trouve toutefois désormais séparé des Verts et du Front de gauche par un gouffre qui pourrait lui coûter la présidence si les électeurs de ces deux sensibilités décidaient de lui faire payer Sivens lors du scrutin des 22 et 29 mars.
Le premier projet avait nécessité la destruction d'une partie de la zone humide protégée du Testet à Sivens, propriété de l'Etat. Il a été combattu notamment par les écologistes et des zadistes, qui occupaient le terrain depuis 16 mois, avant d'en être expulsés le 6 mars, juste après l'adoption du nouveau projet par le Conseil général, alors que les agriculteurs menaçaient de le faire eux-mêmes.
L'issue du mouvement d'occupation laisse un goût amer: le jeune écologiste Rémi Fraisse y a laissé la vie le 26 octobre, tué par l'explosion d'une grenade offensive des gendarmes.
Le coût total du nouveau projet est à peine plus faible (6,44 millions d'euros) que le premier (8,5 millions), alors que restent à gérer des dizaines de tonnes de déchets et des dégradations sur le site.
Jacques Thouroude, conseiller général UMP candidat à sa réélection et maire-adjoint de Castres, justifie son "oui" au nouveau projet voté: "Nous avons assumé nos responsabilités et je pense que mes amis ont eu raison d'y aller, de voter, d'éviter le drame et de maintenir les travaux sur les mêmes lieux".
"Je ne me sens pas engagé par une décision prise 15 jours avant les élections",
rétorque le député UDI du Tarn Philippe Folliot, considéré comme challenger de Thierry Carcenac à la présidence du Conseil, sa formation s'étant unie à l'UMP et à d'autres formations contre le PS et le FN.
Un mot-clé : l'alternance
Pour Pascal Pragnère, d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV),
"le vote (du 6 mars) est une confiscation de la démocratie. Aucun projet n'a à être voté avant que l'assemblée soit dissoute".
"Il y a des élus écolos qui commencent à nous donner des signaux positifs et c'est vrai que Sivens sera un des points de campagne dans le Tarn, mais l'élection ne tourne pas autour de Sivens", estime Philippe Folliot, qui a fédéré ses forces sous l'appellation "Passion du Tarn". "La gauche départementale est divisée, juge le député. C'est un point particulièrement important et essentiel", notamment parce que les socialistes et les Verts, c'est bien fini: "C'est plus qu'une rupture, c'est un gouffre, quelque chose d'irréconciliable".
"Tout le monde s'attend à une percée du Front National et à une chute du PS parce que divisé des écolos et du Front de gauche. La division ne pardonne pas", ajoute Jacques Thouroude.
En tout cas, nombre d'opposants aux socialistes jugent que Thierry Carcenac doit céder la place après 25 ans de présidence.
"Il faut jouer l'alternance", insiste Philippe Folliot, rejoint par Jacques Thouroude.
Thierry Carcenac reste néanmoins confiant et se place au-dessus de la mêlée: "Quand on regarde le conseil général du Tarn, il faut travailler avec tout le monde. Ce n'est pas la Haute-Garonne (majoritairement PS), ce n'est pas l'Aveyron (très majoritairement UMP)".
relativise-t-il."Si je ne suis pas reconduit, ce n'est pas la mort du petit cheval",
"Il y a une vie après cela, je suis actuellement sénateur, je suis à la commission des finances. Je m'occuperai d'autre chose".