"Nous manquons cruellement de services publics" : quand une commune est submergée par sa croissance démographique

Avec un taux de croissance annuel moyen de 5,4%, Fleury-Mérogis (Essonne) est l'une des villes les plus "dynamiques" d'Île-de-France. Or, elle peine à subvenir aux besoins des nouveaux arrivants, toujours plus nombreux.

"La population de Fleury-Mérogis a augmenté de 40% en moins de dix ans", expose Olivier Corzani, maire PCF de cette commune de 14 000 habitants. "Sauf que rien n'a été pensé [par l'ancienne municipalité, ndlr], à part le logement. Nous manquons cruellement de services publics, d’infrastructures sportives ou encore d’espaces verts", déplore-t-il.

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Arrivé à la tête de cette "ville à taille humaine" en 2019 lors d'une élection municipale partielle, et réélu en 2020, Olivier Corzani a fait de sa politique "de rééquilibrage et de rattrapage" une priorité de son mandat. "Le sujet pour nous est de ne pas construire de nouveaux logements, mais de travailler à produire et construire les services qu'il manque, et il en manque beaucoup."

L'édile regrette une construction "déraisonnée" de logements, évoquant l'éco-quartier des Joncs Marins "qui n'a rien d'éco", dit-il. Un quartier initié en 2001 par le maire PCF Michel Humbert et "totalement revu" en 2009 par l'ancienne majorité socialiste menée par David Derrouet. Plus de 1 700 logements ont été construits.

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"Les gens courent après les places en crèche"

Pour les maires, la construction de nouveaux quartiers implique un "coût très important" selon la fondation Jean-Jaurès, impliquant alors la construction de "nouveaux équipements" tels que des écoles, des crèches, des services sociaux ou des maisons de santé : exactement ce dont manque Fleury-Mérogis. 

Nous nous retrouvons avec un quartier très dense [...] et des écoles saturées

Olivier Corzani

Maire PCF de Fleury-Mérogis (Essonne)

"On s'attèle à rattraper tout ça. Nous nous retrouvons avec un quartier très dense où nos citoyens courent après les places en crèche et ne prennent pas plaisir à vivre avec des enfants scolarisés dans des écoles saturées", explique l'élu communiste. "Il faut du logement pour loger les gens, mais cela doit se faire de façon raisonnée et réfléchie."

Les coupes successives faites dans les dotations versées aux communes par l'État et la fin de la taxe d'habitation "ont fortement réduit la dynamique" entre les ressources des communes et l’arrivée de nouveaux habitants selon la fondation. En Île-de-France, plusieurs élus s'étaient mobilisés contre cette baisse infligée aux collectivités locales en 2015, sous le quinquennat Hollande.

À Fleury-Mérogis, Olivier Corzani le défend, le "petit supplément de DGF" – dotation globale de fonctionnement – lié à la présence du centre pénitentiaire sur près d'un quart de la surface communale ne comble pas les difficultés de la commune. "Nous n'avons aucune marge de manoeuvre sur le développement de l'espace foncier du centre pénitentiaire", ajoute-t-il.

Une commune qui doit subvenir aux besoins d'un millier d'agents pénitentiaires

Cent quatre-vingts hectares représentent l'emprise de ce "monstre" pénitentiaire sur la commune de Fleury-Mérogis. Au-délà d'une prison rattrapée par sa surpopulation chronique atteignant les 145% en 2019 selon Le Parisien, le centre pénitentiaire impose aussi son rythme.

Les agents pénitentiaires travaillent 24h/24 et ont donc des demandes assez spécifiques

Olivier Corzani

Maire PCF de Fleury-Mérogis (Essonne)

"Les agents pénitentiaires, par la nature de leur travail, travaillent 24h/24 et ont donc des demandes assez spécifiques, détaille Olivier Corzani. Le petit plus de dotation là-dessus, est très loin de couvrir le besoin de ces agents, ça c’est sûr." Avec certains services municipaux ouverts "de façon très large", soit de 7h à 19h30, augmenter leur plage d'ouverture "ne serait pas de trop", estime l'édile.

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S'ajoute à cela, une rotation démographique importante du personnel pénitentiaire de Fleury-Mérogis. "Sur 1 900 agents pénitentaires, près d'un millier vit sur la commune, dont 60% viennent d'outre-mer. Ils ne restent que 4 à 10 ans sur la commune, avant de repartir ailleurs en métropole ou en outre-mer", explique-t-il.

En revanche, il réfute tout lien entre cette rotation d'agents pénitentiaires et la forte croissance démographique de Fleury-Mérogis. "La commune reste toujours à environ 1 000 agents vivant sur son territoire. [...] La rotation est importante, mais l’augmentation est vraiment dûe au nouveau quartier des Joncs Marins."

Idem pour la surpopulation carcérale de la prison – qui n'est pas récente. "L'effet observé sur les chiffres de l'Insee correspond à la population qui vit réellement sur la commune, et c'est essentiellement lié à la construction de nouveaux logements", argue Olivier Corzani.

"Il s'agit de permettre aux communes de disposer de davantage de moyens"

"Maintenant, il faut prendre ensemble en main la vie des agents et leur condition sociale, avant et après le travail", témoigne l'élu communiste. Il plaide pour un partenariat "à créer" entre le ministère de la Justice et les villes qui accueillent des établissements pénitentiaires.

En contrepartie, les communes doivent s’engager à proposer des services à horaires larges qui correspondent aux besoins des agents

Olivier Corzani

Maire PCF de Fleury-Mérogis (Essonne)

"Il s'agit de permettre aux communes de disposer de davantage de moyens, et en contrepartie, celles-ci doivent s’engager à proposer des services à horaires larges qui correspondent aux besoins des agents", expose-t-il.

Toutefois, le maire ne cache pas son optimisme : un nouveau groupe scolaire de dix-sept classes, soit 450 à 480 écoliers, doit être inauguré le 29 juin prochain. "Il accueillera le centre de loisirs et la cuisine centrale pour cet été". Près de 337 élèves y sont attendus pour la rentrée 2024.

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