Le 12 janvier 2019, une explosion de gaz a soufflé une partie de la rue de Trévise, dans le IXe arrondissement de Paris. L'incident a fait quatre morts et 66 blessés. Deux ans après, une habitante se bat toujours pour qu'un fonds d'indemnisation soit créé. Nous l'avons rencontrée.
C'était un samedi comme les autres. Son mari était parti faire des courses au marché, elle se préparait à aller à son cours de yoga. Peu après 9h, une forte explosion a retenti au niveau du 6 rue de Trévise dans le IXe arrondissement de Paris.
"J'étais chez moi ce matin-là. Avec nos amis, nous étions dans la salle à manger en train de finir le petit déjeuner tranquillement. Ça a explosé, les vitres ont été soufflées. Mon mari était juste au coin de l'immeuble lorsqu'un pompier lui a dit : 'Monsieur, ne restez pas là.' Il a traversé, ça a explosé et il a reçu une tôle sur la tête, sans vraiment de gravité. Il pense que le pompier qui lui a dit de bouger est décédé", raconte Dominique Paris.
L'explosion a été entendue dans un rayon de 500 mètres. Une enquête déterminera par la suite que c'est une conduite de gaz qui en est à l'origine. Quatre morts (dont deux pompiers) et 66 blessés sont à déplorer.
Les dégâts matériels sont considérables. Quinze autres immeubles ont été touchés, trois sont encore aujourd'hui inhabités car éventrés ou trop fragiles. "On est parti sans rien, je suis partie avec mon petit sac et habillée comme un samedi matin. La première chose que l'on a faite c'est d'aller acheter des sous-vêtements. On n'a pu revenir chercher des affaires qu'en avril", poursuit-elle.
"Un drame comme il n'en est pas arrivé depuis 40 ans"
"Nous sommes une catastrophe, un drame, comme il n'en est pas arrivé depuis 40 ans. Ce n'est pas quelque chose que l'on met suffisamment en avant. On a eu beaucoup de chance que cela arrive un samedi matin à 9h, malheureusement pas pour ceux qui ont été blessés, mais quelque part, il y a quand-même eu, en vies humaines en tout cas, de la chance."
Depuis ce jour, Dominique Paris mène un combat acharné pour faire reconnaître ses droits et ceux des autres victimes. Elle a monté une association : Trévise-Ensemble. "On parle de 200 ou 300 millions d'euros de dommages. On a eu des aides à hauteur de 500 euros. Mais vous avez plein de frais parce que vous n'allez pas bien, les frais d'avocat, les charges qu'il faut continuer à payer. Aujourd'hui, c'est incroyable, il n'y a même pas de fonds. Les blessés, qui ont des problèmes très particuliers, sont pour certains handicapés à vie. C'est indécent, qu'il n'y ait pas de fonds de quelques millions d'euros pour aider ceux qui ont besoin", déplore-t-elle.
On a eu beaucoup de chance que cela arrive un samedi matin à 9h, malheureusement pas pour ceux qui ont été blessés, mais quelque part, il y a eu quand-même eu, en vie humaine en tout cas, de la chance.
Au-delà de la perte de son appartement, Dominique Paris chiffre à 10 à 15% de son salaire ce que lui coûte encore aujourd'hui cet accident.
Les séquelles physiques et les traumatismes psychologiques seraient importants parmi les victimes. Si elle n'a pas souhaité quitter le quartier et loue depuis un meublé à proximité, beaucoup d'autres ne souhaitent pas revenir. "Une habitante au 8 rue de Trévise est en train de vendre. Une autre, dans un immeuble rue Bergère, va partir aussi en raison de traumatismes chez ses enfants. Le bruit incessant des travaux en décourage certains aussi", indique-t-elle.
#ruedetrevise #12janvier2019 #treviseensemble #VRET #cérémonies le #12janvier2021 à 9h devant la palissade. Un moment pour nous retrouver, nous souvenir et parler de demain. Ce moment sera suivi par une conférence de Presse. A tous. pic.twitter.com/s2dfRJJo2r
— TREVISE ENSEMBLE (@TreviseEnsemble) January 8, 2021
Longue procédure judiciaire
Deux après l'explosion, le désarroi fait place à la colère. En premier lieu contre la mairie de Paris. "Elle a mis un an avant de se manifester, et ce après un communiqué du procureur de la République. Pendant longtemps, on n'a pas été considéré comme un accident collectif. On ne rentre dans aucun cadre. On n'est pas du terrorisme, on n'est pas une catastrophe naturelle. Le manque de compassion de la ville et de GRDF est tout à fait phénoménal", regrette-t-elle.
La procédure judiciaire semble être au point mort. GRDF n'a pas été mis en examen, contrairement à la ville de Paris. Plusieurs avocats qui représentent une centaine de victimes vont assigner l'entreprise au civil pour obtenir une indemnisation. "Aujourd'hui, on comprend que la ville et GRDF se moquent de nous. On va continuer notre combat. Parce qu'en plus, on ne sait pas quand on rentrera chez nous. On nous parle de fin 2024 au plus tôt, vous imaginez ce que cela fait ?"
La mairie de Paris s'est dite favorable à un fonds d'indemnisation, mais créé par une loi et financé en partie par l'État.