"Une forme de tristesse collective envahit l'hôpital", crise sociale au CHU de Nantes

Signes de surmenage, épuisement physique, trouble du sommeil... Le dernier rapport du Service Santé au travail, dévoilé par la CGT mardi, dénonce un mal-être au CHU de Nantes. Le syndicat demande le départ du directeur général

C'en est trop pour Pierre (le prénom a été modifié). Ce-jour de printemps 2023, l'homme est seul devant la porte de l'hôpital. Il y travaille depuis des années et ça fait des mois qu'il n'en peut plus. Cette fois, son corps lui dit stop.

C'est un électrochoc. L'homme appelle son médecin traitant et prend rendez-vous. Quelques jours plus tard, le diagnostic tombe : il fait un burn-out. "Plus précisément, mon généraliste a noté que je vivais un épisode anxio-dépressif sévère en rapport avec mes conditions de travail", lit à voix-haute le salarié de l'hôpital nantais.

Stress, anxiété et trouble du sommeil

Le mardi 23 juillet, la CGT du CHU de Nantes, syndicat majoritaire, a dévoilé le dernier rapport social unique de l'établissement, accompagné d'un rapport du Service Santé au travail de l'hôpital datant de 2023. Celui-ci dénonce des risques psychosociaux "extrêmement préoccupants" chez les professionnels du centre hospitalier.

Les médecins relèvent notamment "des symptômes tels que le stress, l’anxiété, les troubles du sommeil, des signes de surmenage, ainsi que de l’épuisement physique et psychologique." En parallèle, le bilan social de l’hôpital pointe une progression de l'absentéisme de 227% en 12 ans : le nombre de jours d’arrêts de travail est passé de près de 123 000 jours à plus de 279 000 entre 2011 et 2023.  

On aime notre métier, mais on nous en dégoute

Pierre

Salarié du CHU de Nantes

Pierre se reconnait dans ces rapports. "Le stress, l'angoisse… Je connais bien", tente-t-il d'ironiser. En quelques mois, l'homme rongé par le mal-être a perdu près de 10 kilos. La faute à des conditions de travail qui se dégradent d'année en année, selon lui. 

Dans son une équipe qui lui demande d'être polyvalent, l'homme a déjà été amené à effectuer plusieurs services en une journée. "C'était trop, soutien Pierre. Mais on est souvent obligé de remplacer l'absentéisme"

En effet, le CHU de Nantes fait à face à un manque d'effectif et peine à recruter des soignants. Cela a l'image de la situation de l'hôpital public en France qui en a perdu 1,3 % entre 2021 et 2022.

Dans les couloirs de l'établissement nantais, Pierre raconte ainsi avoir vu des infirmières amenées à faire des tâches pour lesquelles elles n'étaient pas formées. "Résultat ? Une forme de tristesse collective envahit l'hôpital, soupire-t-il. On aime notre métier, mais on nous en dégoute".

La CGT demande le départ du directeur général

"Chaque année, le rapport Santé au travail est plus préoccupant que le précédent, mais la direction ne met aucune politique de prévention en place", déplore Olivier Terrien, secrétaire général de la CGT du CHU Nantes.

Le syndicat fustige également "des dépenses incongrues" de la part du directeur général Philippe El Saïr, en poste depuis quatre ans. Il désapprouve notamment la création d’un nouveau logo qui aurait coûté 185 000 € et une soirée pour la nouvelle année dont le prix se serait élevé à 32 000 €.

"On demande donc le départ du directeur général", fixe Olivier Terrien. Dans ce cadre, la CGT annonce saisir le Centre National de Gestion (CNG) ainsi que le ministère de la Santé dès la semaine prochaine. Les deux institutions ont le pouvoir de nommer des directeurs de la fonction publique hospitalière.

Le problème est davantage national que local

Rachel Bocher

président de l'INPH

Rachel Bocher, présidente de l’Inter-syndicat National des Praticiens Hospitaliers (ISNP) et cheffe de service en pédiatrie à Nantes, appelle à la tempérance. "Le problème est davantage national que local. Nos ministres ne cessent de changer et ça se répercute sur l'organisation dans nos hôpitaux. Il faudrait plutôt interpeller l'État", mesure la syndicaliste. 

Quant à la direction du CHU, elle dénonce à travers un communiqué des "contrevérités grossières" de la part de la CGT. L'hôpital assure que "la totalité des indicateurs sociaux de
l’établissement sont en amélioration et la situation budgétaire est maîtrisée". Pour l'heure, aucune discussion entre la CGT et la direction n'est prévue. 

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