Au Festival de Cannes, il faut toujours un peu de frousse et de sang qui gicle, des corps martyrisés à l'excès aussi. Bref, du gore. Cette année, il est plus porté sur les corps notamment dans des films comme "The Substance" ou "Les femmes au balcon", signés dans ces cas par des femmes.
Le body horror, disons en français, "l'horreur corporelle", est un sous-genre de l'horreur qui a aussi été lontmeps considéré comme un sous-genre du 7ᵉ art ! Sur la pellicule, des violations graphiques ou psychologiquement perturbantes du corps humain.
The substance, en compétition au Festival de Cannes avec Demi Moore, à contre-emploi dans ce film d'horreur féministe, a reçu un très bon accueil. La "substance" du titre permet à la personne qui se l'injecte de produire une meilleure version d'elle-même. Il est l'un de ces films présentés comme gore et très body horror.
C'est ce côté excessif (du gore) qui permet de parler de choses très sérieuses tout en les dédramatisant complètement et avoir ce truc de digestion où on peut se laisser aller à rire, à vivre l'expérience. Pour moi ce genre c'est très lié à l'humour
sa réalisatrice, la Française Coralie Fargeat.
Le réalisateur suédo-polonais Magnus Von Horn, en compétition, a lui choqué avec La Jeune femme à l'aiguille, film d'époque expérimental sur fond d'infanticide et de scènes insoutenables pour public averti.
Hors compétition, Les femmes au balcon, de l'actrice-réalisatrice française Noémie Merlant, se sert du gore comme un défouloir jouissif dans cette histoire d'un trio féminin qui se révolte contre le patriarcat.
Cicatrices, seulement
The Apprentice, biopic sans concession du jeune Donald Trump, en compétition, s'offre aussi une toute petite séquence crue de chirurgie esthétique. Rien de très gore en soi.
Avec Les Linceuls, en compétition, le Canadien David Cronenberg (La Mouche, Crash) se fait pour une fois étonnamment économe en hémoglobine, avec cette histoire de suaires connectés qui permettent de garder un contact visuel avec le corps des morts, après leur enterrement.
L'Allemande Diane Kruger, qui joue deux rôles dans le film, celui de deux sœurs, apparaît toutefois souvent dénudée, avec un corps bardé de cicatrices ou mutilé.
"Pour moi, ce n'était pas un rôle facile", a-t-elle confié à l'AFP.
Je fais rarement des rôles très dénudés, ce n'est pas ce que j'adore le plus. Et en plus d'être nue, d'avoir toutes ces cicatrices, d'être abimée vraiment je n'étais pas bien
Diane Krugerà l'AFP.
"Il fallait s'abandonner et je me suis beaucoup reposé sur Vincent (Cassel, son partenaire français à l'écran), qui connaît bien Cronenberg".
Ce n'est pas la première fois que Cannes s'ouvre à ce qui a longtemps été considéré comme un sous-genre.
Titane, trempé dans le gore, de la Française Julia Ducournau, avait même remporté la Palme d'Or en 2021. La ville de Cannes avait même publié un avertissement pour le public avant les projections.
Preuve de la reconnaissance de ces films, le Fantastic Pavilion (Pavillon Fantastique), initiative indépendante, s'est installé au sein du Marché du Film, au Palais des Festivals.
Espace fréquenté par 2.300 professionnels en 2023.
C'est la deuxième année que ce Pavillon est à Cannes pendant le Festival, l'idée était de créer un point rencontre entre professionnels autour des genres fantastique/horreur/science-fiction/gore/thriller etc.
Tim Luna, producteur basé au Mexique.à l'AFP
"C'était considéré comme un sous-genre, mais les choses ont changé ces dernières années, pour sa seconde année ce Pavillon a été un succès, attirant même des professionnels venus de Chine... Je suis éreinté tant il s'est passé de choses en quelques jours", conclut Tim Luna, grosse bague à tête de mort à un doigt.