Les juges d'instruction chargés de l'enquête sur l'attentat de la promenade des Anglais de Nice qui avait fait 86 morts le 14 juillet 2016 ont décidé du renvoi de sept hommes et une femme, dont trois pour "association de malfaiteurs terroriste criminelle", devant la cour d'assises spéciale.
Les juges d'instruction chargés de l'enquête sur l'attentat du 14 juillet 2016 ont décidé du renvoi de sept hommes et une femme, dont trois pour "association de malfaiteurs terroriste criminelle", devant la cour d'assises spéciale.
Selon l'ordonnance de mise en accusation signée ce lundi 9 novembre par quatre juges antiterroristes
et dont a eu connaissance l'AFP, les trois principaux accusés Mohamed Ghraieb, Chokri Chafroud et Ramzi Arefa sont suspectés d'avoir eu "conscience de l'existence d'un projet" d'attaque de la part d'un homme de 21 ans abattu le soir-même par la police.
Il y a 4 ans, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel a fauché 86 vies avec son camion sur la Promenade des Anglais avant d'être tué par les forces de l'ordre. Les parties civiles craignaient l'abandon de la qualification terroriste.
Il y a une forme de satisfaction car la nature terroriste de l'attentat est bien identifiée, alors que des articles avaient évoqué l'oeuvre d'un déséquilibré, ce qui était assez déstabilisant pour les victimes"
Le procès se tiendra donc devant une cour d’assises spéciale, c’est-à-dire composée uniquement de magistrats professionnels.
C'est une décision essentielle et une satisfaction de voir que ce dossier relève bien de la compétence de la cour d'assises spéciale.
Requalification des faits
Pour les trois principaux suspects, le parquet le PNAT demandait l'abandon des poursuites pour "complicité d'assassinats" et voulait une requalification des faits pour "association de malfaiteurs terroriste criminelle".
Ce qui est intéressant, 5 ans Après, c’est qu’ils ont la certitude qu’il s’agit bel et bien d’un acte commis par ce que l’ancien chef des services secrets français qualifiait de loup solitaire. Il s’agit bien d’un acte isolé. Les personnes qui sont renvoyées sont impliquées parce qu’elles ont permis au terroriste de commettre son attentat mais en tant qu’auteur principal, il est seul.
Selon lui, "ce n’est pas comme les attentats du 13 novembre où c’est un groupe terroriste qui a pris les armes. C’est d’autant plus important de le rappeler que si les autorités administratives et municipales avaient pris les mesures de sécurité élémentaire qui s’imposées, cet acte aurait pu être évité. Ou à minima, les conséquences auraient pu être bien moins importantes."
J’estime que les autorités sont responsables. Les juges d’instruction et les procureurs ont tout fait pour que la responsabilité des autorités ne puisse pas être mise en cause. Ils ont assumé leur choix de ne pas rechercher leur responsabilité puisqu’ils ont considéré que ça ne faisait pas partie de leur mission. Leur mission était d’œuvrer à la manifestation de la vérité sur l’attentat mais pas sur ses conséquences.
>>Voir l'émission spéciale consacrée à l'attentat de Nice, un an près :
Les protagonistes :
- Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, l'assaillant
Tunisien âgé de 31 ans, chauffeur-livreur et père de trois enfants en instance de divorce, il n'était connu des services de police que pour des faits de vols ou violences conjugales.
Selon les éléments dont l'AFP a eu connaissance, l'enquête a démontré le caractère prémédité de l'attaque mais a buté sur la question du mobile.
Elle a cherché dans deux directions, celle d'une "radicalisation très rapide", comme évoquée par le ministre de l'Intérieur de l'époque Bernard Cazeneuve, tout comme celle de l'acte macabre d'une personne décrite par de nombreux témoins comme "instable", "torturée" ou "sadique".
Les connaissances ou proches
Trois hommes, Chokri C., Mohamed G. et Ramzi A., ont reçu un SMS de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel avec ce mot "Ada", le jour où l'auteur de l'attaque a effectué auprès de cette entreprise la réservation d'un camion de location. L'attaquant a finalement réservé un autre camion. Tous trois sont soupçonnés d'être concernés par un SMS et un message vocal de Lahouaiej-Bouhlel datant du soir de l'attaque : dans ces contenus, il demande à Ramzi A. des armes et indique que "Chokri et ses amis sont prêts" et se trouvent chez "Walid", surnom de Mohamed G.
Comme tous les autres mis en cause, ils contestent avoir eu connaissance du projet d'attentat.
- Mohamed G., né en Tunisie en 1976 et de nationalité franco-tunisienne, s'est présenté spontanément à la police le lendemain de l'attentat et a évoqué une radicalisation récente de l'auteur de l'attaque. Il est monté dans le camion loué pour l'attaque par Lahouaiej-Bouhlel et a eu dans les mois précédents d'innombrables contacts et échanges avec lui. Dans des messages retrouvés par les enquêteurs, il a semblé se féliciter des attentats de janvier 2015. C'est un proche de Lahouaiej-Bouhlel.
- Egalement proche, Chokri C., né en Tunisie en 1979, de nationalité italo-tunisienne, a adressé un ambigu message Facebook en avril 2016 à Lahouaiej-Bouhlel auquel il disait : "charge le camion, met dedans 2000 tonnes de fer et nique, coupe lui les freins mon ami, et moi je regarde". Il est également monté dans le camion.
- Ramzi A., né en France en 1994 et connu des services de police, de nationalité franco-tunisienne, qualifie lui Lahouaiej-Bouhlel de simple "client" et conteste le connaître vraiment. Il est soupçonné d'avoir contribué à fournir une arme utilisée par Lahouaiej-Bouhlel.
- Un quatrième proche, Hamdi Z., a été aussi mis en cause.
- Quatre autres personnes, un intermédiaire, Brahim T., et trois Albanais, Artan H., sa femme Enkeledja Z. et Maksim C., sont mis en examen, impliqués à des degrés divers dans le trafic qui a permis à Mohamed Lahouaiej-Bouhlel de disposer d'une arme de poing le soir des faits.
- Une cinquième personne mise en cause dans ce volet, Adi E., s'est suicidée en détention.
> Notre page spéciale sur ce drame.
En parallèle de cette enquête, une instruction est en effet toujours en cours à Nice sur le dispositif de sécurité.
(Avec AFP)