"Correct", "soulagé" : les réactions après le verdict du procès en appel de l'attentat de Nice

Comme en première instance, Mohamed Ghraieb et Chokri Chafroud ont été condamnés à 18 ans de réclusion. Les victimes et leurs proches se sont exprimés à l'issue du verdict dans la salle de retransmission niçoise du procès en appel de l'attentat de Nice.

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L'attente est longue, trop longue. Dans l'assistance, des familles entières sont venues assister à ce deuxième verdict. Les mêmes qui étaient sur la Promenade des Anglais à Nice (Alpes-Maritimes) le 14 juillet 2016.

Des grands-parents, des mères avec les enfants dans la poussette, des jeunes qui discutent ou patientent, le visage grave. Après 10 heures de délibérations, la cour spéciale de justice de Paris a rendu son verdict à 19h30. Et, simultanément, à Nice, via les écrans de retransmission. 

L'assistance, qui s'était un peu dissipée, devient totalement silencieuse à l'énoncé du verdict. 

Qu'est-ce qui change par rapport au premier procès ?

On entend clairement le président déclarer "oui, à la majorité" aux questions qui étaient posées. Ce qui signifie que Mohamed Ghraieb et Chokri Chafroud sont coupables d'association de malfaiteurs terroriste. Dans la salle bondée et surchauffée, c'est le sentiment de soulagement qui domine.

Le président donne ensuite la durée de la peine tant attendue : 18 ans de prison, comme en première instance alors que l'avocate générale avait demandé 20 ans dans son réquisitoire.

Une peine assortie d'une peine de sûreté des deux-tiers. Concrètement, les accusés pourraient ressortir après 12 ans de détention, soit dans 4 ans pour Chokri Chafroud qui est emprisonné depuis 2016 et dans 10 ans pour Mohamed Ghraieb.

À la sortie de l'audience, tout le monde reste encore pour parler du verdict. Impossible de se séparer, la plupart se connaissent, ont suivi le procès ensemble.

Certains pleurent, craquent. Les gilets bleus de l'association Montjoye sont là pour écouter, parler, proposer une chaise pour éviter un malaise. Il y avait beaucoup plus de tension pour ce deuxième procès, selon un psychologue. L'atmosphère aurait été différente en cas d'acquittement. Un acquittement redouté par les habitués, ceux qui sont là presque tous les jours.

"Peur de l'acquittement"

C'est le cas d'Alain Dariste, membre de l'association Promenade des Anges. Avant le verdict, il s'inquiétait des longues heures de délibérations : "ça discute, c'est pas bon pour nous, ça". À l'issue du verdict, il est soulagé : "on espérait peut-être 20 ans (ce qu'avait demandé l'avocate générale) on a vraiment eu peur de l'acquittement avec les plaidoiries de la défense qui étaient très fortes".

Didier Matrat, secrétaire général de l'association "Life for Nice" représente une centaine de personnes. Il est "soulagé" mais il attendait une peine plus importante : "on aurait préféré qu'ils prennent un peu plus".

Une mère de famille avec ses trois enfants (son fils aîné avait 5 mois au moment de l'attentat), est déçue : "je m'attendais à 20 ans", et lâche : "j'aurais aimé qu'il (Mohamed Ghraieb) soit déchu de la nationalité française".

Alexandra a suivi les débats avec son bébé de deux mois sur elle. Elle lance : "on aimerait mieux que nos impôts ne servent pas à payer la défense de ce genre de personnes".

"Neutralité par rapport au premier jugement"

Stéphanie, mère de famille de 48 ans, est venue spécialement du Var pour le verdict. L'attentat s'est déroulé le jour de son anniversaire de mariage. Depuis, il y a eu le stress post-traumatique de son mari, un divorce, un déménagement, les angoisses soudaines des enfants. "L'attentat a brisé notre famille, j'essaye de me reconstruire". Elle a eu besoin de suivre le procès pour affronter ce qu'il s'était passé, comme une thérapie. Elle essaye de comprendre la notion de peine de sûreté. Pour beaucoup, il y a besoin d'expliquer et de réexpliquer cette décision de justice.

Hélène, une ancienne infirmière, qui ne peut plus exercer son métier depuis l'attentat, donne son sentiment : "C'est une forme de neutralité, de respect par rapport au premier jugement". Elle ajoute : "j'espère que, pendant la détention, ils pourront retourner dans leur for intérieur, faire leur examen de conscience".

Stéphanie Abier-Rougeron, avocate niçoise qui suit 50 familles et principalement les préjudices subis par les enfants, trouve ce verdict "correct": "l'acquittement je n'y croyais pas, mais peut-être une peine plus légère pour Ghraieb".

Chafroud en pleurs après le verdict

À Paris, la salle était pleine également. Pas de cris de joie comme en première instance, mais une forme de soulagement générale également. Chokri Chafroud est en pleurs après l'annonce du verdict. Des images qui n'ont pas été vues à Nice. Il n'avait pas voulu s'exprimer quand le président lui a donné la parole le matin même.

Certains ressortent, ébranlés par l'attitude des accusés. C'est le cas d'Anne Murris, qui a perdu sa fille lors de l'attentat. Elle est très émue : "Chafroud en pleurs... je suis en train de me demander s'il est responsable de cette tragédie".

L'avocat de Mohamed Ghraeib, Vincent Brengarth, précise que son client est "anéanti" par ce verdict. "Cela donne l'impression d'un procès pour rien", lâche-t-il.

Réaction du maire de Nice

Le maire de Nice (Horizons), Christian Estrosi, a réagi par un communiqué de presse après l'annonce de la confirmation des peines des deux accusés : "Je sais qu’aucune condamnation ne saurait soulager la grande souffrance des victimes de cette tragédie. J’espère toutefois que cette décision leur permettra de faire un pas de plus sur le chemin de la résilience. Je tiens également à saluer la dignité du déroulement de ce procès, le travail des magistrats de la Cour et du Parquet ainsi que le courage des parties civiles".

Procès sur la sécurité

Et après le verdict ? La procédure judiciaire est-elle terminée ? Pas du tout.

Didier Matrat, secrétaire général de l'association "Life for Nice" attend maintenant le procès pour la sécurité dont l'enquête a été délocalisée à Marseille. Tout comme Célia Viale, partie civile. L'instruction n'est pas terminée, aucune date n'a encore été avancée.

Vers un pourvoi en Cour de cassation ?

Le président l'a bien précisé à la fin du verdict : les deux accusés ont cinq jours pour former un pourvoi en cassation.

L'avocat de Mohamed Ghraieb a annoncé qu'il allait peut-être le faire, celui de Chokri Chafroud l'envisage également. Un troisième procès n'est donc pas à exclure. Ce serait une épreuve de plus pour les parties civiles.

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