Un hommage national, présidé par le ministre de l'Intérieur démissionnaire Gérald Darmanin, a été rendu ce lundi à Nice au gendarme Éric Comyn, mortellement blessé par un chauffard récidiviste lors d'un contrôle routier à Mougins. Des hommages ont été rendus au même moment dans toutes les préfectures et les gendarmeries de France.
C'était il y a tout juste une semaine. Depuis, les hommages s'enchaînent, car la mort du gendarme Éric Comyn, fauché par un automobiliste lors d'un contrôle routier à Mougins (Alpes-Maritimes), a ému bien au-delà des forces de sécurité.
Est-ce un signe ? Le ciel est devenu orageux, noir et inquiétant à l'arrivée du cercueil dans la cour d'honneur de la caverne Ausseur de Nice en milieu d'après-midi, comme si les cieux s'en mêlaient.
Arrivé peu avant 16 heures, le ministre de l’Intérieur démissionnaire Gérald Darmanin a présidé cet hommage après avoir rencontré la famille de l’adjudant-chef, sa veuve, Harmonie Comyn, et ses deux enfants. D'après une source au sein de la gendarmerie, c'est la veuve du gendarme qui souhaitait un hommage national.
Gérald Darmanin a remis la médaille de la Légion d'honneur à titre posthume au gendarme français. Des couronnes funéraires ont aussi été déposées. Il a ensuite fait part du "choc" et de "l’immense colère" qui ont suivi la mort du gendarme, saluant la mémoire d’un "héros du quotidien". Il a poursuivi :
Si la mort fait partie de la vie du gendarme, du policier, si elle fait partie de l’uniforme, les conditions de celle-ci ne sont pas toutes acceptables. La mort d’Éric Comyn n’est pas acceptable.
Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur démissionnairelors de l'hommage national
Sur un ton ferme, il a ajouté : "ce n'est pas un refus d'obtempérer, c'est un crime. Ce n'est pas un fait divers, c'est un fait de société."
Une minute de silence a été observée dans tous les commissariats de police, brigades de gendarmerie et préfectures de France. Une cérémonie qui n'était pas ouverte au public, mais certains Niçois ont pu voir le cortège funéraire passer en début d'après-midi, avenue Simone Veil. Un retraité a tenu à voir le cercueil du gendarme. Il dit avoir fait l'armée et servi la France, il ne comprend pas ces comportements dangereux : "ça me touche énormément du fait qu'on respecte de moins en moins les institutions françaises. C'est très émouvant pour moi, je n'ai pas été élevé de cette façon-là. Quand les forces de l'ordre demandent de s'arrêter et bien on doit s'arrêter", affirme-t-il.
Parmi les élus locaux présents, le maire de Nice, Christian Estrosi, le président du conseil départemental, Charles-Ange Ginésy, ainsi qu'Éric Ciotti et le maire d'Antibes, Jean Leonetti, ont assisté à l'hommage national.
Banal contrôle routier
Le drame s'est produit vers 20h40 lundi 26 août, quand une personne à bord d'une BMW noire a refusé un contrôle, selon la gendarmerie. Le véhicule a violemment percuté Éric Comyn alors qu'il procédait avec ses collègues à un banal contrôle routier à proximité de l'autoroute A8. Adjudant membre du peloton motorisé de gendarmerie, il était âgé de 54 ans et père de deux enfants de 12 et 16 ans.
Le suspect, âgé de 39 ans, a été rapidement arrêté à Cannes dans la nuit de lundi à mardi. Il présentait un taux d'alcoolémie positif. Il a été mis en examen, notamment pour "meurtre sur personne dépositaire de l'autorité publique" et placé en détention provisoire. Il avait déjà 10 condamnations à son casier judiciaire et il avait été interpellé deux fois pour conduite en état d'ivresse ou sous stupéfiants.
"La France a tué mon mari"
Mercredi, lors d'une cérémonie à Mandelieu-la-Napoule, où était basé le peloton motorisé auquel appartenait son époux, Harmonie Comyn avait accusé "la France" d'avoir "tué [son] mari par son insuffisance, son laxisme et son excès de tolérance".
"Pourquoi cet homme multirécidiviste peut-il évoluer en toute liberté ? Quand est-ce que nos législateurs ouvriront véritablement les yeux ? Faut-il qu'ils soient touchés directement pour agir ? Combien de morts avant que ces assassins soient véritablement punis ?", avait-elle demandé.
Mais faut-il légiférer à chaud ? Le nombre de contrôles routiers qui tournent au drame ne cesse d'augmenter.
23.700 cas de refus d'obtempérer en 2023
Ce fléau touche presque tous les jours policiers et gendarmes : 23.700 cas de refus d'obtempérer ont été recensés en 2023. En France, le ministère de l'Intérieur estime qu'un refus d'obtempérer est commis toutes les 20 minutes.
Alexandra Martin, députée LR des Alpes-Maritimes, a entendu les mots et la douleur d'Harmonie Comyn. Elle a annoncé son intention de déposer une proposition de loi visant à sanctionner plus lourdement ces refus d’obtempérer.
La députée souhaite notamment la non-délivrance ou le renouvellement d’une carte de séjour temporaire à tout étranger ayant commis un refus d’obtempérer, le retrait de la carte de séjour à un étranger ayant commis un refus d’obtempérer aggravé, porter les peines à trois ans d’emprisonnement et 45.000€ d’amende lors d’un refus d’obtempérer. Un durcissement législatif qui serait soumis à un débat parlementaire. Sauf que, dissolution oblige, la prochaine session n'est pas prévue avant le 1er octobre.