Procès de l'attentat de Nice : "l'attentat a brisé tous les liens", le mot de la fin de la plaidoirie collective

Plus d'une cinquantaine d'avocats de parties civiles se sont réunis pour faire entendre à la cour d'assises une plaidoirie collective. Ce mardi 29 novembre, Maître Olivia Chalus-Pénochet a clôturé cet exercice rare.

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L'exercice périlleux d'une plaidoirie collective avait été inauguré par les avocats des parties civiles au procès du 13-novembre. Pour celui de l'attentat de Nice, leurs confrères et consœurs ont décidé de faire de même : une longue plaidoirie, déclinée en 55 voix d'avocats, réparties sur cinq jours d'audience.

Le but : éclairer "toutes les facettes du dossier", explique Maître Olivia Chalus-Pénochet qui avait la lourde tâche de conclure ce mardi 29 novembre.

"Si une phrase, un mot, de cette plaidoirie est susceptible de toucher votre cœur, voire mieux votre esprit, alors le pari sera gagné", dit-elle à la cour d'une voix douce.

En quelques secondes, lorsque "nous avons basculé de la fête familiale à l’horreur", "l'attentat a brisé tous les liens qui unissent les hommes entre eux", explique l'avocate du barreau de Nice.

En visant les enfants, le terroriste a amputé notre avenir de leur rire, de leur histoire, de ce qu’ils auraient pu devenir et construire... La mort des enfants a rompu nos liens avec le futur.

Olivia Chalus-Pénochet, avocate de parties civiles

Lors des témoignages des parties civiles, de nombreux parents ont parlé du deuil particulier qu'est celui d'un enfant. L'avocate a rappelé l'interrogation posée par Anneli Kruusberg, une mère estonienne qui a perdu son fils Rickard, âgé de 20 ans. Elle avait témoigné le 28 septembre devant la cour.

On appelle orphelin les enfants qui ont perdu leurs parents. On appelle veuves les femmes qui ont perdu leur mari. Mais il n’y a pas de mot pour les parents qui ont perdu leur enfant. Il n'y a pas de mot parce que ce n’est pas naturel. Perdre son enfant c’est le pire qui puisse arriver à un parent. Ceux qui ne connaissent pas cette perte-là ne peuvent pas comprendre les sentiments de ceux qui l’ont connu.

Anneli Kruusberg

"Comment est-il possible de se remettre d’une mort qui ne porte pas de nom ? Comment vaincre un deuil sans nom ?", interroge Maître Chalus-Pénochet.

L'avocate évoque les liens familiaux, brisés eux aussi : "Les enfants se sont éloignés des parents, les couples se sont séparés... Même lorsqu’elles sont demeurées ensemble en famille, au fond, les victimes se sentent seules."

Des liens rompus avec la réalité

En plus d'avoir perdu des proches, de s'être éloignées de ceux qui étaient toujours vivants, les victimes ont vécu une rupture avec la société et la réalité. "Même celles qui n’ont pas perdu de proches, même celles qui n'ont pas été blessées physiquement, nous ont dit être mortes ce soir-là", a rappelé Olivia Chalus-Pénochet. "Les victimes font désormais face au néant, à la mort et à l’effroi."

"Comment une victime de terrorisme peut-elle accepter de nouveau d’aimer et d'être aimée ? De trouver la force de tisser de nouveaux liens ?", demande-t-elle à la cour. Heureusement, "les victimes ont tissé des liens entre elles" en se regroupant entre personnes qui comprenaient les peines de chacun et chacune.

Parcours du combattant

Cela leur a été utile. En plus d'aider certaines à pouvoir se relever, ces liens entre victimes étaient précieux lorsqu'elles ont dû faire face à des épreuves qu'elles seules, encore, devaient traverser. L'avocate parle ici du Fonds de Garantie des Victimes des actes de Terrorisme et d’autres Infractions (FGTI).

"Ce parcours du combattant a fait naître une nouvelle colère", il a été "perçu par les victimes comme une blessure supplémentaire". "Toutes les victimes, sans exception, souhaiteraient retrouver leur vie d’avant et ne pas avoir à quémander une prise en charge qu’on leur fait culpabiliser d’obtenir", insiste l'avocate.

Bien que, selon elle, "dans ce procès, la vérité aura été la grande absente", pour Maître Olivia Chalus-Pénochet. Une dernière question demeure : "Comment ce procès va-t-il réconcilier les victimes avec la société et avec elles-mêmes ?" 

La semaine prochaine, mardi 6 décembre, le parquet présentera ses réquisitions. Quant au verdict, il devrait être rendu le mercredi 14 décembre.

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