Témoignage. Journée mondiale de lutte contre le sida : "Il y a une sérophobie ambiante", témoigne un Niçois de 39 ans

Publié le Écrit par Baptiste Renaut
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Ce 1er décembre se tenait la Journée mondiale de lutte contre le sida. Un tiers des personnes interrogées qui ont entre 15 et 24 ans pensent que le virus peut se transmettre par un baiser, un jeune sur trois est persuadé qu'il existe un vaccin pour éviter sa transmission. Pourtant, le manque d'information "est un frein à la santé sexuelle, à la prévention et au dépistage", selon les médecins.

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Il a contracté le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) en 2009 et assure qu'il "vit actuellement très bien avec le virus". Mathieu, Niçois de 39 ans qui souhaite rester anonyme, veut parler de son histoire pour lutter contre la "sérophobie ambiante" à l'occasion de cette journée de lutte contre le sida. Parce que, dit-il, "il y a encore trop de méconnaissance, je m'en rends compte dans les échanges que j'ai".

Le VIH, sexuellement transmissible et responsable de la maladie du sida, suscite encore la peur. De sa découverte en 1982 jusqu'au début des années 2000, il a eu des effets ravageurs en France, causant plusieurs milliers de décès par an et jusqu'à 4 860 en 1994, le pic de l'épidémie dans l'Hexagone.

Sérophobie et coming-out

Mais les thérapies médicamenteuses permettent aujourd'hui aux personnes atteintes du VIH de mener une vie sans gêne. En témoigne Mathieu : "Aujourd'hui je vis complètement normalement", déclare celui qui occupe un poste d'agent immobilier. "Je travaille, je pars en vacances. La seule différence, c'est que je prends un cachet par jour" pour mener à bien un traitement antirétroviral. Celui-ci empêche le développement du virus, et surtout de la maladie du sida. L'espérance de vie des personnes séropositives sous traitement est équivalente à celle du reste de la population.

La grande peine des personnes séropositive en France, c'est donc désormais la sérophobie, le rejet des personnes séropositives.

C'est toujours compliqué d'aborder le sujet.

Mathieu, 39 ans, séropositif

Il affirme avoir souvent subi du rejet lors de rencontres avec d'autres partenaires sur des applications mobiles : "Il y a toujours une sérophobie ambiante. Il y a des hommes qui sont mal informés, qui rejettent en bloc la maladie et refusent d'entrer en contact avec des personnes séropositives".

"Ça m'a fait beaucoup de mal au début parce que je me suis dit que je resterais célibataire toute ma vie", se remémore-t-il.

Selon un sondage IFOP, un tiers des personnes interrogées qui ont entre 15 et 24 ans pensent que le virus peut se transmettre par un baiser, un jeune sur trois est persuadé qu'il existe un vaccin pour éviter la transmission du virus. Ces deux affirmations sont pourtant fausses.

Autre difficulté : l'annonce de sa séropositivité à ses proches. Il aura fallu neuf années à Mathieu pour rassembler le courage pour en parler à sa famille dans ce qu'il appelle un "coming-out VIH".

Mes parents, quand le sida est apparu dans les années 1980, ils avaient trente ans. Je dirais qu'ils sont un peu de la vieille école. Ils gardent encore cette image du virus comme très dangereux, où on est forcément condamné. Je n'avais pas envie de les inquiéter.

Mathieu, 39 ans, séropositif

Un traitement efficace

Pourtant, le traitement rétroviral que prend Mathieu empêche également la transmission du virus. "Si j'ai un rapport avec un autre homme ou avec une femme, je ne lui transmettrai pas le VIH, même sans protection", explique Mathieu. Il a ainsi été en couple plusieurs années avec une personne séronégative, sans lui transmettre le VIH, malgré des rapports sexuels sans protection.

Un patient sous traitement rétroviral. Son virus devient indétectable au dépistage, signe que la transmission ne peut plus avoir lieu tant que le traitement dure.

Pour le docteur Pascal Pugliese, médecin au CHU de Nice et spécialiste du VIH, ce manque d'information sur le virus est d'autant plus dommageable que "c'est un frein à la santé sexuelle, à la prévention et au dépistage".

L'État doit mettre en place des séances d'éducation à la sexualité. Il doit y avoir trois séances par classe, mais on sait bien que ce n'est pas respecté. Tout ça participe à l'ignorance, qui produit la stigmatisation.

Dr. Pascal Pugliese, médecin spécialiste du VIH

5 000 nouveaux cas par an

Les solutions pour se protéger du VIH sont plus nombreuses qu'avant. En plus du dépistage régulier et du préservatif, la prophylaxie pré-exposition, aussi appelée "Prep", est un traitement préventif qui permet, s'il est pris régulièrement sous forme de cachet, d'empêcher à celui qui le prend d'attraper le virus.

Il est disponible gratuitement après une prescription par un médecin. Depuis 2022, le dépistage du VIH est gratuit dans n'importe quel laboratoire d'analyse.

Si les traitements permettent de mieux prévenir la transmission, celle-ci est toujours active en France. En région Provence-Alpes-Côte d'Azur, 87 nouveaux cas de séropositivité ont été détectés en 2022. La région est la deuxième la plus touchée en France, après l'Île-de-France où sont recensés la grande majorité des nouveaux cas.

Au niveau national, environ 5 000 nouveaux cas sont recensés chaque année, un chiffre stable depuis quatre ans.

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