Le 14 novembre dernier, un couple de parents d'élèves de l'école Louis Vignol de La Ciotat (Bouches-du-Rhône) découvre l'agression sexuelle de leur fils par un autre camarade. Des faits qui selon eux auraient pu être évités, la famille ayant signalé à plusieurs reprises les comportements violents de l'agresseur présumé.
Jeudi 14 novembre. Ce jour restera gravé à jamais dans l’esprit de Fabrice et Élodie*, un couple de parents d’élèves de l’école élémentaire Louis Vignol à La Ciotat. Ce jour-là, ils apprennent avec stupeur que leur enfant alors âgé de huit ans a été victime d’abus sexuels ... par l’un de ses camarades de classe.
“On a été alerté par un animateur du périscolaire auquel mon fils et un de ses copains se sont confiés”, explique le père de famille, sous le choc. “Ils ont expliqué que ça durait, mais qu’aujourd’hui, ils avaient décidé d’être solidaires et de s’en sortir et donc de parler à un adulte”, ajoute-t-il.
"Il a vécu un cauchemar”
Ce jour-là, les parents viennent récupérer en urgence leur enfant et à l’abri des regards, le questionne.
Il a eu un petit temps de recul et puis tout d’un coup, il s’est livré. Il a commencé à parler, à expliquer qu’il était victime non seulement de violences, de coups, de menaces, mais aussi d’agressions sexuelles dans les toilettes de l’école par ce même gamin qui le harcelait.
FabriceLe père de la victime
Le petit garçon leur détaille des faits d’une telle gravité que le père de famille n’a pas la force de les prononcer à voix haute. “C’est terrible ! Mon fils portera ce fardeau toute sa vie”, clame le père abasourdi avant de renchérir : “il a vécu un cauchemar !”.
Le lendemain, les parents déposent une plainte au commissariat. Une enquête est alors ouverte par une cellule spécialisée de la police. Depuis le mercredi 20 novembre, le parquet de Marseille s’est saisi de l’affaire.
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Une vingtaine de témoignages comme le sien
Il n’est pas le seul à avoir vécu ce cauchemar. Ses parents vont l’apprendre très rapidement. “Notre fils nous a expliqué que beaucoup de ses copains étaient victimes de plusieurs agressions physiques et sexuelles, de chantage, de menaces, de harcèlement”, explique Fabrice avant d’ajouter :
Les enfants avaient une espèce de pacte entre eux. Ils ne devaient pas en parler parce que sinon les parents allaient les gronder et l’agresseur allait les fracasser. Ils étaient tous terrorisés donc ils ne disaient rien.
FabriceLe père de la victime
En quelques heures ce jeudi soir, les langues se sont déliées en apprenant que l’un des enfants avait parlé. Et d’un témoignage isolé, une vingtaine d’histoires sont sorties au grand jour, toutes évoquant les mêmes sévices, dans des rituels similaires. “Il n’y a pas de doutes possibles sur ce qu’il s’est passé”, affirme le père de famille.
Un agresseur déjà signalé pour ses comportements violents
Ce cauchemar, l’école aurait sans doute pu l’éviter. Cela fait plus d’un an qu’ils signalent le comportement violent du présumé agresseur à la direction de l’établissement. “Plus de sept, huit, neuf écrits démontrent que l’on a alerté l’école”, souligne le père désillusionné.
Cette violence, sans parler d’agression sexuelle, a été dénoncée à plusieurs reprises auprès de la direction mais également du rectorat par des parents qui pensaient être des cas isolés. Il y a eu des mails, des mots dans le carnet de correspondance, des échanges sur l’application permettant de discuter avec le directeur... depuis octobre 2023, sans aucun retour.
Les parents demandent des comptes
Fabrice et son épouse en sont persuadés : "ça ne serait jamais arrivé s'ils avaient signalé un seul des faits que l’on a reportés. L’enfant serait encadré, suivi d'un établissement spécialisé et on n'aurait pas vécu tout ça. On a toujours eu des réponses du style, 'c’est sur le temps périscolaire, ça ne nous regarde pas, on n'est pas sûr, car les autres n’ont rien vu’”, explique le père furieux.
Depuis la révélation des faits, leur enfant est suivi par un psychologue et ne va plus à l’école. “Il est triste. Il ne comprend pas pourquoi son agresseur a le droit de retourner à l’école et pas lui”, explique le père de famille. Il peut malgré tout compter sur le soutien de ses amis et des autres parents de l’école qui viennent lui déposer des messages.
Nombre de ces parents ont d’ailleurs retiré leur enfant de l’établissement scolaire et depuis, ils se partagent les gardes de chacun d'entre eux. Ils sont plus de 120, sachant que l’école compte environ 150 élèves, à avoir signé une pétition réclamant le retrait de l'enfant agresseur de l’établissement ainsi que son changement de direction. “L’école n’est plus capable d’assurer la sécurité de nos enfants”, conclut le père de famille.
Ce jeudi 21 novembre, au lendemain de la révélation médiatique de l'affaire, l'équipe municipale de La Ciotat confirme le retrait de l’établissement de l'élève présumé agresseur. La mairie de La Ciotat, tout comme le parquet de Marseille, confirment le dépôt d’une seule plainte pour agression sexuelle.
Le rectorat de Marseille ajoute qu'une enquête administrative a été ouverte par l'éducation nationale et que les parents de la victime présumée vont être reçus ce jeudi à la Direction des services départementaux de l'éducation nationale (DSDEN13.). Un médecin et une psychologue scolaire ont par ailleurs rencontré les élèves de la classe de la victime présumée.
*Les noms des parents ont été anonymisés