Emmanuel Macron a-t-il dit "les smicards préfèrent des abonnements VOD à une alimentation saine" ? Retour sur une polémique en quatre actes

La citation attribuée au Président de la République a fait polémique dans le monde politique. Citée en Une du journal La Marseillaise, elle a été démentie par l'Élysée. Le syndicat qui la rapporte maintient ses dires.

"Les smicards préfèrent des abonnements VOD à une alimentation plus saine". Ce samedi 24 février, alors que s'ouvre le Salon de l'agriculture, les propos que le chef de l'État aurait prononcés face au syndicat agricole du Modef font vivement réagir. L'Élysée dément.

Acte 1 : des propos choc en Une de La Marseillaise

Dans son édition datée du 24 février, le journal local La Marseillaise, marqué à gauche et dont le siège se situe à Marseille, affiche en Une un portrait d'Emmanuel Macron, accompagné de ces propos qu'il aurait tenus lors d'une rencontre avec le syndicat agricole Modef, à l'Élysée. En deuxième page du journal, on peut lire la citation plus complète : "Lors d'une rencontre avec les syndicats à l'Elysée, le Président de la République a déclaré : 'les smicards préfèrent les téléphones et abonnements VOD plutôt qu'une alimentation plus saine', selon un syndicaliste de la Confédération syndicale agricole des exploitants familiaux."

En plus de la citation de Une, il est question de "téléphones" que les Français préfèreraient à une "alimentation plus saine".

Ce à quoi Pierre Thomas, président du Modef répond : "au-delà du cynisme de la formule, c'est un aveu d'impuissance".

Acte 2 : la citation fait polémique

Sur le réseau social X (ex-Twitter), de nombreux opposants ont lu du "mépris" dans les propos imputés au Président de la République.

Le Premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure a immédiatement dénoncé "le mépris de classe jusqu'au bout de la part de celui qui, de toute sa vie, n'aura jamais eu d'arbitrage à faire entre manger mieux et avoir accès à la culture".

"À ce rythme de mépris, ça va mal finir, a écrit la députée écologiste Sandrine Rousseau. Les Français et Françaises sont à bout, beaucoup n’en peuvent plus d’être humiliés, de survivre, d’être sur le point de basculer. Une partie est en train de craquer, de lâcher prise. Et vous, Président de la République, vous faites ça ?"

La cheffe des députés RN Marine Le Pen a également épinglé un "mépris de classe permanent" du président. "Communication blessante et provocatrice, Emmanuel Macron, dérangeant dans ses attitudes, inquiétant dans ses comportements, incompétent dans sa fonction, accentue la crise politique", a-t-elle insisté.

Acte 3 : l'Elysée dément

Interrogé par l'AFP ce samedi, l'entourage d'Emmanuel Macron, a reconnu que "le sujet de la part de l'alimentation dans le budget des ménages" ait pu être évoqué. Mais il réfute absolument ces mots, ajoutant que "publier entre guillemets des propos rapportés sans vérification est par ailleurs curieux déontologiquement".

Prisca Thevenot, porte-parole du gouvernement, écrit en réponse à Olivier Faure sur X : "L'Élysée a démenti cette citation mais non, c'est plus fort que lui, Olivier Faure, Premier secrétaire d'un parti de gouvernement, continue à faire circuler cette fake news."

Acte 4 : le Modef maintient

Interrogée par l'AFP, Lucie Illy, vice-présidente du Modef et présente à cette réunion, a affirmé que "le président ne s'est pas exprimé en ces termes, mais le fond est le même".

Cette arboricultrice bio dans les Hautes-Alpes a notamment interpellé le président sur les "marges abusives que l'on constate parfois sur le bio, et la difficulté pour des personnes qui touchent le Smic de se fournir en produits bio".

Il m'a dit d'abord qu'il n'y avait pas de marges abusives en bio. Puis il a dit que 'bien se nourrir est un choix de vie. Alors qu'on a 70 chaînes gratuites en France', on peut se passer d'un abonnement (télé) pour se payer des pommes bio.

Lucie Illy, vice-présidente du Modef

Se disant "un peu choquée", Lucie Illy a fait valoir que "quand on travaille et qu'on gagne le Smic, c'est dur de s'entendre dire de choisir entre bien manger et les loisirs, ça peut aller loin".

La Marseillaise fait réagir Raymond Girardi, vice-président du syndicat agricole  : "Oui, nous y étions plusieurs et je confirme bien que nous avons entendu cela, indique-t-il. Pour nous, le sujet n’est pas la répartition des achats pour les faibles revenus. Les produits de qualité doivent être à la disposition de tous. Il faut le pouvoir d’achat nécessaire".

Le journal qui a publié ces propos insiste en outre sur le fait qu'ils avaient été rapportés "dans le communiqué national du Modef publié le 19 février à l’issue de la rencontre avec le président de la République" et "n’avaient alors pas suscité de réaction."

Libération rappelle que "depuis le début de la crise des agriculteurs, cependant, un argument similaire est souvent utilisé par des élus ou des cadres de la majorité présidentielle lors de leurs échanges informels avec la presse, l’'abonnement VOD' étant parfois remplacé par le 'forfait 5G', supposément préféré à l’achat d’aliments sains et français."

Le Président de la République a déjà évoqué l'importance supposée des téléphones portables dans le budget des français, rappelle le quotidien. Alors qu'il défendait l'augmentation du reste à charge sur les médicaments remboursés, il avait déclaré : "Au moment où je vois ce que nos compatriotes peuvent dépenser pour des forfaits téléphoniques, la vie quotidienne, se dire qu’on va passer de 0,50 à 1 euro pour une boîte de médicament, je n’ai pas le sentiment qu’on fait un crime terrible."

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