Le procureur Nicolas Bessone a dressé le bilan 2023 du narco banditisme à Marseille, une année noire avec 47 morts, 118 blessés dont beaucoup d'adolescents.
À l'occasion d'une conférence de presse, le procureur de la République de Marseille, Nicolas Bessone, a dévoilé ce jeudi 21 décembre le lourd bilan de l'année 2023 : 47 personnes sont tombées sous les balles des narco trafiquants. Plus de jeunes et plus de femmes parmi les victimes, mais aussi parmi les auteurs, deux clans rivaux qui font régner la terreur dans les quartiers Nord de Marseille, des autorités qui renforcent leurs moyens de lutte, France 3 Provence-Alpes vous résume ce qu'il faut retenir de ce bilan.
47 "narchomicides" : 2023, année record
Le procureur Bessone insiste sur l'emploi du terme "narchomicide" plutôt que "règlement de compte", lequel vise traditionnellement des personnes impliquées à un certain niveau de criminalité organisée. "Ici, on assiste à une dépersonnalisation des victimes", précise le magistrat qui souligne une aggravation du phénomène par rapport aux années précédentes : 47 morts contre 33 en 2022 et 118 blessés quand on en recensait 43 l'an dernier.
Au rang des victimes collatérales : les résidents des quartiers où sont implantés un ou plusieurs points de deal tombent sous les balles du "narco terrorisme", expose Nicolas Bessone.
On va rafaler la cité dans laquelle se trouve un point de deal dont on veut prendre le contrôle.
Nicolas Bessone, procureur de la République de MarseilleConférence de presse
Les jeunes au cœur du trafic
Le rajeunissement concerne aussi bien les victimes que les auteurs, souligne le magistrat. En 2023, parmi les victimes, on compte sept mineurs décédés et 18 blessés.
De l'autre côté, "les auteurs sont de plus en jeunes et pas encore ancrés dans la criminalité et pourtant, ils commettent l'irréparable." Le procureur cite le cas de deux jeunes interpellés au cours du 1ᵉʳ semestre et âgés de 18 et 19 ans. Pourtant, sans antécédents graves, ils seraient impliqués dans plusieurs assassinats.
Le bilan de cette année fait état de six mineurs mis en examen dans des affaires d'homicides volontaires. Près d'un auteur sur deux mis en examen est âgé de 18 à 21 ans.
Des femmes plus nombreuses
"Nouveau et inquiétant", le nombre de femmes victimes de ce narco banditisme progresse avec un bilan de trois décès et quatre blessées. Autre phénomène nouveau, "la féminisation des personnes mises en cause" avec quatre femmes mises en examen pour "association de malfaiteurs en vue de la préparation de crime".
Selon Nicolas Bessone, "auparavant les femmes dans le narco trafic jouaient des rôles de nourrices, de recel ou de blanchiment d'argent", mais elles se révèlent plus actives "dans la gestion des points de deal, dans la commandite et l'organisation d'assassinat", certaines étant "en capacité de remplacer leur compagnon en fuite ou incarcéré".
Le phénomène des "jobbeurs"
Souvent jeunes ou en situation irrégulière, proies faciles recrutées comme vendeurs ou guetteurs, les "jobbeurs" sont envoyés sur les points de deal à des postes très exposés aux risques. Un phénomène apparu cette année, selon le procureur.
Les autorités entendent développer la communication '"percutante", notamment sur les réseaux sociaux, pour dissuader ces jeunes qui, "croyant trouver l'Eldorado, se retrouvent assassinés sur les points de deal". Nicolas Bessone rappelle son intention d'ouvrir à ce sujet des enquêtes pour trafic d'êtres humains.
Une guerre de clans meurtrière
L'un s'appelle DZ Mafia et se revendique de l'Algérie, l'autre Yoda, sans doute une référence à Star Wars. Ils se livrent une guerre de territoire sans merci entre les quartiers Nord, plus précisément dans les 14ᵉ et 15ᵉ arrondissements et au sud, la cité de la Cayolle. Ces deux clans sont responsables de 73 % des narchomicides en 202 : "34 sont imputables à DZ Mafia et 24 à Yoda", indique Nicolas Bessone, qui se veut rassurant.
"La situation reste fragile, mais la pression baisse". Depuis le 13 novembre, c'est l'accalmie entre les deux clans, un soulagement pour le procureur après un mois d'août sanglant, avec 18 narchomicides au compteur. "On se demandait quand ça allait s'arrêter" confie le procureur.