Marchands de sommeil : cinq ans de prison dont quatre ans fermes contre l'ex-policier marseillais qui louait des logements insalubres

Le tribunal correctionnel de Marseille a condamné Gérard Gallas, ex-policier reconverti en marchand de sommeil à cinq ans de prison dont quatre ans fermes. Le tribunal a procédé à la confiscation de biens immobiliers et de près de 500 000 euros d'amendes et de frais de dédommagement.

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Le 13 novembre 2023, le tribunal correctionnel de Marseille avait examiné le dossier de Gérard Gallas, ancien policier reconverti. Le procureur Guillaume Bricier, avait requis quatre ans de prison à l'encontre du marchand de sommeil et demandé la confiscation de certains de ses biens. Finalement le tribunal correctionnel de Marseille, ce mardi 23 janvier a prononcé une peine plus lourde de cinq ans de prison dont quatre fermes avec mandat d'arrêt pour Gérard Gallas et son homme de main, Ali Faissoili Aliani. Les deux hommes ont également été condamnés à de lourdes amendes, de 75.000 euros pour l'ancien policier au centre de rétention administrative de Marseille et de 45.000 euros pour son ancien bras droit.

C'est une affaire symbole de la lutte contre l'habitat indigne.

Des peines exemplaires

En plus des cinq ans de prison dont quatre fermes, et des amendes pécuniaires, le tribunal a procédé à des confiscations de biens.

Le tribunal a confisqué définitivement deux immeubles détenus par le prévenu via des sociétés civiles immobilières (SCI), la confiscation de 220.000 euros saisis sur une assurance-vie à son nom, et 300.000 euros de dommages et intérêts au total pour les nombreuses parties civiles, dont la ville de Marseille.

"Cette décision historique marquera la lutte contre les marchands de sommeil qui pourrissent notre ville", s'est également félicité Me Jorge Mendes, avocat de la Ville qui s'était constituée partie civile. 

"C'est une grande satisfaction pour toutes les victimes. Ce sont des personnes invisibles qui ont gagné en visibilité, malgré leur statut d'étrangers en situation irrégulière", a réagi Me Aurélien Leroux, avocat de plusieurs locataires et de deux associations marseillaises, Réseau Hospitalité et Un centre-ville pour tous.

"C'est la peine la plus lourde jamais prononcée contre un marchand de sommeil à Marseille", ville gangrénée par l'habitat indigne, avec 40.000 taudis, soit 10% du parc immobilier, et "cette décision s'inscrit dans un ras-le-bol à Marseille et en France", a ajouté l'avocat, rappelant que ce verdict survient quelques heures seulement après l'adoption à l'Assemblée nationale d'un projet de loi contre "l'habitat dégradé" qui prévoit de nouveaux outils pour lutter contre les marchands de sommeil.

Même satisfaction du côté des associations parties civiles, qui ont salué un procès "exemplaire". "C'est un verdict qui montre que ces gens qui exploitent la misère humaine ne resteront pas impunis", a souligné Margot Bonis, de Réseau Hospitalité.

Exploitation de la misère

En tout, en son nom propre ou via ses SCI, Gérard Gallas, 50 ans, possédait une centaine d'appartements dans une dizaine d'immeubles à Marseille. Mais ce procès ne concernait que les appartements dans quatre de ces bâtiments. Ces 72 logements, parfois aménagés dans des caves, étaient loués jusqu'à 600 euros, essentiellement à des étrangers en situation précaire, avec souvent des enfants mineurs.

En effet, une quarantaine de familles, toutes sans-papiers ou demandeurs d'asile ont témoigné auprès des enquêteurs. Certaines vivaient dans des appartements de moins de cinq mètres carrés, envahis de punaises de lit et autres nuisibles, parfois sans chauffage, comme le relatait le journal Le Monde en mars 2023.

Des immeubles frappés de périls

Dans l'un des immeubles, frappé d'un arrêté de péril en mars 2021, des cloisons ont été montées, afin de multiplier les logements. Le propriétaire louait ainsi 21 logements, contre 6 auparavant. 

Aurélien Leroux, avocat des associations Un Centre-Ville Pour Tous, et Réseau Hospitalité, mais aussi de huit victimes explique que la justice s'est penchée sur cette affaire, parce qu'"il y a eu un incendie, sinon on n'aurait jamais rien su".

Il milite pour que les signalements d'habitats indignes soient systématiques par les offices de contrôles , comme le stipule l'article 40 du Code Pénal et surtout qu'il y ait plus "de poursuites judiciaires". 

Dans cette affaire, la mairie de Marseille a également porté plainte. Constituée partie civile, la ville a fait de la lutte contre l'habitat insalubre, l'une de ces priorités. 

Lors des états généraux du Logement, Benoît Payan a d'ailleurs détaillé sa proposition de loi : définition juridique du terme de "marchand de sommeil", création d'un délit et surtout durcissement des peines, le maire veut légiférer et le fait savoir. 

"Mise en danger d'autrui"

Dans son réquisitoire, le procureur avait mis en avant "le choix délibéré" de Gérard Gallas d'acheter des immeubles à bas prix, dans des quartiers pauvres, et de cibler des "locataires vulnérables, des personnes en situation irrégulière, familles avec enfants mineurs, femmes enceintes, demandeurs d'asile, personnes en état de précarité sociale".

"On n'est pas dans une infraction d'ordre administratif, mais dans une infraction au Code pénal : l'atteinte à la dignité humaine", avait insisté Guillaume Bricier, avec "mise en danger d'autrui".

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