Depuis mi-avril, une trentaine de femmes, victimes de violences conjugales, sont hébergées au centre d'entraînement de l'OM, situé à la Commanderie à Marseille. La secrétaire d'état à l'égalité entre les hommes et les femmes s'est déplacée mercredi à leur rencontre.
Elles sont 29. Toutes ont dû quitter leur domicile précipitemment ces dernières semaines, parfois avec leurs enfants. Ces femmes, sont victimes de violences de la part de leurs conjoints. Et avec le confinement et l'enfermement, les souffrances se sont aggravées.
Elles ont trouvé refuge à l'Olympique de Marseille. Le club a mis à disposition les locaux de son centre d'entraînement et une quarantaine de chambres, habituellement occupées par les jeunes joueurs du centre de formation du club olympien.
"Au début de cette crise (du coronavirus), on s'est demandé comment contribuer", explique Jacques-Henri Eyraud. "La cause des femmes victimes de violence domestique est une grande cause, et comme nous avions une cinquantaine de chambres, pourquoi ne pas les mettre à disposition ?"Partout en France, des acteurs se mobilisent.
— Secrétariat d’État chargé de l'Égalité (@Egal_FH) May 6, 2020
Les locaux de @OM_Officiel permettent aujourd’hui d’accueillir des victimes de #ViolencesConjugales : @MarleneSchiappa est sur place pour soutenir les acteurs qui s’engagent aux côtés de l’Etat #NeRienLaisserPasser ⤵ pic.twitter.com/ZhXapTnTy2
C'est l'association SOS Femmes 13, mandatée par la Préfecture, qui accompagne ces femmes et leurs enfants, grâce à l'action de travailleurs sociaux et psychologues.
Pour sa présidente, Valérie Secco, ce partanariat est "un symbole fort, et une main tendue inattendue". Elle ajoute que la collaboration avec les équipes du club s'est faite en toute sincérité, et "avec beaucoup de bienveillance". Le club, a par exemple mis à disposition des ces femmes, son médecin, et fait en sorte "qu'elles se sentent bien dans les locaux".
Seule l'une d'entre elle a accepté de témoigner. C'est une femme d'une quarantaine d'années, marocaine, contrainte de fuir son domicile marseillais face à un mari violent. Aujourd'hui, elle souhaite simplement "trouver un travail" et reconstruire sa vie.
Une ministre à leur rencontre
Mercredi après-midi, Marlène Schiappa s'est donc rendu à Marseille, à la rencontre de ces victimes.Après avoir visité le site de la Commanderie, guidée par le président de l'OM, la secrétaire d'état, a tenu à saluer l'engagement de tous les acteurs et de toutes les initiatives, qui permettent d'apporter un peu de soutien à ces femmes.
"Une belle preuve de solidarité entre l'association SOS Femmes 13 et l'Olympique de Marseille, et de solidarité entre les hommes et les femmes, avec un milieu très masculin qui s'engage pour soutenir les femmes", a expliqué Marlène Schiappa.Echanges précieux avec les formidables membres de l’association SOS Femmes 13 & les femmes hébergées par l’@OM_Officiel
— ?? MarleneSchiappa (@MarleneSchiappa) May 6, 2020
✅C’est l’un des dispositifs financé par le fonds d’urgence créé par le gouvernement pendant le #confinement pic.twitter.com/ZlJXN9bcWS
Des signalements en augmentation depuis le confinement
Avec le confinement, ces femmes, se sont retrouvées encore plus isolées. Souvent, elles sont dans l'impossibilité de simplement téléphoner à un numéro d'urgence, dans la promiscuité de leurs logements.Alors le gouvernement a créé un numéro, le 114, pour envoyer un simple texto, en guise d'appel à l'aide, et déclencher l'intervention des forces de l'ordre au domicile.Difficile de dire si les actes de violences conjugales ont augmenté à Marseille ou même au niveau national. Mais le nombre de signalements reçus par le 3919, la plateforme téléphonique dédiée, a été multiplié par cinq, par rapport à l'avant confinement.
Pour Valérie Secco, Présidente de SOS Femmes 13, pas d'augmentions signifatives des actes de violences, mais une aggravation des situations : "cette période a crystallisé certaines situations, qui étaient déjà très fragiles pour certaines femmes" explique-t-elle.
Pendant le confinement, deux à trois fois plus d'appels au 3919. #SolidaritéFemmes lance un appel aux dons.
— Solidarité Femmes (@SolidariteFemme) April 27, 2020
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Pour trouver une solution d'urgence, la France dispose de 6.000 places d'hébergements. A cela, s'ajoutent les 20.000 nuitées d'hôtel financées par l'Etat pendant la période du confinement. Les femmes peuvent y trouver refuge. Les maris également, ceux qui craignent de passer à l'acte.
"Plus de places d'hébergements, et plus de professionnels"
A Carpentras dans le Vaucluse, l'association Rheso a accompagné cette année, 413 femmes en situation de détresse. Accueil de jour, accompagnement psycho-social, mais aussi refuge pour les femmes et leurs enfants, la prise en charge est globale.Mais pour Céline Donzet, chargée de développement pour Rheso, il faut encore "plus de places d'hébergement, et de professionnels" pour les accompagner.
Depuis le début du confinement, l'association n'a pas constaté une augmentation de cas de violences conjugales. "La première semaine du confinement a été étonnament calme, mais par la suite, les choses ont changé", explique Céline Donzet.
"Nous n'avons pas reçu plus d'appels que d'habitude, mais ces appels, concernaient des situations plus urgentes. Ces femmes devaient quitter le domicile immédiatement", précise-t-elle.
Au total, depuis le 17 mars, Rheso a reçu 45 demandes de mises à l'abri urgentes. "En temps normal, sur une période d'un mois et demi à deux mois, nous avons une dizaine de demandes".
Mais ce qui désole le plus Céline Donzet, c'est que l'association n'a pu apporter de solution qu'à un tiers des cas. Et quand on lui demande que faire pour les 2/3 restants... silence...
Car avec le confinement, les accueils de jour ont fermé, et l'hôtellerie également. Quand on évoque les 20.000 nuitées d'hôtel financées par l'Etat pour ces situations d'urgence, le jugement tombe : "Nous n'en avons pas vu la couleur dans le Vaucluse..."
Au delà de l'urgence, il va falloir aussi être vigilant après le déconfinement. "Cette période a fait ressortir un mal-être, un traumatisme pour certaines femmes, séparées de leur mari violent, et revoient dans le confinement, l'emprisonnement qu'elles ont subi pendant des années", explique Céline Donzet.
126 féminicides en 2019
A Marseille, SOS Femmes 13 continuera bien évidemment son combat, après le 11 mai. L'association souhaiterait créer "un refuge des dames", un lieu où les victimes de violences conjugales pourraient venir se ressourcer, "avant de se chercher un ailleurs".Car ce fléau est "la première cause de mortalité pour les femmes de 25 à 45 ans", rappelle-t-elle. En 2019, selon un décompte de l'AFP, 126 femmes ont perdu la vie sous les coups de leurs conjoints. Une tous les trois jours en moyenne.
A Marseille, les 29 femmes mises à l'abri avec leurs enfants, pourront rester à la Commanderie jusqu'au 15 juin, date de la reprise de la saison pour l'OM. SOS Femmes 13, travaille actuellement, pour trouver des solutions d'hébergement plus pérennes, pour chacune d'entre elles.