Onze personnes sont jugées depuis lundi devant le tribunal correctionnel de Marseille. Les prévenus sont soupçonnés d'appartenir à l'un des principaux points de deal de la ville, qui remporte en moyenne 80.000 euros par jour.
Ils sont onze prévenus: convoyeurs, revendeurs, nourrices... C'est une bonne partie de l'organigramme du plan stup de la Cité des Oliviers qui est jugé depuis lundi au tribunal correctionnel de Marseille. Mais les cerveaux du trafic sont les grands absents.
Comme en 2019 quand ce réseau des quartiers nord de Marseille, l'un des principaux de la ville, avait fait l'objet d'un grand procès. Sept prévenus avaient été condamnés jusqu'à 10 ans de prison.
Cette fois ils sont huit hommes et trois femmes, âgés de 24 à 54 ans. Ils sont poursuivis pour participation à "un groupement (...) en vue de l'acquisition, du transport, de la détention et de l'offre (...) de produits stupéfiants", cinq comparaissent détenus et cinq sous contrôle judiciaire. Un dernier ne s'est pas présenté à l'audience.
Six d'entre eux contestent leur mise en cause.
Figure du narcobanditisme marseillais, Kamel Meziani, 37 ans est soupçonné d'être impliqué dans deux règlements de comptes fin août à Marseille. Il a été mis en examen et écroué début septembre pour "assassinats en bande organisée".
Un de ses lieutenants présumés, Eddy Mendil, 32 ans, faisait initialement partie des treize prévenus renvoyés en correctionnelle. Mais il a accepté de disjoindre son cas et celui de sa compagne Samira Karkar pour raisons de procédure. Ils seront jugés le 6 avril.
Plus de mille clients par jour
L'enquête a débuté en avril 2019 par un renseignement anonyme. La cité est mise sous surveillance. Les enquêteurs comptabilisent plus de mille clients par jour au point de deal de la cité, ouvert de 10h à 04h du matin.
Trois appartements "nourrices" servent au stockage et au conditionnement de la drogue. Leurs locataires sont payés entre 300 et 700 euros par semaine.
À l'audience, l'une de ces "nourrices" a assuré ne pas avoir eu le choix, se disant
menacée par des hommes encagoulés qui passaient chez elle trois fois par jour pour récupérer de la drogue.
De leurs planques, les policiers visualisent toute l'organisation du réseau et les rôles de chacun. Il y a les guetteurs, dont certains sont positionnés sur le toit.
Les vendeurs, appelés "charbonneurs", sont chargés des transactions sous la protection de ceux qui contrôlent l'ascenseur desservant le lieu de vente, l'accès par les escaliers étant condamné avec des planches.
Plus de 200 kilos de drogue saisis
Les enquêteurs voient l'arrivée en voiture de la marchandise, son transport d'un
appartement à l'autre dans des "valises marocaines", ces ballots parallélépipèdes
de plaquettes de cannabis entourés de toile de jute.
En juillet, ils saisissent 200 kilos de résine de cannabis, 5,5 kilos d'herbe de cannabis, 9 kilos de cocaïne et 2,7 kilos d'ecstasy, ainsi que des armes et des téléphones.
L'exploitation de données et d'écoutes téléphoniques fait tomber des membres du réseau.
"Je fais l'aller-retour à Monaco pour voir "un gadjo" pour "récup", explique un transporteur, tandis qu'un vendeur s'enthousiasme par SMS: "On A Dealer, On A Voler, On A Charbonner Toute L'Année Pour Avoir Ce Que Personne Ne Va Nous Donner".
Et ce qu'ils gagnent, certains ne prennent pas la peine de le cacher. Séjours à l'hôtel Martinez, cinq étoiles de Cannes, vêtements de marques et montres Rolex...
Dans une vidéo publiée sur internet, l'un d'entre eux s'exhibe ainsi dans une voiture de luxe, un singe sur l'épaule, une arme à la main et des liasses de billets entre les jambes.
Selon la police, le point de deal de la cité des Oliviers aurait généré jusqu'à 80.000 euros par jour. Un plan stup très lucratif qui attise les guerres de territoires sanglantes.
42% des règlements de compte chaque année en France se déroulent dans les Bouches-du-Rhône. Le jugement est attendu jeudi soir.