À l'occasion de la visite du pape à Marseille, l'association humanitaire SOS Méditerranée a donné une conférence de presse ce vendredi. Les fondateurs et membres de l'équipage ont dressé un bilan de la situation en Méditerranée. Ils ont tenu à souligner l'engagement du pape sur les naufrages.
Ce vendredi matin, SOS Méditerranée a organisé une conférence de presse, en amont de la visite du pape à Marseille. La cause des migrants étant au cœur des débats lors de cette visite de deux jours, l'association de sauvetage en mer a fait le point sur la question migratoire, alors que l'île de Lampedusa, au sud de l'Italie, fait face à une situation inédite depuis plusieurs jours.
La conférence de presse s'est tenue depuis le navire humanitaire l'Ocean Viking. Le bateau s'est amarré il y a deux jours au port autonome de Marseille, lieu de son siège social en France.
Que faut-il retenir de cette prise de parole ? France 3 Provence Alpes revient sur les déclarations fortes des membres de l'association de citoyens et citoyennes européens, qui luttent contre la tragédie des naufrages en Méditerranée.
"Les chiffres de mortalité n'ont jamais été aussi forts que depuis 2017"
Sophie Beau, directrice générale de l'association humanitaire en France, constate "une détérioration" des conditions de sauvetage en mer. Elle précise que l'année 2023 est marquée par beaucoup de traversées sur cet axe migratoire méditerranéen, le plus meurtrier au monde.
"Les chiffres de mortalité n'ont jamais été aussi forts que depuis 2017, lance-t-elle. Il y a eu 2 079 morts cette année en Méditerranée centrale, sur ce seul axe. C'est plus que l'année entière de 2022."
"On ne sait jamais s'ils vont nous tirer dessus"
Les naufrages se succèdent, tandis que les opérations de sauvetage sont entravées par les gardes-côtes libyens.
Selon Sophie Beau, il y a une défaillance absolue de coordination de secours. "Nous sommes à l'aveugle en train de chercher les embarcations", alerte-t-elle.
Jérôme, un membre de l'équipe de recherche et de sauvetage commente leurs conditions de travail difficiles : "On rencontre les gardes-côtes, on ne sait jamais s'ils vont nous tirer dessus."
"Le temps d'arriver, nous sommes déjà devant une mer de cadavres"
En mer, l'état des bateaux et des naufragés afflige les équipes de SOS Méditerranée. "Les gens sont assis dans l'eau, les mains dans l'eau, dans cette espèce de baignoire mal construite, raconte Jérôme, le sauveteur. L'eau se mélange à l'essence, c'est corrosif. Pendant cinq jours, les besoins, le fioul, l'eau... Quand on récupère ces gens-là, il n'y a plus aucune dignité."
Face à ces histoires dramatiques, Sophie Beau, évoque l'engagement du pape sur les naufrages. "En avril 2021, SOS est appelé pour sauver une embarcation. Le temps d'arriver, nous sommes déjà devant une mer de cadavres. Personne n'a repris cette info. C'est le pape qui a été le seul à s'exprimer sur ces 130 morts."
Avec beaucoup d'émotion, elle marque des temps de silence puis pointe le "silence assourdissant des autorités".
"Il faut mettre en place une flotte de sauvetage européenne"
François Thomas, le président de l'ONG, s'exprime à son tour. "Il faut mettre en place une flotte de sauvetage européenne, s'interroge-t-il. L'Europe a les moyens de le faire. Pour sauver des vies, tout simplement. Nous attendons des paroles très fortes pour rappeler que c'est notre humanité qui coule si l'Europe ne fait pas quelque chose."
Le 13 juillet dernier, les parlementaires européens ont adopté une résolution en ce sens. Dans leur texte, ils appellent l’Union européenne et les Vingt-Sept à une "meilleure coordination concernant les opérations de sauvetage en mer".
Les députés européens se sont prononcés en faveur d’une augmentation des moyens alloués par les États membres à Frontex, l’agence européenne de gardes-frontières et de gardes-côtes, en termes de navires, d’équipements et de personnel dédiés aux activités de recherche et de sauvetage. Cette résolution adoptée demande aussi la mise en place d’une mission européenne spéciale en la matière, qui pourrait être assurée par les États membres et Frontex.