Trois questions sur les annonces d'Emmanuel Macron concernant les amendes forfaitaires pour consommation de drogue

A peine un peu plus d'un tiers des amendes pour consommation de drogue sont réglées. Pour contrer cela, le président de la République, en visite à Marseille, veut les rendre payables immédiatement, en liquide ou par carte bancaire.

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C'est la première annonce d'Emmanuel Macron à l'occasion de sa visite de trois jours à Marseille. Dans un entretien au quotidien La Provence, dimanche 25 juin, le chef de l'Etat affirme que le paiement des amendes forfaitaires pour consommation de drogue doit pouvoir être "immédiat, par carte bancaire ou en liquide". Actuellement seules 35 % des amendes dressées sont effectivement réglées par les contrevenants. France 3 Provence-Alpes répond à trois questions sur cette annonce du président de la République qui est diversement accueillie par les policiers et les responsables politiques.

<< Suivez en direct cette première journée de visite présidentielle à Marseille.

Que risque un consommateur de drogue ?

Pour lutter contre le trafic de drogue, Emmanuel Macron souhaite s'attaquer aux consommateurs. "Les gens qui ont les moyens de consommer de la drogue parce qu’ils trouvent cela récréatif, il faut qu’ils comprennent qu’ils nourrissent des réseaux et qu’ils ont une complicité de fait", explique-t-il dans La Provence.

En 2020, le gouvernement a mis en place une amende forfaitaire pour consommation de drogue pouvant aller jusqu'à 2.500€. Elle est de 200€ si elle est non-majorée, pour une première consommation. 

Le principe a d'abord été expérimenté à Marseille, à partir du 16 juillet 2020. Il a ensuite été étendu dans toute la France en septembre 2020.

Dans les Bouches-du-Rhône, 18.600 "amendes forfaitaires délictuelles" pour usage ont été dressées pour la seule année 2022, en augmentation de 50% sur 2021, première année d'application complète de ce dispositif, selon la préfecture de police des Bouches-du-Rhône.

Emmanuel Macron souhaite que ces amendes soient payables immédiatement, en liquide ou par carte bancaire.

"J’ai demandé au ministre de l’Intérieur de préparer un décret pour la fin de l’été […] On a commencé à équiper les agents de 5000 terminaux de paiement. C’est très concret."

Emmanuel Macron

En France, une loi de 1970 parmi les plus répressives d'Europe prévoit théoriquement de punir l'usage illicite de stupéfiants d'une peine allant jusqu'à un an de prison et 3.750 euros d'amende. Mais l'emprisonnement pour usage reste exceptionnel, les magistrats privilégiant, avant la mise en place de l'amende, des "mesures alternatives aux poursuites" comme des rappels à la loi.

Pourquoi cette nouvelle mesure ?

Le problème, c'est que malgré un taux de verbalisation en hausse, les amendes sont rarement payées. "Ce que nous avons constaté, c’est que comme le règlement se fait par télépaiement entre 45 jours et 60 jours, nous avons un taux de recouvrement de 35%. Et c’est en dessous de cette moyenne à Marseille. C’est inacceptable", déclare le président de la République. 

Le paiement immédiat devrait faciliter le recouvrement de ces amendes.

Comment l'idée est-elle accueillie ?

L'amende forfaitaire est louée par certains policiers et responsables politiques comme une "réponse plus efficace au délit d'usage de stupéfiants", qui évite "d'engorger les tribunaux".

Mais sur franceinfo, Jean-Christophe Couvy, secrétaire national unité SGP-police Force Ouvrière, a livré un regard critique sur cette mesure. "On va se transformer en agent de recouvrement du Trésor public", dit-il.

Selon lui, cette mesure ne va pas changer grand-chose : "On va continuer à faire comme on faisait d'habitude, c'est-à-dire donner l'amende forfaitaire et puis la faire payer plus tard". Jean-Christophe Couvy ne voit pas d'un bon œil le fait d'"avoir de l'espèce sur soi". "Imaginez un peu la tension que vous allez avoir sur le terrain avec la personne qui souvent est déjà chargée un peu en stupéfiants. Vous allez lui dire 'Monsieur, on va vous accompagner jusqu'à une banque ou un guichet et vous allez nous donner spontanément votre argent', a-t-il ironisé.

Le syndicaliste souligne également qu'un certain nombre de personnes interpellées "sont sous tutelle ou curatelle. Je ne suis pas sûr non plus que ces personnes-là aient de l'argent sur eux", fait-il remarquer. Les mineurs ne seront pas non plus concernés puisqu'ils "ne payent pas d'amende", explique-t-il.

L'observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT) est, lui aussi, mitigé. "La montée en puissance de cette dynamique de pénalisation financière s'est faite au détriment des mesures à dimension sanitaire individualisées, devenues rares", a-t-il ainsi observé.

Avec AFP

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