Une commémoration était organisée jeudi à Avignon en mémoire du brigadier Eric Masson. Le 5 mai 2021, ce policier de 36 ans est abattu en plein centre-ville, lors d'un contrôle d'identité sur un point de vente de drogue. Un an après, retour sur les faits.
- Que s'est-il passé le 5 mai 2021 au cœur d'Avignon ?
Le 5 mai 2021, le brigadier Eric Masson, 36 ans, est abattu lors d'un banal contrôle. Une affaire qui allait encore exacerber le malaise policier, dix jours après la mort d'une policière au commissariat de Rambouillet, victime d'un attentat islamiste.
Vers 18h30, ce mercredi dans le secteur de la rue des Teinturiers, près de la place Pie, à Avignon, les policiers sont sollicités pour intervenir près d'une épicerie. Sur place : un point de vente de drogue.
Ils décident de contrôler deux hommes. L'un d'eux sort une arme et tire à quatre reprises sur le policier. Son collègue riposte, mais l’individu et son complice prennent la fuite en courant.
L'agent de police touché s'effondre au sol. Il venait de retirer son gilet pare-balles, car il était en fin de mission. Eric Masson ne survivra pas à ses blessures.
- Quel est le profil du tireur présumé ?
Après quatre jours de cavale, deux jeunes de 19 et 20 ans sont interpellés sur l'autoroute en direction de l'Espagne. Le plus jeune, Ilias A., est désigné comme le tireur présumé par deux témoignages, celui de son camarade et celui du binôme d'Eric Masson.
Le jeune homme est mis en examen pour homicide volontaire et tentative d'homicide sur personne dépositaire de l'autorité publique.
Son avocat dit de lui qu'il n'a pas le profil. Ilyes A., tueur de flic ? Ce jeune homme de 19 ans qu'il connaît bien, dont il connaît la mère, aussi ? Ça ne colle pas, ça ne peut pas coller, estime-t-il.
En tout 80 enquêteurs travaillent alors à plein temps sur cette enquête. Le tireur présumé est connu par les forces de l'ordre pour trafic de stupéfiants, violences en réunion et port d'arme.
Toujours en détention provisoire aux Baumettes à Marseille, après une période à l'isolement, le jeune homme "dit toujours qu'il est innocent", selon son avocat, Me Louis-Alain Lemaire.
"Un déni insupportable" pour la famille du policier, père de deux filles, qui attend le procès afin qu'"il soit mis en face d'éléments semble-t-il accablants", selon l'avocat de la famille Masson, Me Philippe Expert.
- Où en est l'enquête ?
L'enquête touche à sa fin, avec l'étape attendue de la reconstitution. Au total trois personnes ont été mises en examen: les deux jeunes et le propriétaire d'un local qu'ils ont brièvement occupé dans leur fuite.
Le tireur savait-il qu'il avait affaire à des policiers ? Eric Masson portait-il son brassard à la main ? Ont-ils crié "police" lors de leur intervention ? Autant de questions qui seront au cœur du procès que les parties espèrent pour 2023.
- Quelle place tient le trafic de drogue dans cette affaire ?
"On les voit plus les dealers": un an après le meurtre du policier Eric Masson, le quartier des Teinturiers a retrouvé son calme, même si le trafic de drogue a progressé globalement dans le Vaucluse.
Un mois après la mort d'Eric Masson, deux hommes ont été tués dans le quartier de Monclar, sur fond de guerre entre bandes.
Plus largement, "on voit sur tout le département - à Orange, Carpentras, Cavaillon - des trafics de stupéfiants qui s'intensifient", observe David Fiorentini, secrétaire départemental du syndicat Alliance.
Fin novembre, c'est par exemple un réseau de trafic de cocaïne et de résine de cannabis "type Uber-coke", fonctionnant uniquement par livraison, qui a été démantelé dans la région de Cavaillon.
Fin 2020, le Vaucluse, un des départements les plus pauvres de France, comptait 84 points de drodue, soit 15 points de vente pour 100.000 habitants, le troisième en densité derrière la Guadeloupe et la Seine-Saint-Denis.
"Au 31 mars 2022 il y en avait 69, soit 15 de moins", selon le ministère de l'Intérieur.