Le tribunal de commerce de Marseille a, comme attendu, placé en délibéré à vendredi sa décision sur la cessation de paiements de la SNCM, qui devrait être reconnue au vu des conclusions du juge-enquêteur. 

Cet administrateur judiciaire, dans son rapport remis mardi, estime en effet ainsi que la compagnie maritime se trouve bien en état de cessation de paiements, ce qui augure d'un placement en redressement judiciaire, souhaité par les actionnaires de l'entreprise.

"Il est clair que c'est mal engagé", a reconnu Marcel Faure, secrétaire (CGT) du CE, pressentant cette issue redoutée par les syndicats.
L'actionnaire majoritaire de la Société nationale Corse Méditerranée, Transdev (66%), a volontairement provoqué le dépôt de bilan de la compagnie en
exigeant le remboursement de 103 millions d'euros de prêts à court terme début novembre, imité à hauteur de 14 millions d'euros par l'autre actionnaire Veolia, deux créances qu'elle n'est pas en mesure d'honorer.

Le redressement judiciaire comme la seule solution

Transdev, mais aussi l'Etat, actionnaire à 25%, considèrent le redressement judiciaire comme la seule solution pour "empêcher la disparition pure et simple" de la SNCM, car cela permettrait selon eux de trouver un repreneur et d'annuler les condamnations européennes à rembourser des aides publiques jugées illégales pour plus de 400 millions d'euros --des condamnations que la direction actuelle de la SNCM n'a cependant jamais cherché à contester, au grand dam des syndicats.
Le secrétaire d'Etat aux Transports Alain Vidalies se rendra d'ailleurs à Bruxelles ce mercredi pour défendre cette solution auprès de la Commission. 
Lors d'une première audience le 14 novembre, le procureur de Marseille Brice Robin, avait remarqué le caractère "inédit" de la manoeuvre des actionnaires de la compagnie, une "cessation de paiement conduite par l'actionnaire principal".
Le tribunal avait alors mandaté un juge-enquêteur pour des "éclaircissements" sur ce que les salariés qualifient de "faillite organisée".


Pressions maximales sur la justice consulaire

De source proche du dossier, M. Robin a de nouveau relevé mardi cette situation exceptionnelle au vu d'une trésorerie positive (de l'ordre de 40 millions d'euros selon les syndicats). Il n'en a pas moins plaidé pour le redressement judiciaire, au vu des difficultés chroniques de la société (200 millions d'euros de déficit cumulé depuis 2001), estimant aussi que cela pourrait conduire des repreneurs éventuels à se manifester.
Les salariés, eux, ont de nouveau contesté que les créances brandies par Transdev soient juridiquement exigibles et demandé "la suspension de la procédure", a indiqué à l'AFP l'un des avocats du CE, Me Christine Bonnefoi.

"Le redressement judiciaire n'offre par ailleurs aucune sécurité sur le maintien de la DSP (délégation de service public, entre la Corse et le continent), et le fait que Transdev ait déjà annoncé son refus de financer une période d'observation de 6 mois nourrit l'hypothèse d'une liquidation judiciaire dans la foulée", a-t-elle poursuivi.


Ce scenario de liquidation est d'ailleurs défendu sans ambages dans le Parisien mardi par le président de la CCI de Marseille, Jacques Pfister, comme la "seule solution" pour en finir avec "la menace" de remboursement de 440 millions d'euros. "Les pressions sur la justice consulaire sont maximales", a déploré le représentant du personnel CFE-CGC Maurice Perrin.
Dans un communiqué, il fustige une "manipulation de dernière minute de l'exécutif de Corse", qui "venu en soutien des actionnaires" réclamerait le remboursement de 168 millions d'euros d'aides à la SNCM au titre de la DSP 2007-2013.

La direction de la compagnie a mis en avant, elle, le fait que la cessation de paiements était "avérée" et continue d'assurer que son "projet industriel préparé (...) constitue un atout pour trouver le meilleur repreneur et assurer la poursuite des opérations".

Les salariés espèrent en attendant qu'une nouvelle décision de justice viendra perturber les plans des actionnaires: le TGI de Nanterre (Hauts de Seine) se prononce mercredi sur un référé du comité d'entreprise européen de Transdev, l'accusant de "défaut d'information" sur sa décision de mise en cessation de paiements de la SNCM. "Cela pourrait annuler la demande de redressement judiciaire pour vice de forme", affirme le représentant de la CGT marins, Frédéric Alpozzo. 

La SNCM emploie actuellement 2.000 salariés dont 1.500 en CDI.

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