C'est un cercle restreint à une vingtaine d'athlètes dans la région : celui des médaillés d'or aux Jeux olympiques. Un rêve pour beaucoup, une consécration personnelle. Mais quelle vie ont ensuite ces champions au destin doré ?
Ils ont gravi les podiums et l'Olympe... Anne-Caroline Chausson, Gauthier Grumier,, Philippe Heberlé : ces athlètes de Bourgogne-Franche-Comté ont décroché le Graal, une médaille d'or aux Jeux olympiques. Mais la médaille a toujours ses revers. Après la gloire, quelle vie pour ces anciens champions ?
Anne-Caroline Chausson : BMX
Côté trophées, Anne-Caroline Chausson en connaît un rayon. La Dijonnaise a bien gagné sur tous les terrains : 12 fois championnes du monde de VTT, 2 fois en slalom et en cross. Et dans sa maison près d'Avignon dans le Vaucluse, où elle vit désormais, le clou de son palmarès, c'est bien cette médaille d'or olympique obtenue le 22 août 2008.
"Cette médaille olympique, c'est exceptionnel, c'est vraiment autre chose qu'une médaille de championnat du monde. Rien qu'au niveau de la taille, c'est beaucoup plus gros", sourit l'ancienne championne.
Le plus beau jour de la vie d'un sportif
Anne-Caroline Chaussonmédaillée d'or 2008 en BMX
16 ans après son jour de gloire, elle ressent toujours la même émotion lorsqu'elle revoit les images de sa course des JO de Pékin, ce jour où elle a crevé l'écran. À 31 ans, Anne-Caroline décroche le premier titre olympique de l'histoire en BMX, pour la dernière course de sa carrière. Le plus beau jour de sa vie.
"C'est le plus beau jour de la vie d'un sportif, c'est certain. Après d'une vie entière, ce sont des moments très forts et je ne crois pas que l'on puisse retrouver ces émotions ailleurs que dans le sport", explique Anne-Caroline.
Les gens oublient
Anne-Caroline Chaussonmédaillée d'or 2008 en BMX
Mais très vite, il faut reprendre sa route. Très sollicitée après sa médaille, Anne-Caroline voit le soufflet retomber. Depuis, la championne a bien tourné dans un clip pour la sécurité routière, mais elle regrette de ne pas avoir mieux exposé sa discipline.
"Les gens oublient parce qu'ils nous remplacent par d'autres personnes, un champion on est là pour être battu et remplacé par des plus jeunes. Et c'est très bien."
Depuis plusieurs années, la championne se bat contre une maladie. "Avec les années, notre vie ne change pas quand on est champion olympique. Après, il y a la vraie vie qui reprend et le sport qui s'arrête progressivement", explique avec émotion l'ancienne championne.
Gauthier Grumier, escrime
En 2016, Gauthier Grumier revient de Rio avec l'or par équipe et une médaille de bronze en individuel, sa plus grande fierté à ses yeux. Accueilli en héros dans sa ville de Nevers, l'escrimeur est pris dans un tourbillon.
On peut vite perdre pied
Gauthier Grumiermédaillé à Rio en 2016
"En aucun cas je n'avais envie de me sentir comme un super-héros. C'est limite gênant, t'es un type normal et après, on vient te monter devant un château pour présenter ta médaille, les gens te touchent, ils t'acclament, on peut vite perdre pied. Moi, je n'ai fait que de l'escrime", confie avec sincérité le Nivernais.
La médaille d'or ne m'a pas forcément aidé
Gauthier Grumiermédaillé à Rio en 2016
Une fois hors-jeu, il faut repartir à l'assaut. Mais être champion olympique n'ouvre pas toutes les portes, même à l'INSEP (institut national du sport, de l'expertise et de la performance), le centre des "seigneurs des anneaux". Depuis trois mois, seulement, Gauthier est l'entraîneur de l'équipe de France d'épée qui vise l'or à Paris, a l'instar de Romain Cannone, tenant du titre.
Toujours au centre des attentes et des regards, ça n'est que tardivement que la reconversion est arrivée, car il a fallu se faire accepter. "La médaille d'or olympique par équipe ne m'a pas aidé forcément, ça peut même être vu comme un frein, car j'avais annoncé après les Jeux de 2016 ma volonté de devenir entraîneur et je ne l'ai pas fait. Ce qui m'a aidé, c'est ma passion et ma compréhension de cette discipline", détaille l'ancien escrimeur.
Phillipe Heberlé, carabine
Lui aussi a fait un carton et les gros titres. Il faut dire qu'il y a 40 ans, la France ne ramène que cinq médailles d'or de Los Angeles... dont celle de Philippe Héberlé. Le calme, la précision, la gestion du stress, sont les grandes qualités du tireur belfortain, sacré à seulement 21 ans. Pourtant, il a lui aussi vécu un retour... carabiné.
"Quand je suis arrivé ici, ça a été un raz-de-marée, le téléphone n'arrêtait pas de sonner. Les gens venaient toquer à la porte pour des photos, des autographes, j'étais sollicité pour plein d'événements."
Encore 6 ou 7 mois après les jeux quand j'entendais le téléphone sonner, c'était un stress pour moi, je n'étais pas à ma place, le temps ne m'appartenait plus. J'avais l'impression que même moi, je ne m'appartenais plus.
Philippe Heberlémédaillé d'or de carabine en 1984
Philippe est, comme Gauthier Grumier, lui aussi devenu un maître d'armes. D'abord entraîneur national pendant deux décennies, il a ensuite créé une entreprise de couteaux révolutionnaires unique au monde avec un ami. Un domaine bien éloigné de sa médaille, même s'il a su en tirer profit.
"Ça a été un accélérateur, dans les prises de décisions de certaines instances ou même pour un prêt à la banque. Quand le banquier entendait mon nom, ça passait mieux, je trouve ça un peu bête, mais c'est comme ça", raconte l'ancien tireur.
Même s'il a mis pour le moment son entreprise en sourdine, il ne manque pas de se souvenir comment la médaille d'or a changé sa vie. "Une médaille toute sa vie, on vit avec, au gré des aventures, de l'hymne national, des rencontres."
Chacun a tricoté la suite de sa vie sur un fil doré, suscitant toujours autant d'admiration dans les yeux des autres. Avec l'immense fierté d'être l'un des 1266 champions olympiques français de l'histoire... Une vie en or, pour l'éternité.
► Reportage réalisé dans le cadre du magazine Enquêtes de Région, à revoir sur france.tv