Le robot NAO est devenu un compagnon familier dans deux classes spécialisées pour des enfants présentant des troubles du spectre autistique. C'est le cas depuis 2017 à l'Unité d'Enseignement en Maternelle Autisme de Quetigny et, depuis 2015, dans la classe ULIS du collège Les Courlis de Nevers.
Une tête, deux yeux et quatre membres... NAO est un robot humanoïde de 58 cm, fait de plastique et de métal, qui s'exprime et se déplace comme un être humain. Il suffit de le programmer pour obtenir de lui ce que l'on souhaite. Un outil, au design simple et à la neutralité rassurante, que des enseignantes et éducatrices spécialisées bourguignonnes utilisent depuis quelques années pour travailler avec leurs élèves autistes. Voici le récit de leurs expériences.
NAO, l'assistant de la maîtresse de maternelle
Pauline Audry et Fleur Stawinski, respectivement enseignante et éducatrice spécialisées, ont tenté l'aventure dans leur classe de maternelle spécialisée de Quetigny dès 2017. Avec la complicité de Pascal Bourgoin - le reponsable robotique au Rectorat de Dijon -, elles ont fait intervenir le petit robot à des moments clés de la journée, ou en séances de travail individualisées à raison de 5 minutes maximum.NAO est ainsi devenu un familier de la première activité du matin. Assis au milieu de ces petits de 3 à 5 ans, il participe à la séquence du "dire bonjour". Comme le reste de l'assemblée, il salue les autres, formule le jour de la semaine, évoque la météo de la journée. Il chante et mime la comptine du moment. Les petits élèves adorent l'imiter ! Un mimétisme qui a aussi été exploité en motricité au cours de séances de yoga.
"Les enfants regardaient droit dans les yeux NAO alors que les 3/4 du temps ils fuient le regard des adultes", se souvient Pascal Bourgoin, de la Direction régionale du numérique éducatif du Rectorat. "On s'est vite rendu compte que NAO était une main tendue vers nos élèves. Il nous aidait à rentrer plus facilement en relation avec eux ", renchérit Fleur Stawinski, éducatrice spécialisée.
Au point que l'équipe a décidé d'utiliser le robot pour certaines séances de travail individuelles. Ce n'est plus la maîtresse qui se met face à l'élève et lui demande de trier des formes ou reconnaître des couleurs, mais bien NAO ! L'enseignante est un peu à l'écart, et via la tablette, elle fait formuler les questions à son équipier technologique. Un assitant au visage lisse et à la voix robotique. L'éducatrice spécialisée, elle, est derrière l'enfant, l'incite si besoin, valide ses réponses.
NAO ne laisse rien paraître, aucune information, aucune expression, aucune odeur. Ça permet à nos élèves d'être beaucoup plus centrés sur ce qui leur est demandé.
"Les personnes autistes n'ont pas la capacité de trier les informations que leurs cinq sens enregistrent en permanence. Ils peuvent être envahis par tout ce qui les entoure. La couleur d'un vêtement ou un regard qui nous échappe et ils peuvent être perturbés. NAO, lui, ne laisse rien paraître, aucune information, aucune expression, aucune odeur. Ça permet à nos élèves d'être beaucoup plus centrés sur ce qui leur est demandé.", décrypte Fleur Stawinski.
Cette éducatrice spécialisée et sa collègue enseignante ont quitté depuis peu la classe de Quetigny pour de nouvelles fonctions. Mais elles sont convaincues que NAO a pu permettre à leurs élèves de progresser dans leurs interactions sociales et leurs apprentissages.
NAO, une passerelle vers les autres au collège
A Nevers, Sandrine Chovet ne dit pas autre chose même si cette professeure spécialisée a utilisé NAO de façon très différente. Depuis 2015, avec ses élèves autistes âgés de 12 à 18 ans, elle a choisi de se lancer dans la programmation du petit robot, qui lui avait été prêté par un collègue de physique-chimie. Pendant des heures, la classe a appris à NAO à se mouvoir, à dire des textes que les élèves imaginaient ou à répondre à des questions sur son identité. Comment t'appelles-tu? Qui t'a créé? Es-tu un être vivant?"Je m'en suis d'abord servi comme un tiers pour travailler toutes les disciplines. On s'est servi des maths, par exemple des unités de mesures ou des calculs de proportionnalité, pour programmer les déplacements de NAO. Le français aussi ! Avant que mes élèves fassent réciter quelques phrases à NAO, il leur fallait beaucoup travailler pour que chacune d'entre elles soit correcte grammaticalement, qu'il n'y manque aucun mot, aucun déterminant", détaille cette enseignante.
NAO a augmenté les échanges entre les élèves, il a créé une grande solidarité aussi.
Mais le robot a suscité un tel enthousiasme chez ses protégés que Sandrine Chovet a vite pressenti qu'il allait lui permettre de les faire sortir de leurs coquilles. "Comme dans de nombreuses unités pour élèves présentant des troubles du spectre autistique, nous disposons de box individuels de travail. Mes élèves apprécient de s'y replier, avec un casque anti-bruit, c'est là qu'ils se sentent sereins pour étudier. Sauf que cette activité de robotique est trop compliquée. Elle ne peut pas se faire en restant seul dans son coin, sans l'aide des autres. NAO a augmenté les échanges entre eux, il a créé une grande solidarité aussi.", analyse cette enseignante.
La classe a ensuite fait découvrir leur petit compagnon technologique et tout ce qu'ils avaient réussi à lui faire faire aux adultes et autres élèves du collège. Ils leur ont montré comment le programmer. Point d'orgue de cette expérience, ils ont également réalisé une démonstration dans un lycée voisin.
"C'était très valorisant pour eux de montrer l'étendue de leurs compétences et de les transmettre. Mais c'était aussi un vrai défi d'oser sortir de l'établissement, de se confronter aux bruits de la ville, de prendre le bus, d'aller dans des nouveaux locaux, de s'exprimer devant de parfaits inconnus. C'est une grosse source d'angoisse pour mes élèves même si je les avais longuement préparés à cette sortie. Mais NAO est une telle source de motivation qu'ils ont accepté de se confronter à cela. C'est un outil intéressant pour l'inclusion !", sourit Sandrine Chovet, qui ne se voit plus enseigner sans NAO.