INTERVIEW. Divorce envisagé entre la Bourgogne et la Franche-Comté : "le bilan de la fusion est exécrable"

La Bourgogne et la Franche-Comté vont-elles se séparer? Entre querelles politiques et bataille des institutions, le lien entre les deux régions est toujours fragile. Un spécialiste des politiques territoriales analyse aujourd'hui la fusion comme un échec.

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En 2014, François Patriat et Marie-Guite Dufay, respectivement présidents des régions Bourgogne et Franche-Comté, déclaraient être favorables à la fusion des deux entités. Une annonce suite au plan de Manuel Valls, le Premier ministre de l'époque, qui voulait diviser par deux le nombre de régions en France. La Bourgogne et la Franche-Comté portaient alors ce projet avec grand espoir. Mais ça, c'était avant.

Aujourd'hui, la situation semble très tendue, à l'image des récentes déclarations du maire de Dijon, François Rebsamen, qui fait savoir qu'"il faut réfléchir à une scission". Romain Pasquier, directeur de recherche au centre national de la recherche scientifique (CNRS) à Rennes, voit le mariage entre la Bourgogne et la Franche-Comté comme un échec.

Quel bilan pour la fusion de la Bourgogne et la Franche-Comté ?

Romain Pasquier : J’ai suivi de très près la fabrication de cette nouvelle carte des régions 2014 à 2016. C’est une carte faite dans l’urgence avec plusieurs tracés artificiels. Les affinités politiques ont beaucoup joué. François Patriat et Marie-Guite Dufay voulaient montrer qu’ils étaient les bons élèves de la classe. François Rebsamen était très sceptique sur le sujet à l’époque.

Mais c'est un bilan éxécrable. Les nouvelles régions devaient ramener 12 milliards dans les caisses de l’État, ça n’a pas été le cas. Elles devaient être des super poids lourds européens, ça n’a pas été le cas.

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Quelles sont les raisons de cet échec ?

R.M : Dijon et Besançon sont deux villes moyennes avec beaucoup de similitudes. En Nouvelle-Aquitaine, rien ne peut concurrencer Bordeaux par exemple. Il y a eu une compétition éditoriale en Bourgogne Franche-Comté. Les tensions resurgissent à chaque nouvel enjeu, on est dans une logique de compétition et pas de coopération.

La Franche-Comté a une identité marquée. Ce sont les Francs-Comtois qui sont les plus critiques. Ils ont dû ressentir un sentiment de déclassement par rapport à la situation d’avant où ils avaient des institutions qui les représentaient.

La hausse de la taxe de la carte grise pour mettre tout le monde au même niveau a été très mal vécue par les Francs-Comtois. Les Bourguignons ne sont pas gagnants non plus. 

Peut-on imaginer une séparation des deux entités ?

R.M : On n’est pas arrivé au niveau du Grand-Est mais la Bourgogne-Franche-Comté fait partie des régions où il y a des déclarations publiques de sécession. Elle apparaît comme une région qui n’a pas réussi à créer suffisamment de liens.

Ça peut aller loin, quand des élus font de telles déclarations. La fracture est réelle, l’opinion publique suit aussi. C’est un espace régional qui ne fonctionne pas. Est-ce qu’il faut continuer ? Ou revenir à des espaces régionaux plus réduits mais qui correspondent sans doute mieux au système des deux régions ?  C’est l’État qui décidera au final. Si on fait ça pour la Bourgogne-Franche-Comté, les autres régions vont s’y engouffrer. C’est toute la carte qu’il faut redessiner.

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