Violences conjugales, quand des hommes témoignent : "ça m'a totalement vacciné, c'est fini !"

En Bourgogne, des centaines de dossiers pour des faits de violences conjugales sont traités chaque année. Des groupes de paroles pour les auteurs de ces violences existent. A quoi servent-ils ? Sont-ils efficaces ? Nous avons recueilli le témoignage de certains qui participent à ces thérapies.

"C’est comme si on lâchait une soupape d’une cocotte-minute, la pression saute en nous". Ces groupes de paroles pour auteurs de violences conjugales, c’est comme cela que cet homme de 45 ans les décrit. Vous ne verrez pas son visage, vous ne saurez pas son vrai nom. Il souhaite rester anonyme. Depuis maintenant 2 ans, il participe à un groupe organisé à Dijon par l’association Althéa.

Lui a été violent avec sa femme il y a 2 ans. Puis il a suivi un groupe de paroles. "On parle de violences, on parle de choses dures", témoigne-t-il. Dans ce groupe organisé à Dijon, il y a une dizaine de participants à chaque séance. "On a toujours un peu tendance à mieux voir le problème chez les autres. Quand on écoute les autres, on trouve des solutions par effet de miroir. Et aussi grâce aux thérapeutes".
 
► Le témoignage complet de cet homme
Mais ça n’a pas fonctionné. Après un an de thérapie, il a de nouveau été violent. Il a écopé de 4 mois de prison avec sursis et a été obligé d’assister à un groupe de paroles pendant plusieurs mois. Aujourd’hui, il assure être allé plus loin dans la thérapie. Même s’il a conscience d’une chose : "il n’y a pas de baguette magique. Dès qu’on sent que la tension monte, il faut s’échapper. Quand il y a le feu, on ne cherche pas d’où vient le feu, il faut s’en aller du feu", témoigne celui qui est toujours avec sa femme aujourd’hui.

Pendant ces groupes de paroles, l’homme de 45 ans s’est aussi rendu compte d’où venait cette violence.
 

Je vais vous dire quelque chose de bizarre. Ces deux thérapeutes ont un peu le rôle de mes parents. Ils n’ont jamais été trop là pour moi, d’où cette violence qui est en moi. J’ai été un peu livré à moi-même. Ces deux thérapeutes nous apprennent la normalité, le respect, à dévoiler nos émotions. Ce qui fait que tout parait nettement plus simple.

 

"Ça m’a totalement vacciné, c’est fini"


Pour cet homme, comme pour d'autres, des groupes de paroles sont organisés un peu partout dans la région. En Côte-d’Or, c’est l’association Althéa qui s'en charge. Dans l’Yonne, Prologues met en place ces groupes depuis le début de l’année à Auxerre ou encore à Migennes.

Un homme a accepté de nous parler face caméra : Sébastien, 45 ans. Lui c’est une toute autre histoire. Il assure avoir "bousculé" sa femme une seule fois, il y a 6 mois. Aujourd’hui, ils sont encore ensemble. Lui aussi estime qu’écouter les autres lui permet de progresser, de prendre conscience de cette violence. "Ça m’a totalement vacciné. Dans un couple, il y a toujours des histoires. Mais maintenant si je vois que ça chauffe, je ne vais pas lever la main sur ma femme. C’est fini", confie-t-il, en remerciant sa femme de l’avoir poussé à aller dans un groupe de paroles.

► Le témoignage complet de Sébastien, 45 ans. 
Début décembre, cet habitant de l’Yonne a participé à la dernière séance à laquelle il devait aller, à Migennes.
 

70 personnes suivent ces thérapies dans l’Yonne


Pour la thérapeute de l’association Prologues, qui suit cet homme dans les groupes de paroles,  ne devrait pas récidiver : "Le choc a été fort. Et il a compris. Alors que quand il était arrivé dans le groupe, il n’avait pas compris", explique Claire Calosci.

Cette association organise ces groupes de paroles depuis le début de l’année. Plus de 70 personnes, auteurs de violences conjugales, sont passées par là. "On ne peut jamais savoir si ça a vraiment des effets concrets tout de suite. Pour l’instant, nous n’avons eu aucune récidive. Mais il ne faut pas chanter cocorico", tempère la thérapeute.


Le reportage de Valentin Chatelier, Dalila Iberrakene, Claude Heudes, Baziz Djaouti, Samuel Verrier et Lucas Clerc
  

400 dossiers de violences conjugales en Côte-d’Or


En Côte-d’Or, sur les 400 dossiers de violences conjugales reçus par le parquet depuis le début de l’année, 50 auteurs ont été dirigés vers des groupes de paroles.

Mais cela fonctionne-t-il vraiment ? Difficile de savoir, car aucune étude n’a pour l’instant été menée dans la région. Le procureur de la République de Dijon est favorable à ces thérapies.
 

Au niveau national, des études existent. Elles permettent de dire que globalement un auteur pris en charge avec ce type de travail thérapeutique présente moins de risques. Donc j’y crois profondément et ces groupes de paroles me semblent vraiment utiles.


Cette question du suivi des auteurs intéresse également le gouvernement. A l’occasion du Grenelle sur les violences conjugales, Edouard Philippe a annoncé une mesure dans ce sens. Un appel à projets sera lancé en 2020 pour la création de centres de prise en charge psychologique pour les auteurs de violences conjugales. L’objectif est d’en créer deux dans chaque région et de baisser le risque de récidive.
 
 
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