Construire sa maison à partir de containers, c’est possible. Florent et Capucine l’ont fait, en Franche-Comté. Six contenants ont servi pour construire le domicile de leurs rêves à Franois, près de Besançon. Le projet leur a pris deux ans : ils viennent d'emménager. Visite.
Vivre dans des containers, ça vous tente ? C’est ce mode de construction qu’ont choisi Florent et Capucine, près de Besançon (Doubs). Le couple de trentenaires a entièrement conçu son domicile, grâce à six de ces contenants. Transportés sur des bateaux, ces modules convoyaient des marchandises autour du monde : les voilà désormais reconvertis dans une seconde vie, à Franois. Une commune très éloignée de la mer et de l'océan ! Le rendu final donne une maison de 170m2, bâtie par ces Francs-Comtois avec l'aide de leurs proches. La jeune femme et le jeune homme y vivent depuis ce mois de mai. C'est l'aboutissement d'un projet imaginé deux ans auparavant.
Déclic par la télévision
Prenez un agent immobilier de 30 ans et une infirmière de 29 ans, tous deux originaires de Dole (Jura). Ajoutez leur passion pour le bricolage et la décoration. Laissez infuser leur imagination : vous obtenez une maison aux allures originales. Le petit écran a contribué à l'inspiration du couple anciennement installé à Besançon, près de la Polyclinique de Franche-Comté. « Le déclic est venu d’une émission sur les maisons insolites que nous avions vue en 2019 », se souvient Florent.
Au printemps 2019, Florent et Capucine prennent 4 à 5 mois pour se documenter sur le sujet. "Il y avait bien sûr cette émission comme point de départ, mais aussi le livre « Construire sa maison container » qui nous a aidés, les maisons construites sur le même modèle, aux Pays-Bas par exemple, sans compter Instagram", décrit le couple. Pour ces anciens Bisontins, c'est donc décidé : leur maison sera faite de containers. "Ça a un côté fun, rapide, pas cher, et en plus il n'y a pas beaucoup de travaux de maçonnerie à faire", argumente Florent.
Neuf mois de construction
Ce projet qu'ils ont fait vivre sur leur compte Instagram, n'a pas été aussi facile à mettre en oeuvre, dans le réel. Si le couple a eu la main notamment sur les plans de construction, il n'a en revanche pas eu le choix pour le terrain, du moins au début. "On voulait d'abord s'installer à Avanne, mais les règles d'urbanisme dans cette ville interdisaient les maisons à toit plat", déplore le duo. Nous sommes alors en juillet 2019. Le couple doit alors trouver un autre terrain. Florent et Capucine trouvent une annonce, pour un terrain à vendre, cette fois du côté de Franois. Ils achètent ce terrain de 800m2.
C'était sans compter l'opposition de la mairie, dans un premier temps. Les deux amoureux doivent prendre rendez-vous avec les équipes municipales de Franois, un soir de septembre 2019. "Au début, le service de l'urbanisme à Franois n'était pas emballé du tout par notre projet. Il a fallu entre-autres leur expliquer, qu'extérieurement la maison n'a rien de différent par rapport aux autres", se rappellent-ils. Heureusement, leurs explications suffisent à convaincre la ville de Franois.
Ils obtiennent le permis de construire, juste avant le début du premier confinement de 2020. Sauf que les entreprises ne peuvent travailler, avec cette interdiction quasi-générale des déplacements. La construction ne commence réellement que début juin 2020. La livraison des six containers, depuis Marseille, se fait le 6 juillet 2020. Le terrain commence ensuite à être creusé. Il faut en effet créer un "vide sanitaire", pour pouvoir installer les tuyauteries. Des poutres sont posées, pour surélever la maison. Il faut ensuite remettre la terre en place, pour combler.
Vient ensuite le temps de découper les parois intérieures des containers : il ne faut former qu'un seul ensemble. Les tôles découpées sont ensuite placées sur les faces extérieures. Elles font partie des quatre couches servant à isoler les containers. "On a mis quatre couches pour l'isolation. Il y a d'abord les tôles fines du container, mais aussi du polyuréthane, comme dans les frigos. Ces deux composants gardent bien le chaud et le froid. Il y a aussi de la laine de bois, puis le placo", expose Florent.
Ils ont pris le temps de bien réfléchir à l'isolation : c'est une caractéristique importante. Elle permet à toute maison de résister aux assauts de la météo. Dans le cas de notre couple, elle est aussi essentielle, pour pouvoir assurer le passage des communications. Comme le rappelle Florent, le container a été traité : "S'il était laissé tel quel, les ondes ne passeraient pas, et on n'aurait pas accès aux connexions téléphoniques et internet".
Une fois le sol posé et lui aussi isolé, Florent et Capucine posent les baies vitrées et les portes. Ils font le choix de peindre les intérieurs, en gardant les plafonds d'origine, pour préserver l'aspect authentique. Ce sera peinture blanche à l'intérieur, et bleue pour l'extérieur.
Les pièces sont ensuite délimitées. Deux containers servent à loger une cuisine, une salon et un séjour. Une autre paire contient le bureau, les trois chambres ainsi que les salles de bain. Les deux derniers modules sont aménagés comme un studio, qu'ils comptent louer, et un garage. Ne reste plus que la dernière touche : installer le revêtement extérieur de la maison. Ils ont choisi du bois : "du mélèze", précisément.
Le couple a voulu valoriser au maximum les matériaux utilisés. Outre les tôles intérieures découpées et réutilisées, il a aussi fait installer une cuve de 5.000m3. Son but : recueillir les eaux de pluie, pour les installations sanitaires et la machine à laver ou pour arroser le jardin. Les plaques d'immatriculation des containers ont été conservées. "On a restauré les plaques : les inscriptions ont été recolorées avec de l'encre de Chine. Puis on en a fait des tableaux décoratifs, pour montrer l'histoire de ces containers"
Le temps de la récompense
Florent et Capucine voient finalement la fin du tunnel, en mai 2021. Ils emménagent dans leur 170m2. Le couple dispose d'une maison de 145 m2, puis d'un studio et d'un garage de 15 m2 chacun. Les travaux sur la maison elle-même leur ont coûté 145.000 euros, sans compter le prix du terrain (100.000 euros) et le transport des containers (18.000 euros). Quant à leurs dépenses en eau chaude, chauffage et électricité, elles se chiffrent à 50 euros par mois.
Au final, ils n'en tirent que du positif. "La maison est installée dans un endroit calme, comparé à l'endroit où nous étions avant. C'est un énorme avantage, parce que je travaille de nuit, en horaires décalés", s'enthousiasme Capucine. Pour Florent, "la maison est exposée plein sud et lumineuse, c'est super bien".
La maison est plutôt bien accueillie, dans l'ensemble. Elle suscite même l'intérêt de médias nationaux, comme Les Echos ou encore Loopsider, attirés par leur demarche. Côté voisins, Florent se souvient avoir entendu que "c'est bien d'avoir des gens qui innovent et qui sont créatifs". Il est vrai que les curieux s'aventuraient déjà sur le terrain acquis par le couple, avant même le début de la construction. "Les gens n'hésitaient pas à rentrer dans les containers", confie le trentenaire.
Seuls quelques réfractaires se permettent des commentaires négatifs, d'après Florent : "On a entendu des « On se croirait à Dunkerque (NDLR : au port de Dunkerque) », « c'est juste une maison tendance, ça ne va pas durer »". Quelques ombres qui ne gâchent pas la joie des deux amoureux. Dans les semaines à venir, ils doivent installer une piscine, à côté de leur habitation. Histoire de pouvoir répondre à leurs envies, et qu'ils puissent nager dans le bonheur.