Au lac de Grosbois-en-Montagne, plus de buvette ni de maîtres-nageurs : "Je regrette que ça finisse comme ça"

Le réservoir de barrage de Grosbois-en-Montagne, près de Sombernon, passe en “baignade non surveillée”. Un choix contraint, que déplore la mairie de Grosbois.

L’information est parvenue par un communiqué. “La baignade ne sera plus surveillée sur le site de Grosbois-en-Montagne”, indique Voies navigables de France, le propriétaire du réservoir de barrage. “La baignade demeure autorisée, mais elle se fera sous la responsabilité directe des baigneurs et donc à leurs risques et périls.” 

Mais cet arrêté, pris par la mairie de Grosbois-en-Montagne (Côte-d'Or), cache un autre dossier : celui de l’aménagement de la plage de Grosbois, une affaire douloureuse pour la municipalité.

Un projet trop ambitieux

Pour comprendre, il faut remonter quelques années en arrière. Jusqu’en 2021, le réservoir de Grosbois, lieu prisé des Dijonnais et de nombreux Côte-doriens en week-end, accueille les visiteurs avec une guinguette-snack et un poste de secours, où se relaient deux maîtres-nageurs pendant l’été.

La communauté de communes Ouche et Montagne, elle, nourrit de plus grands projets pour Grosbois. Elle lance un ambitieux plan d’aménagement de la plage, comprenant notamment un restaurant de 60 couverts, ouvert midi et soir toute l’année. Sûre d’elle, la Comcom entreprend même de démonter les bâtiments en place (buvette et poste de secours) en prévision des nouvelles constructions au début de l'été 2022.

"L’attractivité du site de Grosbois n’est plus à démontrer avec une fréquentation de près de 2 500 personnes par jour en période estivale et de 35 000 personnes sur l’année. Un projet d’aménagement touristique à Grosbois-en-Montagne avait donc été envisagé afin de valoriser le site", nous décrit la Comcom.

"L'avant-projet a été validé en juin 2019 pour un montant total hors taxes de 1 568 920 euros et un reste à charge prévisionnel d'un montant de 313 785 euros. Le projet était financé avec le concours de différents partenaires (75 % d'aides) : l'Etat, le Département et la Région", précise la ComCom. En 2021, le projet sera validé avec un montant équivalent à l'avant-projet et un permis de construire est accordé par la mairie de Grosbois. 

Mais en juillet 2022, tout s’effondre : le projet est rejeté à une large majorité. Une trentaine de voix contre, une petite dizaine de voix pour et autant d’abstentions. “Moi-même, j’ai été très surpris par le nombre de refus”, avoue le maire de Grosbois-en-Montagne Jean-Paul Boulère, “même si je trouvais que le projet était très ambitieux."

"La première délibération, inscrivant dans le schéma de développement touristique le projet d’aménagement de Grosbois, date de 2017. S’en sont suivies 13 autres délibérations comptant entre 42 et 50 votes favorables au projet (y compris le maire de la commune)", répond de son côté la ComCom.

"À l’époque, le terme “pharaonique” avait été employé.”

Jean-Paul Boulère

maire de Grosbois-en-Montagne

L'inflation va faire monter les coûts à près d'1,9 millions d'euros. "En conséquence, le restant à charge pour la Communauté de Communes a donc vu son montant augmenter. Autre facteur, le programme LEADER (fonds européens), sollicité par la collectivité, a été refusé".

Le coût est trop difficile à supporter pour une communauté de communes par ailleurs déjà en difficulté financière : en novembre 2022, il manquait 850 000 euros à l’intercommunalité pour boucler son budget 2023. D’autres coupes budgétaires avaient alors été décidées : la suppression du portage de repas, la fermeture d’une crèche notamment (voir notre sujet). 

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851 000 euros : c'est la somme qui manquait à l'intercommunalité Ouche et Montagne pour boucler son budget 2023. Pour faire des économies, elle a décidé de supprimer notamment le portage des repas pour les ainés et de fermer une crèche. Une quarantaine d'emplois sont menacés. Reportage au conseil communautaire de Lantenay. ©Sylvain Bouillot / Olivier Meyer / Noé Leduc

Trop chère reconstruction

Du coup, en janvier 2023, la Comcom a décidé de rendre le dossier de l’aménagement de la plage à notre commune”, explique Jean-Paul Boulère. “Sauf qu’on a pas les moyens financiers d’aménager quoi que ce soit.

En effet, pas question d’imaginer reprendre le projet “pharaonique” voulu initialement par la Comcom. Mais impossible aussi de revenir à l’ancienne formule plus modeste “buvette et poste de secours” : comme les bâtiments ont été démontés, il faudrait les reconstruire… “Ça représenterait un billet entre 50 000 et 100 000 euros et notre petite commune ne peut pas non plus l’assumer”, se désole Jean-Paul Boulère.

L’élu a bien envisagé de ne reconstruire que la buvette, pour maintenir un service de restauration sur place. Il avait même trouvé un repreneur. “Mais on m’a fait remarquer que si je rouvrais un chalet de restauration, les gens allaient venir. Et avec beaucoup de monde, il aurait fallu rouvrir aussi le poste de secours et payer des maîtres-nageurs. Financièrement ce n’était pas possible.”

Face à ce serpent qui se mord la queue, le projet de l’aménagement de la plage de Grosbois a donc été gelé. “Je regrette que ça finisse comme ça”, déplore le maire

“On nous a expliqué pendant des années que Grosbois était un site emblématique."

Jean-Paul Boulère

maire de Grosbois-en-Montagne

“Maintenant, ceux qui voulaient voir le site de Grosbois rendu à la nature sont contents, mais pas ceux qui, comme moi, appréciaient d’aller manger un bout les soirs d’été au bord du lac.” 

De son côté, la Communauté de Communes conteste le caractère "pharaonique du projet". "Il est à noter que les projets d’aménagement de sites touristiques aux alentours s’élèvent régulièrement entre 2 000 000 et 3 000 000 d’euros (Venarey-les-Laumes, Pont-et-Massène, Les Settons)."

L'aménagement de la plage relancé en 2026 ?

Pour l’heure, aucune perspective de relance du projet n’est à l’étude. Jean-Paul Boulère se projette à plus long terme : “Mon espoir, c’est qu’après les élections de 2026, le nouveau conseil communautaire s’empare à nouveau du dossier.”

En attendant donc, la baignade se fera aux risques et périls des baigneurs, qui devront aussi penser à apporter leur propre pique-nique. VNF, propriétaire du réservoir, rappelle dans son communiqué du 25 mai : “Ce site est un ouvrage hydraulique toujours en service et n’est pas initialement destiné à la baignade. Ainsi, si les conditions de baignade ne sont pas respectées, les individus sont confrontés à des risques notamment de noyade et de chute mortelle.

VNF cite notamment les objets invisibles à la surface (blocs de béton, pieux, roches), la faible profondeur de l’eau et le risque d’hydrocution. “Il demeure donc strictement interdit de sauter depuis un pont ou un barrage et de se baigner en dehors des zones autorisées.” Et d’inciter à se rendre dans d’autres lieux de baignade, “surveillés et aménagés pour les baigneurs” : le lac de Pont-et-Massène et le lac de Panthier.

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