Un tableau exceptionnel du Moyen Âge, découvert par hasard à Dijon, va être vendu aux enchères

Un tableau du XIVe siècle, peint par un grand peintre de Bohême, a été découvert dans une maison de Dijon. L’œuvre, dont les propriétaires ne soupçonnaient pas la valeur, est estimée entre 400 000 et 600 000 euros. Elle va être vendue aux enchères samedi 30 novembre.

Mise à jour : l'œuvre a été adjugée 5 millions d'euros aux enchères ce samedi 30 novembre à Dijon


La Vierge et l'enfant en trône, c'est le nom du tableau de petite taille (26 cm sur 20 cm) qui a été découvert dans une maison de Dijon par une famille qui n'en voyait pas la valeur. "À l'occasion d'un tri dans leur mobilier, ils ont déposé un certain nombre de choses à l'étude, raconte le commissaire-priseur Hugues Cortot. C'était dans la famille depuis manifestement plusieurs générations sans que personne n'y ait porté un intérêt particulier."
 

 

Qui a peint La Vierge et l'enfant en trône ?

Le visage de la Vierge est peint avec finesse. Par ailleurs, les gestes très naturels de l'enfant Jésus qui tient le pouce de sa mère d'une main et son pied de l'autre sont remarquables. L’œuvre peinte sur un panneau de bois fruitier a été réalisée vers 1350.

"Le tableau est de toute petite taille avec un dos extrêmement raffiné. Un dos qui est sur une petite toile collée et qui imite le marbre. En fait, c'est pour donner l'idée que ce tableau était extrêmement précieux, autant par la face que par le revers. On peut imaginer que c'est quelque chose qui s'adressait à des gens de la très haute aristocratie ou de la cour", décrypte Stéphane Pinta, expert du cabinet Turquin dans une vidéo de présentation de l'œuvre.

Au dos du tableau, on peut lire les premières lettres du mot Cimabue. Cette attribution aurait été rajoutée au XIXe siècle. Mais, le tableau n'est pas un Cimabue, même si le style est proche de celui du grand peintre primitif italien Ceno Di Pepo, dit Cimabue (1272-1302).

Les experts ont mené un travail laborieux et difficile pour attribuer ce tableau à l’artiste qui l’a réalisé. Elle est due à un grand artiste de Bohême peu connu en Occident : le maître de Vissy Brod (aussi connu sous le nom maître de Hohenfurth, du nom allemand de la ville de Vyšší Brod, en République tchèque).
 


Une œuvre complexe révélée par rayons X

L'expertise a permis de découvrir une œuvre bien plus complexe sous le fond noir (un repeint postérieur du XIXe siècle) qui encadre la Vierge et l'enfant. "La radiographie a montré que sous ce repeint noir, il y a une très belle composition. La suite du trône qui est celui de la Vierge. Et on comprend beaucoup mieux l'ensemble de la composition lorsqu'on refait ce montage avec ce que l'on voit aujourd'hui et ce qui est sous-jacent", détaille l'expert du cabinet Turquin.

"Ça avait été probablement masqué pour recentrer le sujet. Puisqu'en fait derrière on voit bien qu'il y a des grandes arcatures, une fenêtre grillagée à droite, des pylônes à gauche. Peut-être quelque chose qui avait tendance à disperser un peu plus l'oeil et qu'on a voulu au XIXe siècle recentrer sur le sujet principal."

Le futur acquéreur pourra décider de se lancer ou non dans une restauration. et faire réapparaître le fond d'origine, si tant est qu'il est en bon état.
 
 

Une vente inédite

Il y a très peu d'œuvres connues de ce maître. "On parle de moins de dix œuvres identifiées comme étant de sa main", indique Hugues Cortot, le commissaire-priseur qui mènera de la vente. C'est la première fois qu'une œuvre de ce maître passe aux enchères."

Il était donc difficile de réaliser une estimation, en l'absence d'équivalent. Le cabinet d'expertise a fixé la fourchette de 400 000 à 600 000 euros grâce notamment à la base de données dont il dispose sur les primitifs.

"Le cabinet Turquin est celui qui a travaillé sur le Caravage dont on a beaucoup parlé cette année, rappelle Maître Cortot. C'est également eux qui ont travaillé sur la vente du Cimabue, dont on a également beaucoup parlé. Donc ils sont vraiment au cœur de l'actualité pour les tableaux anciens. Et c'est eux qui font référence en la matière. Ils ont une notoriété désormais internationale, ils font un travail extraordinaire."
 

Cette estimation est justifiée par la rareté de l'œuvre, son ancienneté et sa qualité. Vous allez me dire ça fait cher du centimètre carré, j'en conviens. Mais il ne faut pas perdre de vue que le maître de Vissy Brod, bien que son œuvre soit restreinte, est un grand maître du gothique international, considéré comme tel par les historiens d'art. Certes on ne connaît pas son nom, mais ce n'est pas un anonyme pour l'histoire de l'art. Donc c'est ce qui justifie aussi l'importance de l'estimation.
Hugues Cortot, commissaire-priseur

 

Qui pourrait acheter cette œuvre ?

Parmi les acheteurs potentiels, on retrouve des particuliers comme des établissements internationaux (musées ou fondations), selon Maître Cortot. "On a beaucoup de demandes qui émanent de la République tchèque. Ce n'est pas vraiment une surprise qu'ils s'intéressent à leur patrimoine. Et puis on a également un certain nombre de demandes de l'international. Il y a relativement peu de Français sur les rangs, c'était un peu à prévoir", indique le commissaire-priseur.

"Pour l'instant on est à quelques jours de la vente. On a beaucoup de demandes de renseignement, de questions sur le déroulement de la vente. Mais tout le monde se dévoile un peu au dernier moment."

Certains ont même prévu de faire le déplacement à Dijon samedi 30 novembre pour enchérir. Les autres pourront faire monter les prix par téléphone, mais pas par Internet. "La vente sera retransmise en live pour permettre aux gens que ça intéresse de suivre la vente. Mais il n'y aura pas d'enchères prises en live pour des raisons de sécurité et de garantie."
 
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