"J’ai perdu mon frère, je ne veux pas perdre le reste de ma famille", témoignage d’un Afghan réfugié à Dijon

Baquir, réfugié afghan qui vit à Dijon (Côte-d'Or), constate avec horreur la situation dans son pays d'origine. Le jeune homme œuvre au rapatriement de sa famille en France, alors qu'il a déjà perdu son frère âgé de 20 ans, tué par les talibans.

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Baquir* a quitté l’Afghanistan pour la France en 2015. Installé à Dijon (Côte-d’Or), il dirige sa petite entreprise d’installation de fibre optique après avoir été un temps traducteur. Le jeune homme de 31 ans devrait recevoir en novembre prochain une convocation pour lancer son processus de naturalisation. C’est depuis la France métropolitaine qu’il assiste, impuissant, à la prise de pouvoir des talibans dans son pays d’origine. Sa famille, elle, est bloquée à Kaboul, la capitale qui est tombée ce dimanche 15 août.

"La situation de ma famille est catastrophique. Je m’inquiète vraiment. C’est vraiment compliqué. Ma famille est cachée dans sa maison, elle ne peut pas sortir", confie Baquir qui vient de perdre son jeune frère âgé de 20 ans, tué par des forces talibanes. Le réfugié se préoccupe du sort de son père, de ses trois sœurs et de ses deux autres frères, dont certains travaillaient avec l’État qui vient d’être renversé.

La crainte des exactions commises par les talibans

"J’ai perdu mon frère. Je ne veux pas perdre mes sœurs, mon père et le reste de ma famille", explique-t-il. Dans les territoires qu’ils ont repris dernièrement, les talibans sont accusés d’avoir tué de nombreux civils, enlevé des adolescentes pour les marier de force à des militaires ou assassiné des femmes qui travaillent dans le droit ou la politique. À la tête du pays entre 1996 et 2001, les talibans avaient interdit aux femmes de sortir, de travailler ou d’aller à l’école.

Alors que 45 ressortissants sont ramenés en France aujourd’hui, Baquir œuvre au rapatriement de ses proches en Côte-d’Or. Ce mardi 17 août, il a adressé une demande au ministère de l’Intérieur. Mais comme de nombreux réfugiés, il se heurte à des freins administratifs, ses proches ne travaillant notamment pas pour des structures françaises en Afghanistan. "On m’a dit qu’on ne peut pas prendre le dossier de ma famille comme une situation d'urgence. Il n’y a pas de bureau pour traiter les dossiers le plus vite possible", regrette-t-il.

Ils m’ont dit qu’ils ne savaient pas quand ils pourraient répondre. Que cela pouvait prendre 3 – 4 mois. Moi, je cherche une solution urgente.

Baquir, réfugié en France

En attendant de trouver une solution, Baquir tente de maintenir au maximum le contact avec ses proches, mais les moyens de communication en Afghanistan sont limités et les réseaux téléphoniques particulièrement instables. La nation fait partie des pays les plus pauvres du monde, avec un PIB de 500 dollars par habitant d’après la Banque mondiale.  

"Aujourd’hui, j’ai essayé d’appeler chez moi. Ils m’ont dit que là-bas, il n’y avait plus de carte de crédit pour charger la carte SIM du téléphone et avoir du réseau. Il n’y a rien là-bas. J’ai réussi à les avoir, mais je ne sais pas pour demain, après-demain… On n’a pas de moyen pour parler".

"Les talibans ont tiré des balles sur ma voiture"

Si Baquir se montre particulièrement préoccupé par la situation dans son pays, c’est parce qu’il connaît la violence des talibans. Travaillant en Afghanistan en tant que traducteur auprès de clients américains et anglais, il a subi les méthodes des membres du groupe extrémiste à l'époque où il vivait dans le pays.

"J’ai été attrapé et menacé. Une fois, en sortant de mon travail et en rentrant chez moi, c’était à peu près vers 20h00 du soir, les talibans ont tiré des balles sur ma voiture", se rappelle le réfugié.

Retrouvez ci-dessous le témoignage de deux autres réfugiés afghans qui vivent en Bourgogne. Reportage de Valentin Chatelier et Claude Heudes

©Valentin Chatelier

C’est cette scène violente qui a poussé Baquir à fuir son pays et à se réfugier en France. "Je suis allé en Turquie, puis j’ai pris le chemin pour venir en France", décrit-il. Le jeune Afghan de 31 ans rêve désormais de réunir l’ensemble de ses proches autour de lui et de les savoir en sécurité en France.

*le prénom a été changé

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