Floriane Burgy, étudiante en médecine et sportive avertie, cumule les gardes de 24h et la préparation d'un tour de France à vélo féminin. Elle participe au projet Donnons des Elles au vélo qui contribue à ouvrir la compétition de haut niveau pour les femmes et dénonce un milieu machiste.
Les murs sentent la peinture fraîche. Le café chauffe doucement dans la cuisine. C'est un mardi déguisé en dimanche. Pourtant, la tranquillité affichée par Floriane Burgy n'est que de façade.
Cette jeune femme de vingt-quatre ans partage sa vie entre ses études de médecine et sa passion pour le sport.
Depuis peu, elle s'est lancée dans le projet Donnons des Elles au vélo. 13 femmes cyclistes, dont Floriane Burgy, réaliseront la Grande Boucle, un jour avant les hommes.
Les sportives pédaleront 3500 kilomètres en 21 étapes du 5 au 27 juillet 2019 (la course masculine commence le 6 juillet). Cela représente environ 200 kilomètres par jour.
"Cette course n'est pas compétitive. Le but, c'est de montrer que les femmes sont capables de réaliser cette épreuve et qu'elles ont autant de mérite que les hommes", explique Floriane Burgy.
France 3 Bourgogne
Vendredi 8 mars, journée internationale des droits des femmes. Rencontre avec Floriane Burgy, qui milite contre le sexisme dans le cyclisme. Plus d'informations : https://bit.ly/2HkGnQu
Être une femme dans le milieu cycliste
Floriane Burgy est sportive depuis toujours. Elle réalise des trails en montagne, pratique la course à pied et est inscrite dans un club d'escalade qu'elle fréquente chaque semaine. Être une femme dans ces domaines sportifs ne lui a jamais posé problème. Jusqu'à ce qu'elle enfourche un vélo.C'est un cycliste occasionnel croisé dans une côte qui lui lance : "Tu ne pourras pas arriver en haut." C'est le marché du vélo qui ne propose pas de bécanes adaptées à la morphologie féminine. Ce sont encore les grands décideurs du milieu qui refusent d'ouvrir le Tour de France au "deuxième genre".
Les filles ne représentent que 10% des licenciées à la Fédération Française de Cyclisme (FFC)
Elle ne s'attendait pas à faire face à un tel sexisme. En Bourgogne-Franche-Comté, seulement deux courses sont ouvertes à la compétition féminine contre une pléthore pour les hommes. C'est trop peu pour progresser. Floriane Burgy participe donc à d'autres courses, cette fois mixtes.
"C'est écrit mixte mais c'est seulement sur le papier", constate la sportive. "Une fois rendue à la compétition, je suis la seule femme. Le rapport de force est totalement déséquilibré."
Le problème majeur pointé du doigt par Floriane Burgy est le vélo lui-même. Comme les hommes sont sur-représentés dans ce sport, les constructeurs produisent exclusivement des vélos adaptés à la morphologie masculine.
Ces vélos non adaptés aux femmes créent de multiples problèmes pour les sportives qui passent une dizaine d'heures par semaine sur la selle : kystes, frottements, douleurs au niveau du bassin et parfois problème sur le nerf pudendal, pouvant susciter des complications lors de l'accouchement.
Seule la marque Liv, sponsor du projet Donnons des Elles au vélo, travaille avec des ingérieures et des dessinatrices qui réalisent des bécanes adaptées à la morphologie féminine.
"Le sport est le mal du 21ème siècle."
Dès son plus jeune âge, ses parents la poussent à pratiquer une activité physique. Elle ne s'arrêta jamais. L'étudiante en médecine considère le sport comme indispensable au bon fonctionnement du corps humain.
"Le sport est le mal du 21ème siècle. En médecine, on constate qu'il y a un réel problème par rapport au sport. Or, c'est extrêmement important pour la santé physique et mentale. Le sport prévient de nombreuses pathologies cardio-vasculaires."
Courir à vélo... et dans les couloirs de l'hôpital
Floriane Burgy est interne en médecine physique et réadaption, une spécialité créée en 2010. Elle s'occupe des accidentés de la route, des victimes d'AVC et des personnes amputées. Actuellement en stage aux urgences du Creusot, en Saône-et-Loire, elle a dû prévenir ses collègues et ses responsables de sa participation au projet Donnons des Elles au vélo."On fait des journées de 24 heures. Je vais m'entraîner sur mes jours de repos. C'est pas tous les jours facile, surtout quand on doit aller s'entraîner dehors l'hiver et qu'il fait zéro degré. J'ai eu des moments de solitude", reconnait Floriane Burgy.
Pour l'aider à gérer son planning, l'étudiante est suivie par un coach. "J'ai toujours cette sensation d'être à cheval entre fatigue et besoin d'être en forme pour l'entraînement. Mon coach m'aide à gérer ça."
"Le sport permet de réfléchir à sa condition d'être humain, à la vie, à la mort"
Quand Floriane quitte ses casquettes d'étudiante en médecine et de sportive de haute voltige, elle revient sur les raisons, plus personnelles, qui la poussent à pratiquer une activité sportive.
"Le sport me permet de m'évader. J'aime aussi partir en solitaire, à la montagne, munie simplement de mon sac à dos. Le sport permet de réfléchir à sa condition d'être humain, à la vie, à la mort. Le sport me permet de me sentir vivante", confie-t-elle dans un sourire.