Le faucon pèlerin s'installe en plein cœur de Dijon et c'est "exceptionnel" : "la première fois depuis 50 ans qu'il niche en ville"

Longtemps disparu de notre région, le faucon pèlerin est un rapace encore rare en Côte-d'Or. Un couple s'est récemment installé en plein centre historique de Dijon, et a donné naissance à quatre jeunes. Un phénomène étonnant, qui passionne les observateurs.

Les ornithologues de Côte-d'Or savent qu'ils sont témoins d'un événement rare. Cette année 2024, pour la première fois en un demi-siècle, un couple de faucons pèlerins s'est installé et reproduit en plein centre-ville de Dijon, dans une anfractuosité de la cathédrale Saint-Bénigne. 

Il se nourrit à 90 % de pigeons

"C'est exceptionnel. C'est la première fois en 50 ans que le faucon pèlerin niche en ville en Côte-d'Or", salue Patrice Lacroix, bénévole pour la LPO (ligue de protection des oiseaux) et coordinateur du suivi des faucons pèlerins en Côte-d'Or. 

Le couple adulte a été observé pour la première fois autour du mois de mars. "On s'est rendu compte qu'il y avait eu un accouplement à la mi-mars." La nature a fait son travail... Et quelques mois plus tard, ce sont pas moins de quatre oeufs qui ont éclos.

Quatre jeunes, c'est exceptionnel. D'habitude, ce sont plutôt des portées de deux ou trois.

Patrice Lacroix

coordinateur du suivi des faucons pèlerins en Côte-d’Or pour la LPO

"Il faut dire que le garde-manger est bien rempli !" souligne Patrice Lacroix. Car le faucon pèlerin se nourrit d'oiseaux qu'il chasse en vol : merles, moineaux, et surtout pigeons, qui composent 90 % de son régime alimentaire. Et le centre-ville de Dijon représente une réserve inépuisable.

Le long chemin de croix du faucon pèlerin

Les bénévoles de la LPO se réjouissent d'autant plus que le faucon pèlerin a failli disparaître plusieurs fois au cours du siècle passé.

"Avant les années 40, le pèlerin avait quasiment disparu car prédaté par le hibou grand-duc", explique Patrice Lacroix. Le grand-duc, symbole de la ville de Dijon et surtout redoutable chasseur nocturne, niche dans les mêmes falaises que le faucon pèlerin. 

"Comme le grand-duc a été chassé par l'Homme, le faucon pèlerin est revenu dans les années 40", poursuit le bénévole de la Ligue de protection des oiseaux. Mais par la suite, d'autres facteurs vont drastiquement réduire la population de faucons pèlerins. 

"Il y a eu le DDT, jusque dans les années 70", rappelle Patrice Lacroix. Cet insecticide surpuissant, présenté comme un produit miracle, s'est avéré en fait être un redoutable "polluant organique persistant". Il a empoisonné les faucons adultes, rendant les oeufs très fragiles. Ils cassaient avant d'arriver à terme, empêchant les nouvelles générations de se développer. 

Les faucons pèlerins ont également été victimes du braconnage des fauconniers, "qui volaient les oeufs dans les nids pour alimenter le marché des rapaces domestiques en Allemagne". En 1975, il ne reste qu'un seul couple de pèlerins en Côte-d'Or.

En 1976, la France prend un arrêté de protection nationale des rapaces. Les faucons prospèrent à nouveau et reviennent... mais les hiboux grands-ducs aussi. "Ils sont revenus et ont mangé pas mal de pèlerins", note Patrice Lacroix. 

Dans les années 2000, on comptait une quarantaine de couples de faucons pèlerins en Côte-d'Or. Aujourd'hui, il y en a une petite vingtaine.

Patrice Lacroix

coordinateur du suivi des faucons pèlerins en Côte-d’Or pour la LPO

Ces couples sont répartis dans le Val-Suzon, l'arrière-côte (combe Lavaux, Fixin, Chambolle, Saint-Romain), ou encore autour de Flavigny-sur-Ozerain. "En 2023, un couple a niché dans le château de Grancey-le-Château. Mais d'ordinaire, ils nichent soit dans des falaises naturelles, soit dans les fronts de taille des carrières", explique Patrice Lacroix.

Le couple a "déménagé" de la campagne à la ville

C'est justement dans une carrière abandonnée qui jouxte le lac Kir de Dijon que le couple de faucons pèlerins de Saint-Bénigne résidait avant de "déménager" en centre-ville. "Le couple avait pris l'habitude de chasser en ville car il y avait des proies à disposition. Il a fini par venir autour de Saint-Bénigne." D'autant qu'à la carrière du lac Kir, les faucons devaient composer avec un voisin gênant : un couple de grands-ducs qui s'était également installé. 

À la cathédrale Saint-Bénigne, aucun prédateur pour déranger le faucon pèlerin. Le couple s'est installé dans un trou en hauteur d'environ 1 mètre par 1 mètre, dont l'entrée mesure environ 40 centimètres de large. À l'intérieur de l'édifice, ce nichoir donne sur un escalier. Un endroit tranquille et isolé, qui a permis au couple de donner naissance à quatre oisillons.

Observables jusqu'à la fin juillet

Depuis quelques semaines, les jeunes sont en pleine phase d'apprentissage. Ils ont commencé à voler hors de leur abri et iront progressivement de plus en plus loin. L'éducation se fait en plusieurs étapes, indique Patrice Lacroix, de la LPO : "D'abord, les adultes leur apportent des proies plumées, puis des proies non plumées, puis ils placent les proies de plus en plus loin pour inciter les jeunes à sortir."

Pour l'heure, au 10 juin, trois des quatre oisillons étaient déjà descendus sur les toits. Le quatrième, un peu à la traîne, "ne devrait pas tarder". 

La petite famille devrait rester dans les parages jusqu'à la fin juillet. Le temps pour les adultes de compléter l'éducation des jeunes, avec une étape cruciale : l'apprentissage de la chasse en vol. Ensuite, la nouvelle génération prendra son envol pour s'établir ailleurs dans le département... ou à Dijon !

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