"Même porteuse d'un handicap, on peut y arriver" : meurtrie après une agression, cette ex-infirmière devient Miss Beauté Bourgogne

Lucie Brouard a subi une grave agression sur son lieu de travail en 2021. Depuis quatre ans, elle ne peut plus travailler et a dû renoncer à sa vie d’avant. Mais elle a réussi à se reconstruire, malgré les angoisses et la dépression qui la guettaient. Portrait.

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C’est une histoire de résilience. “Quand j’ai fait mon discours devant 200 personnes, en disant que même en étant porteur d’un handicap on pouvait se réaliser, je me suis dit : c’est bon. Je suis cassée, mais je ne suis pas périmée”, sourit Lucie Brouard.

Cette Dijonnaise de 31 ans est, depuis septembre 2024, Miss Beauté Bourgogne - un concours ouvert à toutes les femmes, sans standard physique - et représentera notre région lors de l’élection nationale en novembre 2025. Une aventure salvatrice pour la trentenaire, qui revient de loin. 

"Mon cerveau s'est déconnecté"

En janvier 2021, Lucie, 27 ans, est infirmière au CHU de Dijon, au service de psychiatrie pour enfants. Depuis une semaine, le service héberge un adolescent autiste de 14 ans. Ce jour-là, il déclenche une “crise clastique” :  “C’est le moment où le surplus émotionnel fait que l’enfant ne gère plus rien. Les nerfs lâchent et ça explose”, explique Lucie.

L’adolescent attrape l’une des tresses de Lucie et se met à sauter du sol au lit. “Il me tenait les cheveux, j’étais comme un pantin. Jusqu’à ce que mes cheveux s’arrachent.” La scène dure quelques instants - “1 minute 30 maximum” - mais semble durer une éternité. Lucie dit avoir vécu une expérience de mort imminente : “Mon cerveau s’est déconnecté, je me suis éteinte pendant l’agression. Je l’ai ressenti comme s’il s’était écoulé cinq ou six heures. Je me voyais de loin, j’entendais tout de manière étouffée comme si j’étais sous l’eau, et j’attendais qu’il se passe quelque chose.”

J’ai pensé que j’étais décédée. Je me souviens m’être dit : “Merde, c’est ça quand on est mort ? Ça va être terriblement long."

Lucie Brouard

Immédiatement après l’agression, Lucie entre en “instinct de survie” et se met à l’abri. Puis ses nerfs lâchent. “J’ai pleuré. Et c’est là que la douleur est apparue.” C’est une entorse cervicale. Elle ne le sait pas encore, mais c’était son dernier jour de travail au CHU.

"Je suis passée d'une vie très active à : rien"

Quatre ans plus tard, les douleurs ne l’ont pas abandonnée. “C’est tout le long du cou, les cervicales, jusqu’aux trapèzes”, détaille-t-elle. “J’ai des douleurs somatiques, et un état d’hypervigilance. Quand j’entends un bruit un peu sourd, quelqu’un qui s’approche trop de moi, je me contracte.” Stressée en présence de foule et de bruit, elle ne fait plus ses courses au supermarché mais se fait livrer.

Lucie a aussi dû renoncer à ses loisirs : “Je suis passée d’une vie très active à : rien." 

Je faisais du roller-derby, c’est hors de question maintenant. Je faisais de la moto, maintenant je ne supporte pas le poids du casque. Je courais 10 kilomètres tous les trois jours, et au départ je ne pouvais pas marcher plus de 15 minutes…”

Lucie Brouard

Dans les semaines qui suivent son agression, la jeune femme sombre dans une grande détresse psychologique lorsqu’elle comprend que sa vie a changé. Impossible de retourner travailler : “Que va-t-il se passer le jour où un patient mal luné va me bousculer ?” Lucie se retrouve seule à la maison, livrée à elle-même. “J’ai un très grand vide à combler, alors je me remplis.” Elle déclenche des crises d’hyperphagie, qui lui font prendre 15 kilos. Elle perd confiance en son corps, se replie sur elle-même. Son compagnon est là pour elle, mais sa vie sociale se réduit drastiquement.

Leur projet de parentalité est aussi remis en question, eux qui souhaitaient fonder une famille "pile à ce moment-là". L'agression "a retardé" les choses. "Il a fallu que je fasse le deuil de la maman que je voulais être. Ça m'a pris pas mal de temps." Au final, leur petite fille naît en 2023. "Au final, elle m'a un peu sauvé la vie parce que la solitude était très, très compliquée à vivre."

L'aventure Miss Beauté Bourgogne, une révélation

C’est aussi là qu’arrive le concours Miss Beauté. Avant l’agression, Lucie faisait régulièrement des photos en tant que modèle. “La présidente de Miss Beauté les a vues, et m’a écrit pour savoir si je voulais me lancer.” Lucie décide de tenter l’aventure.

J'ai marché en talons alors que je n'en avais pas porté depuis des lustres, j'ai prononcé un discours devant 200 personnes. Je me suis un peu poussée à le faire... Et ça a été incroyable.

Lucie Brouard

"C'était la première fois depuis l'accident que je rencontrais des inconnus. Et la première fois de ma vie que je disais ouvertement que j'étais porteuse d'un handicap. C'était important."

Lucie remporte finalement le concours régional Miss Beauté Bourgogne, en septembre 2024. Elle défendra son titre lors de l'élection nationale, fin 2025. En attendant, elle sillonne la région pour participer à des événements, et faire passer son message. "Adoucir les jugements, et dire que même en étant porteur de handicap, on peut y arriver."

En parallèle, Lucie a entamé sa reconversion professionnelle dans l'arthérapie, une activité qu'elle proposait déjà ponctuellement en tant qu'infirmière au CHU. "Ce sont des séances de développement personnel pour travailler la confiance et l'estime de soi. De la création, peinture, dessin, collage... N'importe quelle activité manuelle dans laquelle on va s'investir, être concentré, dans une bulle." Elle a prévu d'ouvrir son atelier en septembre 2025.

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