Le 20 mars, après une fusillade dans le quartier des Grésilles à Dijon, les forces de l'ordre ont fouillé une résidence étudiante à la recherche d'un suspect. Le syndicat Solidaire Etudiants dénonce des "étudiants mis en joue par des armes de guerre". La police répond.
La recherche d'un suspect justifie-t-elle toutes les méthodes ? C'est la question posée par Solidaire Etudiants Dijon suite à l'opération du 20 mars dans la résidence Antipode, au Crous de l'Université de Bourgogne.
Dans un post sur les réseaux sociaux, le syndicat s'interroge sur ces fouilles. "Quel est le résultat ? Quel est l'effet recherché ?", avant d'estimer que ces opérations ont seulement permis de "terroriser la jeunesse."
Mercredi dernier, les résidences #CROUS ont été fouillées pendant plus de 3 heures !
— Solidaires Étudiant-e-s Dijon (@SESLDijon) March 26, 2024
Bilan: des personnes mises en joue par des armes de guerre, des chambres étudiantes retournées, pour quels résultats ???
"Viser juste, frapper fort" ?
Seule la jeunesse est terrorisée ici 🤮 pic.twitter.com/gfnxdj0HI7
Une version contestée par le commandant divisionnaire Pauget. Il explique quant à lui "qu'il n'y a pas eu d'étudiants terrorisés, aucune chambre n'a été retournée et aucun étudiant a été mis en joue." Il ajoute également que l'opération s'est déroulée d'une manière habituelle. "Il n'y a pas d'autres choix" explique
Mais, que s'est-il passé ce mercredi 20 mars ? Pour rappel, ce jour-là, une nouvelle fusillade a éclaté dans le quartier des Grésilles. Deux ou trois hommes ont ouvert le feu sur un guetteur âgé d'une trentaine d'années. La victime, blessée, a été évacuée vers le Centre Hospitalier Universitaire de Dijon pour y recevoir les soins adaptés. De l'autre côté, le parcours des tireurs semble plus flou.
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Un feu de voiture a été répertorié à quelques kilomètres du drame. Le commandant divisionnaire Pauget explique que les policiers "ont tout de suite fait le lien avec la fusillade." Puis, à partir de 19 heures, les policiers ont lancé l'opération au niveau du bâtiment Antipode.
Mais pour le président du syndicat Solidaire, "nous n'avons reçu aucun témoignage direct ou indirect qui confirme l'entrée d'un suspect dans l'établissement." Une version, une nouvelle fois démentie par la police, qui explique "que des témoins nous ont rapporté que les individus s'étaient réfugiés dans la résidence universitaire."
D'autres points qui posent question
Le secteur a par la suite été barricadé pendant quatre heures, afin de sécuriser le périmètre. L'objectif était d'assurer la "sécurité des étudiants. Pour ce faire, "nous avons proposé aux étudiants de patienter au niveau du restaurant Montmuzard," ajoute Jean-Marc Quémeneur, directeur adjoint du Crous Bourgogne Franche-Comté.
Cette organisation, qui est de facto le bailleur social de la résidence, est également mise en cause par Solidaire Dijon dans le déroulé des opérations. "Le personnel du Crous aurait fourni un double des clés aux forces de l'ordre pour qu'il puisse fouiller toutes les chambres, même celles vides." Suite à cette opération de police, des étudiants indiquent avoir retrouvé leurs portes entrouvertes.
Une version qui n'est pas confirmée ou infirmée par le Crous. Jean-Marc Quemeneur explique "qu'ils se sont coordonnés, avec les forces de l'ordre, pour que les services de police puissent assurer la sécurité des étudiants. Nous avons donc suivi leurs consignes pour qu'ils puissent réaliser leur intervention."
En revanche, le commandant divisionnaire Pauget assure qu'ils ont bien reçu une carte pour pouvoir accéder à toutes les chambres.
La question d'une opération de police dans une résidence Crous avait déjà été évoquée à Strasbourg, lorsque des policiers avaient interpellé deux jeunes Guinéens, dont un en situation irrégulière.
Qu'un double des clés ait été, ou non, donnés par le Crous, la loi est claire : les résidences universitaires sont considérées comme des espaces privatifs. La police avait donc le droit d'intervenir dans le bâtiment, même sans l'autorisation du bailleur.
Des étudiants "mis en joue" ?
Un autre point interroge le syndicat : la mise en joue d'étudiants. "Quel effet recherche-t-on quand on braque avec des armes de guerres des étudiants, et ce, sans preuve direct que des suspects étaient présents dans l'immeuble ?"
Le président du syndicat n'a pas eu de témoignages directs de ces faits. En revanche, une vidéo tournant sur les réseaux sociaux confirmerait leur dire. On y voit des policiers armés, attendant l'ouverture d'une porte d'un étudiant. Le jeune homme sort, par la suite, les mains en l'air, en ayant les armes des policiers braqué sur lui.
"L'opération est impressionnante, c'est vrai"
De son côté, le commandait divisionnaire Pauget affirme qu'il n'y a pas eu de mises en joue. "Par contre, on a pu demander à des étudiants d'avoir les mains en l'air. Des policiers ont pu avoir des armes sur leurs épaules, mais encore une fois, c'est classique dans ce genre d'opérations."
Il termine par une précision. "L'opération est impressionnante, c'est vrai. Mais, en revanche, il n'y a pas eu d'étudiants terrorisés lors des faits, ou après coup." Solidaire continue de s'interroger sur le bien-fondé "de fouiller les chambres en l'absence de résidents, ou d'appeler la BRI".