Fin de l'obligation vaccinale pour les soignants : "leur retour va amener des tensions au sein des services"

Jeudi 30 mars, la haute autorité de santé (HAS) a conseillé de lever l'obligation vaccinale pour les professionnels de la santé. En Bourgogne, ce sont plusieurs centaines de personnes suspendues qui pourraient retrouver leur métier.

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Et si, un an et demi après, l'obligation de se vacciner pour toute personne travaillant dans un milieu hospitalier prenait fin ? Dans un communiqué, la HAS a conseillé le gouvernement de revoir cette loi. Et le ministre de la santé, François Braun, se dit favorable à cette démarche.

La HAS demande toutefois aux professionnels de la santé à prendre leurs responsabilités s'ils travaillent "avec des personnes vulnérables". Si elle n'est plus obligatoire, la vaccination reste recommandée. Selon France Info, 86% du personnel soignant est vacciné dans les Ehpad ainsi que 89% des médecins libéraux.  

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4 000 agents suspendus de leur fonction

Pour rappel, depuis automne 2021, toute personne non vaccinée contre la Covid-19 n'avait plus le droit d'exercer ses fonctions au sein d'un hôpital. Et selon le collectif rébellion interprofessionnel santé de Saône-et-Loire (CRIS 71), plus de 15 000 agents hospitaliers avaient été suspendus de leurs fonctions et de leurs revenus. Mais la fédération hospitalière en France parle de 4 000 personnes dont 500 infirmiers.

François Thibaut, secrétaire général adjoint de la CGT du CHU de Dijon, se satisfait à moitié de cette annonce. "Nous avons toujours été clairs sur ce point. On ne s’est jamais opposé à la vaccination, si c’était utile dans le cadre de la crise sanitaire. Mais on s’est opposé à une obligation vaccinale. Il y avait d’autres moyens que la suspension pour obtenir une sécurité maximale dans les hôpitaux."

"70 personnes ont dû quitter l'hôpital"

Lorsque l'obligation vaccinale a été mise en place en 2021, c'est au total une centaine de personnes qui ont été suspendus. Une période très compliquée à l'hôpital de Dijon, victime de la crise sanitaire. Du personnel se voyait refuser d'exercer au moment où les services manquaient cruellement de main d'œuvre. "70 personnes ont dû quitter de l'hôpital. En manque de personnel, le Covid a été difficile à vivre pour des collègues. On n'était pas habitués à voir autant de morts. Certains ont décidé de partir et se réorienter. Aujourd'hui, on a un taux de départ important, et des problèmes de recrutement", explique François Thibaut.

Ils ont vécu un traumatisme, ils ont perdu leur emploi et leur salaire.

François Thibaut

Secrétaire général adjoint de la CGT du CHU de Dijon

Si le personnel non vacciné peut revenir exercer au sein du CHU de Dijon, le secrétaire adjoint de la CGT de l'établissement se questionne quant à la réintégration de ses collègues. "On va leur porter une attention particulière. Ils ont vécu un traumatisme, ils ont perdu leur emploi et leur salaire, c'est quelque chose de difficile à digérer. On autorisait du personnel positif mais vacciné à aller travailler quand certains, a priori négatifs, restaient chez eux. "

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"Certains ne veulent pas revenir"

À l'hôpital psychiatrique de la chartreuse de Dijon, il est trop tôt pour célébrer la levée de l'obligation vaccinale selon Delphine Chretien, secrétaire général de la CGT de l'établissement. "On va attendre que les décrets passent et après on verra. Cela ne ferait que trois professionnels qui reviennent sur les huit qui ont été suspendus."

S'ils reviennent, certains collègues ne vont pas bien le prendre.

Delphine Chretien

Secrétaire de la CGT de l'hôpital psychiatrique de la Chartreuse de Dijon

"Peut-être qu'ils ne reviendront pas car ils l’ont très mal vécu. Certains ont retrouvé du travail. Ils sont toujours en colère d'avoir été traités de la sorte alors que certains avaient une carrière de plus de 20 ans. On souhaite qu’ils reviennent ", ajoute-t-elle. 

D'autre part, Delphine Chretien s'inquiète du retour des professionnels non vaccinés s'ils venaient à revenir. "On a des collègues qui ont vécu le Covid de manière difficile. La situation était tendue et très compliquée pour nous, on a travaillé sans matériel pendant longtemps. Certains ont été traumatisés. S’ils reviennent, ceux qui sont restés pendant l'épidémie ne le prendront peut-être pas très bien, le retour va être délicat dans certaines équipes."

"L'honneur de la profession est négligé par une minorité de personne"

La levée de l'obligation vaccinale ne fait pas que des heureux. Sur Franceinfo, le professeur Yves Buisson, épidémiologiste et président de la cellule Covid à l'académie nationale de médecine, regrette cette décision qui envoie "de mauvais messages". Selon lui, on  sous-entend "que les vaccins n'ont pas d'utilité, ce qui est faux. Ce qui est regrettable, c'est que les soignants peuvent choisir ce qui est bon et ce qui n'est pas bon pour eux afin de protéger les malades dont ils ont la charge."

Le professeur va même encore plus loin. "L'honneur de la profession est négligé pour une minorité de personne qui se sont opposées pour des raisons non scientifiques mais politiques, à la vaccination obligatoire." Cette décision arrive à un moment où l'épidémie est loin de toucher à son terme selon Yves Buisson. Et pourtant, il assure que 22 à 35% des soignants suivent la recommandation vaccinale nécessaire. 

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