"Ils vont tuer les indépendants" : pour les petites stations-services, vendre à perte, c’est non

Alors qu'Elisabeth Borne a annoncé ce samedi 16 septembre que les stations-services allaient pouvoir vendre du carburant à perte, en Bourgogne, les petits distributeurs ruraux s'inquiètent. Car selon eux, seules les grandes enseignes pourront appliquer la mesure.

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"C’est n’importe quoi. Comment on peut produire une mesure comme ça ? Economiquement, ce n’est pas possible". Au bout du téléphone, la colère d’Olivier Rousseau est palpable. Ce chef d’entreprise indépendant gère cinq stations-essence installées en Côte-d’Or, dans l'Yonne et la Nièvre.

Des petites structures en pleine ruralité pour lesquelles vendre le carburant à perte est impossible. La mesure "inédite" annoncée par la Première ministre Elisabeth Borne ce samedi 16 septembre, Olivier Rousseau ne l’appliquera pas. "Pour moi, ce n’est pas possible. Je loue un terrain, j’ai l’électricité à payer, je ne peux pas vendre à perte, sinon je ferme les stations immédiatement !", lâche-t-il.

Eric Debaumarchey lui aussi s'oppose à la vente à perte. Il est le propriétaire de deux stations en Saône-et-Loire : à la Clayette et Dompierre-les-Ormes. "C'est une vaste blague. Qui va payer la différence ? On gagne déjà si peu sur un litre que l'on doit se diversifier. On a une boutique, on fait blanchisserie, on vend des articles de pêche, on fait également relais colis", confie le chef d'entreprise qui compte six salariés.

Une mesure pour les gros distributeurs ?

Pour rappel, à partir du 1er décembre prochain et durant six mois, les stations-services pourront vendre le carburant à perte. Une mesure élaborée pour faire face à la flambée des prix à la pompe. Mais pour Olivier Rousseau, seuls les gros industriels pourront l’appliquer.

"Ils vont vendre à perte et augmenter de 10 % les prix dans leurs magasins. Moi je suis indépendant. Si je ne gagne pas d’argent, comment je paye mon abonnement EDF ou le camion qui approvisionne ? Une entreprise a besoin de gagner de l’argent pour vivre !". 

Il n'y a que la grande distribution qui peut vendre à perte. Eux, c’est un simple prix d’appel. Ils gagnent sur les produits qu’ils vendent en magasin.

Eric Debaumarchey, propriétaire de deux stations-services

Mais du côté de l’exécutif, on assure que les pertes liées à la vente de carburants ne seront pas compensées par la hausse des prix d’autres produits. Olivier Véran croit ainsi à la "bonne volonté affichée par ceux qui vendent de l’essence de faire des efforts supplémentaires". Le porte-parole du gouvernement qui estime par ailleurs que la mesure fera économiser "un demi-euro par litre" au contribuable.

"Je pense que les gens ne vont pas gagner énormément avec cette mesure, allez, deux centimes, estime de son côté Olivier Rousseau avant de poursuivre. Je suis déçu par ces gens qui ne savent pas compter. Et nous les PME, ça fait longtemps qu’on est oubliées par le gouvernement".

Moi, si c'est pour vendre à perte, il vaut mieux que je ferme. Je perdrai moins d'argent en fermant.

Eric Debaumarchey, propriétaire de deux stations-services

"Ils vont tuer les indépendants. Il ne restera plus que la grande distribution qui aura un monopole. Les petites stations vont fermer car ils n'auront plus personne, ça va encore mettre des gens au chomâge", s'inquiète Eric Debaumarchay.

Car la crainte principale est là. Avec une grande distribution capable de faire chuter les prix et des petites stations qui n'ont pas les moyens de suivre, les indépendants craignent une fuite de la clientèle. "On n'aura plus personne. On est rejeté par l'Etat..."

Situé dans une zone plus rurale, Olivier Rousseau, lui, ne s’inquiète pas nécessairement. "Les gens resteront fidèles. Ils ne feront pas 40 kilomètres pour gagner quelques centimes sur un plein de 50 litres".

Un contexte fragile pour les stations indépendantes

Si Olivier Rousseau n’appliquera pas la vente à perte dans ses stations, c’est parce qu’avec l’inflation, ses marges sont déjà très faibles. "Le contexte est vraiment très compliqué, avec des variations de prix trois fois par jour. Parfois les prix baissent, parfois ils remontent. Mais on n’a pas de marge énorme. On va gagner 50 euros sur 1 000 litres. Mais des fois, avec les variations, on se retrouve avec 20 euros de marge".

Dans notre grande région, on compte 150 stations rurales. Des structures qui subissent la concurrence des gros distributeurs et qui voient leur nombre de clients chuter. Selon Mobilians, le syndicat des professions automobiles, un tiers d’entre elles pourrait disparaître d’ici 2035.

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