"La réserve est vide" : faut-il craindre une pénurie de profs à la rentrée en Bourgogne-Franche-Comté ?

Une fois encore, plus de 3 000 postes ouverts aux concours enseignants n'ont pas trouvé preneur. Les syndicats de la région tirent la sonnette d'alarme. Ils dénoncent une mauvaise stratégie du ministère, qui aurait trop recours aux enseignants contractuels pour compenser le manque de personnel.

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C'est devenu une forme d'habitude : cette année encore, les concours enseignants n'ont pas permis de pourvoir l'ensemble des postes au niveau national. Sur les 27 589 postes ouverts cette année, 3 185 n'ont pas trouvé preneur. De quoi poser une nouvelle fois la question de la présence d'un enseignant devant chaque classe au mois de septembre.

Un tiers des cours annulés dus à des profs non remplacés

Car sur la dernière année scolaire, "à vue de nez sur l'académie de Dijon, entre 25 et 35 % des cours qui sautaient étaient dus à des absences non remplacées par l'institution", détaille Jérôme Naine, secrétaire académique du syndicat de chefs d'établissements SNPDEN-UNSA.

Et à l'entendre, la situation risque de s'aggraver encore un peu plus à la rentrée de septembre :

Les 3000 [postes manquants] de cette année s'ajoutent aux 3000 de l'an dernier, qui s'ajoutent aux précédents...

Jérôme Naine

secrétaire académique du syndicat de chefs d'établissements SNPDEN-UNSA

"On a beau voter des budgets à l'Assemblée nationale pour le choc des savoirs, s’il n’y a pas de profs, on ne peut rien faire !" se désole-t-il.

Les départements de l'Yonne et la Nièvre particulièrement concernés

Ces chiffres n'étonnent pas Arnaud Munsch, membre du syndicat enseignant SNES-FSU dans l'Yonne, spécialiste des questions d'entrée dans le métier : "Dès les inscriptions au concours, on sait qu'il va y avoir un souci, qui se confirment aux résultats. L’Yonne et la Nièvre sont particulièrement concernées, car ce sont des zones moins attirantes pour les nouveaux profs. Certains font des recours pour ne pas venir dans les départements dans lesquels ils sont envoyés."

D'autres fois, les contractuels jetteraient l'éponge au bout de quelques semaines : "À la rentrée 2022, au lycée de Sens dans l'Yonne, ils sont quatre à avoir démissionné dès le mois de septembre."

C’est un plan social chaque année dans l’Éducation nationale.

Arnaud Munsch

membre du syndicat enseignant SNES-FSU dans l'Yonne

Les deux syndicalistes de l'académie de Dijon se rejoignent sur un point : à la fin, ce sont les remplacements impromptus qui trinquent. En effet, pour combler les postes vacants, les professeurs remplaçants sont mobilisés en continu, ce qui vide toute la réserve d'enseignants censée normalement pallier les absences, pour raisons médicales entre autres.

"Nous, c'est comme dans une équipe de foot", explique Jérôme Naine.

On démarre l'année avec un nombre de remplaçants insuffisant, et quand on a besoin de remplaçants, on regarde le banc de touche et il n’y a plus personne.

Jérôme Naine

secrétaire académique du syndicat de chefs d'établissements SNPDEN-UNSA

Sur l'académie de Besançon, "le ministère y va au forceps"

La situation est tout autant dégradée côté Franche-Comté, selon les représentants locaux des syndicats SNES-FSU et UNSA. Et ce, dès le début de l'année scolaire : "Ici, en septembre 2023, dans un établissement sur deux, certains cours n'étaient pas assurés, selon un sondage que nous avons réalisé", dénonce Nathalie Faivre, du SNES-FSU.

Pour la rentrée 2024, sur l'académie de Besançon, 174 contractuels à mi-temps ou à temps plein sont attendus pour renforcer les effectifs selon l'UNSA, accompagnés de 44 alternants. Un non-sens pour Nathalie Faivre, qui estime que "le ministère y va au forceps et les place là où il y a des besoins, sans leur demander leur avis. De quoi facilement provoquer des renoncements au concours."

La syndicaliste dénonce par la même occasion une hausse du recours à ces contractuels dans son académie, alors que dans le même temps le nombre de titulaires baisserait d'année en année.

La formation des enseignants à Bac +3 sur la table

La ministre de l’Éducation nationale, Nicole Belloubet, avoue de son côté qu’il y a toujours des efforts à faire du point de vue de la rémunération. Interrogée sur franceinfo mardi 9 juillet, elle évoque la publication d’un texte fixant la formation des enseignants à Bac +3 “avec deux années qui seront rémunérées ensuite pour l’obtention d’un master et qui leur permettront progressivement d’entrer dans la carrière”.

Des annonces perçues plutôt positivement par les syndicats, qui y voient entre autres une forme de retour au modèle de l'école normale primaire (établissements chargés jusqu'en 1991 de former les instituteurs et institutrices de France), avec une entrée progressive dans le milieu.

Mais cela ne résoudra évidemment pas tout : "Aujourd'hui, si on a des étudiants qui ne veulent pas être profs, ce n'est pas parce qu’ils passent le concours trop tard", signale Arnaud Munsch du SNES-FSU. "C'est avant tout une histoire d'image du métier, et de salaire."

Contactés, les rectorats des académies de Dijon et Besançon n'ont pas répondu à nos sollicitations.

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