Loup en Bourgogne : "de plus en plus de demandes" pour les patous, les chiens de protection des troupeaux

Les éleveurs de Bourgogne sont de plus en plus nombreux à s'équiper de chiens de protection, face à la menace du loup qui s'installe dans la région. Mais l'arrivée d'un patou n'est pas à prendre à la légère, pour que sa présence soit efficace.

C'est une inquiétude quotidienne pour une partie des éleveurs bourguignons : désormais, le loup est bien implanté dans la région et sévit sur les troupeaux. Cette semaine, la préfecture a annoncé avoir formellement identifié un loup à Dompierre-les-Ormes, en Saône-et-Loire, où des attaques ont récemment eu lieu. 

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En réponse, les services de l'État incitent les éleveurs à se munir de moyens de protection : clôtures électriques et surtout, chiens de protection. Ce sont des "patous", essentiellement des chiens de race montagne des Pyrénées, blancs et de grande taille. Mais la naissance, l'arrivée et l'installation de ces chiens dans un troupeau n'est pas une chose facile.

Ne pas se précipiter pour acheter un patou

"On a de plus en plus de demandes", confirme à France 3 Anthony Chanvin. Lui-même éleveur de brebis à Rouvray, en Côte-d'Or, il est l'un des deux référents en Bourgogne de l'IDELE, l'institut de l'élevage. Son rôle : accompagner les éleveurs qui veulent adopter un patou, pour que l'installation se passe au mieux. 

"En Bourgogne, pour l'instant, c'est assez disparate", note Anthony Chanvin. Le recours aux patous n'est pas encore aussi répandu que dans les Alpes et les Pyrénées. 

"Dans la région, les premiers patous sont arrivés il y a trois ans environ, surtout dans l'Yonne : le Tonnerrois, le Vézelien et la Puisaye."

Anthony Chanvin

"Le schéma actuel, c'est que les éleveurs prennent un chien une fois qu'il y a des dégâts chez eux ou à proximité. Mais il ne faut surtout pas se précipiter dans l'achat du chien, il faut peser le pour et le contre."

En effet, dans l'urgence, certains éleveurs font de mauvais choix. "Je viens de recevoir un coup de fil d'un exploitant qui a fait l'erreur de prendre deux jeunes chiots en même temps. Ça va être compliqué. Il faut vraiment nous appeler en amont", insiste-t-il.

"Si on avait un réservoir de chiens débourrés, déjà prêts à l'emploi, on serait tranquille. Mais ce n'est pas le cas et le problème, c'est que parfois, les éleveurs ne suivent pas les conseils."

Anthony Chanvin

Un patou efficace ne se trouve pas n'importe où

Car il y a plusieurs paramètres à prendre en compte : un chien jeune doit être accoutumé et éduqué. Actuellement, l'adoption des patous se fait de manière assez informelle : "Ce sont souvent des éleveurs qui ont des couples de patous et qui ont des naissances, ils mettent des annonces sur internet, ou les vendent à d'autres éleveurs grâce au bouche-à-oreilles."

"Il y a aussi un effet de mode", prévient Anthony Chanvin.

"Des particuliers se mettent à élever des chiens soi-disant de protection pour les vendre aux éleveurs."

Anthony Chanvin

"Mais ils ne les font pas grandir dans des troupeaux, ou alors ils achètent 10 brebis et les vendent comme des chiens de protection." Un business qui peut être lucratif : en Bourgogne, de jeunes chiens peuvent coûter entre 500 et 1000 euros, voir plus s'ils sont de race plus rare ou inscrite au LOF, le livre des origines français. "Mais un chien de protection, ce n'est pas juste un chien qu'on met dans un petit troupeau. Il faut une éducation aux brebis, aux clôtures, aux passants." 

La première année d'éducation du chien est "cruciale"

Or, pour qu'un patou soit efficace, "la première année est cruciale, et il faut environ un an et demi de mise en place", note le réferent de l'IDELE. Le chien doit apprendre à marcher en laisse, à monter en voiture. Il ne doit pas mordre les brebis ni attaquer les intrus. "Avec les passants, au mieux, il doit aboyer. Un patou ne doit réagir que quand il y a menace. En général, ils n'engagent le combat qu'avec de gros prédateurs."

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Les chiens doivent aussi apprendre à respecter les clôtures électriques. Celles-ci sont indispensables pour bénéficier des subventions de l'État lorsque les éleveurs achètent des chiens de protection. "Or souvent, les chiens fuguent."

Malgré toutes ces contraintes, si les bases de l'éducation sont apprises, "il y a de vrais avantages", assure l'éleveur de Rouvray. "Clairement, il faut réussir la mise en place du chien la première année, et ensuite on est tranquille." Anthony Chanvin a vu la différence. En 2017, une attaque de chiens errants a tué 12 brebis et causé 20 avortements. En 2018, un loup a tué une de ses chèvres et a cassé les clôtures. Depuis qu'il a adopté son premier patou il y a quatre ans, il est plus serein.

"Un patou ne repousse pas que les loups ! Depuis que j'ai les miens, je n'ai plus de renards, plus de chiens errants, plus de corbeaux qui attaquent mes agneaux, plus de sangliers qui viennent retourner mes parcelles, plus de gens qui volent mes agneaux ou mes batteries de clôtures électriques."

Anthony Chanvin

"C'est un gros dossier", conclut Anthony Chanvin. En France, l'IDELE estime qu'il y a environ 7000 chiens de protection subventionnés par les services de l'État. Certains éleveurs en possèdent, sans pour autant demander des aides : difficile donc de savoir leur nombre précis. Un logiciel de recensement des chiens est en train d'être mis en place par l'institut de l'élevage et devrait être opérationnel d'ici la rentrée de septembre.

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